Place aux lecteurs: Pourquoi le monde agricole en arrive-t-il à enlever le privilège de circuler sur ses terres?

Dans la dernière édition du Placoteux, il était question de la problématique des mesures de resserrement des programmes agricoles qui se traduisait par une levée du privilège d’accès aux terres agricoles au Québec comme moyen ultime de négociation de la part des propriétaires.

Ce qui me fait réagir au discours qu’on entend, c’est le choix malicieux des termes employés par nos élus et hauts fonctionnaires pour venir sabrer dans les programmes d’assurance-revenu. Ce qu’ils disent : retirer de l’enquête des coûts d’une production donnée, les 25 % des fermes les moins performantes, les moins efficaces. Cela donne à penser que ces fermes sont très mal gérées.

Alors, ce qu’il faut savoir : le pourquoi de la contre-performance. Ton coût de production étant influencé par les frais de transport de tes intrants, par l’accès aux marchés de ton produit, par l’expertise ciblée inexistante dans ta région dont ton travail nécessite les dernières découvertes, c’est une partie de la liste des causes qui font que tu dois « ultra performer » dans tous les autres champs d’activité de ton métier si tu veux être. Pour mon cas, étant éleveur, la maladie, les périodes intenses de froid, de chaleur, la qualité des intrants disponibles viennent nous rappeler la fragilité des troupeaux et ainsi escamoter n’importe quel budget si sérieux soit-il.

On est « ben » tanné des aberrations qu’on entend de nos élus : oui, sauvegardons nos régions, revitalisons-les, nourrissons le Québec. C’est bien beau tout ça, mais cela leur demanderait d’être rationnels quand vient le temps de poser des actions en lien direct avec ces belles paroles… Ce sont donc nos régions qui se retrouvent méprisées avec ces mesures qu’on ne peut, qu’on ne doit accepter.

Ça m’a coûté une fortune pour exiger de mon élevage de toujours, année après année, devoir produire plus pour survivre. Imaginez… mon animal se vend le même prix que mon père obtenait en 1970, mais avec une multitude de règlements en plus.

Présentement, le discours du gouvernement Charest est de nous faire croire, à vous et à moi, qu’il existe des productions moins à risque avec des montants pour aider à la transition. Comment voulez-vous que je les prenne au sérieux? C’est venir me demander de mettre à la poubelle mon expertise, mon capital investi pour me tourner vers l’inconnu. Mon banquier serait sûrement très emballé de la chose…

Espérant vous avoir sensibilisé au monde agricole qui donne bien malgré lui, une image de richesse comme me disait un concitoyen. Je lui fis remarquer que ce qu’il voyait en passant devant chez moi était mon actif et non mon bilan!

Claude Lavoie,
Éleveur à Saint-Pascal