En début d’année 2024, l’archevêque de Malte — un Canadien d’origine —, Mgr Charles Scicluna, a déclaré que l’Église catholique devrait revoir son exigence de célibat pour les prêtres de rite latin. Questionné sur le sujet par Le Placoteux, l’évêque du diocèse de Sainte-Anne-de-la-Pocatière, Mgr Pierre Goudreault, n’est pas fermé à une discussion à cet effet auprès de ses confrères.
D’entrée de jeu, Mgr Pierre Goudreault a tenu à rappeler qu’il était déjà possible d’être marié tout en étant prêtre dans l’Église catholique.
« Il faut dire que l’Église catholique de rite oriental peut ordonner prêtre un homme marié. Il en va de même pour les prêtres protestants mariés qui ont décidé de retourner au catholicisme », a expliqué le prélat local.
Selon la définition de Wikipédia, les Églises catholiques orientales (ou Églises uniates) sont la composante de rite oriental de l’Église catholique. Elles se caractérisent par le fait d’être en communion avec l’évêque de Rome (le pape), dont elles reconnaissent la primauté. Elles utilisent les rites liturgiques orientaux, et sont définies dans la terminologie catholique comme étant des Églises autonomes, ou Églises de droit propre. Elles sont considérées comme faisant pleinement partie de l’Église catholique, au même titre que l’Église latine comprenant le rite romain, le rite ambrosien ainsi, que le rite mozarabe.
Selon les chiffres de l’Annuaire pontifical, l’Église catholique de rite oriental compte environ 18 millions de fidèles en tout, soit 1,5 % des catholiques, qui sont, rappelons-le, plus de 1,2 milliard autour du globe.
Quant aux prêtres protestants mariés s’étant convertis au catholicisme, la raison de cette transition vient du fait qu’ils refusent d’accepter que les femmes soient ordonnées prêtres, et qu’ils s’opposent à célébrer les unions homosexuelles — deux pratiques désormais permises dans l’Église anglicane. Il faut également noter que les prêtres de rite oriental et ceux arrivant du protestantisme ne peuvent devenir évêques, puisque l’Église catholique n’a pas d’évêque marié.
Un sujet d’actualité
Selon Mgr Goudreault, le sujet n’est pas nouveau, puisque le Saint-Père François s’est déjà prononcé à quelques reprises sur cet épineux dossier.
En effet, en 2017, le pape a ouvertement déclaré que l’Église devait envisager d’ordonner prêtres des hommes mariés. Par contre, deux années plus tard, le chef de l’Église catholique a écarté tout changement de règle, en concédant toutefois en 2023 que le célibat « n’est pas éternel, comme l’ordination des prêtres », mais demeure davantage une « discipline ».
« Il y a une question de disponibilité. Lorsque tu es marié et que tu as des enfants, tu as évidemment moins de temps à consacrer à ta communauté. Il y a aussi la question de la mobilité, car lorsque tu es transféré dans une autre paroisse, il y a des changements inhérents qui s’ensuivent. Tu dois à ce moment déménager toute ta famille, qui souvent s’était fait des amis à cet endroit », analysait Mgr Goudreault.
Par contre, l’évêque du diocèse de Sainte-Anne-de-la-Pocatière ne voit pas d’incompatibilité avec le fait d’exercer son ministère en étant marié. « Il faut savoir qu’au début du christianisme, et dans les premières années de l’Église catholique romaine, les prêtres pouvaient se marier », a-t-il précisé.
À titre informatif, c’est au concile d’Elvire, vers l’an 305, que l’Église interdira aux membres du clergé de prendre une épouse, et ce, disait-on, dans un souci d’élévation morale. Le concile de Nicée, en 325, interdira même aux prêtres de cohabiter avec une femme. Toutefois, aucune consigne de célibat ne sera respectée. Même qu’à cette époque, l’Église recrutait directement ses prêtres parmi les hommes mariés. Des papes ont ainsi eu des enfants, dont certains sont devenus prêtres à leur tour.
C’est à partir du XIe siècle que le pape Grégoire VII imposera davantage de rigueur dans cette règle, après que des prêtres mariés aient profité de leur famille pour s’enrichir, en offrant une rente à leurs descendants. L’obligation du célibat sera donc formellement réitérée lors du deuxième concile du Latran, en 1139, afin de protéger le patrimoine de l’Église.
Mgr Charles Scicluna estime aujourd’hui que l’Église devrait repenser l’obligation de célibat pour les prêtres, tout en reconnaissant que certains considéreront cette décision comme étant « hérétique ».
« Si cela ne tenait qu’à moi, je réviserais la règle qui requiert le célibat pour les prêtres. L’expérience m’a montré que c’est un sujet que nous devons aborder sérieusement. L’Église a perdu de grands prêtres, car ils ont choisi le mariage, et certains doivent composer avec une relation sentimentale secrète. Il faut ainsi prendre en considération le fait qu’il arrive parfois aux prêtres de tomber amoureux, et d’être contraints de choisir entre ça et leur vocation », a-t-il déclaré au journal Times of Malta.