Dans l’édition du 14 mai du journal Le Placoteux, on peut lire un article intitulé « Une pêche miraculeuse à Rivière-Ouelle ». On y retrace, avec une certaine nostalgie, un bref historique de la pêche au béluga dans la région en mentionnant qu’il s’agissait là d’une « pratique très ancienne à Rivière-Ouelle et dans les îles de Kamouraska ». Tout cela, photo de douzaines de bélugas morts à l’appui.
Le moment ne saurait être plus opportun, puisque cet article paraît au cours de la semaine où les participants à la Marche des peuples pour la terre mère s’arrêtent dans les municipalités desservies par notre journal local. L’un des objectifs de cette marche étant, faut-il le rappeler, de sensibiliser la population aux risques que représentent les levés sismiques actuellement effectuées à proximité de Cacouna ainsi que la construction d’un port de mer dans le secteur où ces mammifères marins mettent bas.
Ce qui est encore plus embarrassant dans cet article, c’est sa démonstration de l’ignorance de la cause principale de la disparition des bélugas dans le St-Laurent : la chasse aux bélugas. « La population de bélugas de l’estuaire du Saint-Laurent (ESL) est estimée à quelque 1 100 individus, ce qui représente, au mieux, moins de 15 % de ce qu’elle pouvait être à la fin du XIXe siècle. La cause principale de ce déclin est attribuable à la chasse, laquelle n’a pris fin qu’en 1979. » Ce passage est tiré d’un numéro du magazine Le naturaliste canadien paru en 2008, et quelques petites recherches en ligne suffisent pour découvrir quantité de ressources scientifiques à l’appui de cet énoncé. Et cela, même avant d’aborder la question des matières toxiques présentes dans leur environnement qui contribuent davantage à leur disparition annoncée. Il n’y a donc vraiment pas de quoi être fiers de ces pêches dites « miraculeuses » qui ont graduellement décimé la population de ce grand mammifère marin et plus aucune raison d’en parler avec nostalgie.
Cet article est offensant pour tous ceux qui ont à cœur la protection de l’environnement et qui savent que plus on pêche de poisson, moins il en reste dans les océans, les fleuves et les rivières. C’est une petite équation toute simple.
En 2010, il y a déjà quatre ans de cela, le Programme des Nations unies pour l’environnement nous annonçait que « les océans auront été complètement vidés de leurs ressources halieutiques d’ici 2050 » (Le Devoir, 3 mai 2014). Les personnes qui entendent remettre en question ces affirmations des Nations Unies sont mieux d’arriver avec des dossiers bien étoffés.
Danielle Caron
Kamouraska