Métiers non traditionnels pour filles d’aujourd’hui

SAINT-PASCAL – Malgré le temps qui passe et l’évolution des mœurs, les établissements d’enseignement constatent année après année que les inscriptions féminines dans des programmes menant à l’exercice de métiers traditionnellement masculins restent marginales. Au lendemain du 8 mars, Le Placoteux a voulu connaître quelques-unes des initiatives mises sur pied pour renverser cette tendance.

À la Commission scolaire Kamouraska–Rivière-du-Loup, bon an, mal an, à peine 2 % des inscriptions dans des programmes traditionnellement masculins sont le fait des femmes. Au Centre de formation agricole (CFA) de Saint-Anselme de la Commission scolaire de la Côte-du-Sud, seulement une ou deux filles par année sont présentes dans le programme de mécanique agricole.

Selon Sylvain Beaulieu, professeur au CFA, la formation en ligne a cependant permis de rejoindre beaucoup de femmes dont le travail sur la ferme familiale rendait plus difficile un retour aux études. « Cette année, a souligné M. Beaulieu, ce sont 30 % des étudiants en Production animale qui sont des femmes. La formation à distance a été un grand facilitateur pour elles. »

Les Reb’Elles

Au tournant des années 2000, Julie Trudel-Lefebvre, une enseignante en soudage-montage au Centre de formation professionnelle Pavillon-de-l’Avenir de Rivière-du-Loup, avait instauré des rencontres mensuelles avec les étudiantes, pour renforcer leur détermination à poursuivre un parcours parfois difficile.

Aujourd’hui, toujours sous l’impulsion de Mme Trudel-Lefebvre désormais directrice adjointe du Pavillon-de-l’Avenir, ces jeunes femmes qui étudient dans un monde d’hommes se sont baptisées les Reb’Elles. Elles sont une quinzaine, qui assistent ponctuellement à des conférences présentées par des femmes venues raconter leur expérience dans des milieux majoritairement composés d’hommes. Ces rencontres sont très appréciées des étudiantes, qui trouvent parfois difficile d’être « la seule fille dans la classe ».

Par ailleurs, les Reb’Elles effectuaient chaque année depuis 2011 une tournée des classes de 5e et de 6e année sur tout le territoire de leur Commission scolaire. Financée par le programme Projets novateurs, cette tournée visait à sensibiliser les jeunes filles à la diversification des choix professionnels à leur disposition. Valérie Lepage, agente de développement responsable du dossier Reb’Elles, notait cependant que « cette année, on n’a pas encore de nouvelles à propos de notre demande de financement; l’ensemble du projet Reb’Elles est donc sur la glace ».

Chapeau les filles !

Changer les perceptions par rapport aux choix de carrières non traditionnelles pour les femmes est un travail de longue haleine. Depuis 1996, le programme Chapeau les filles! (CLF) vise à soutenir les femmes qui choisissent un tel parcours. Les participantes peuvent ainsi mieux cerner leurs motivations, leurs objectifs de carrière et leurs ambitions.

Chaque année, quatre ou cinq étudiantes du Pavillon-de-l’Avenir participent à ce concours. En 2014, Camille Lemelin, une étudiante en soudage-montage, a remporté la finale régionale (voir autre texte). Au CFA Saint-Anselme, deux bourses régionales et un prix national ont été remportés l’an dernier.

Selon Sylvain Beaulieu, les participantes « ressentent une grande fierté d’avoir persévéré dans un cheminement parfois difficile, surtout dans notre établissement où les étudiantes doivent concilier leur retour aux études avec le travail à la ferme et leurs obligations familiales ».

Pas de volet régional en 2014

La pause décrétée par le gouvernement provincial pour le volet régional de CLF a été reçue avec inquiétude par le milieu. Valérie Lepage a déploré la mise au rancart de ce coup de pouce, dont les coûts sont minimes par rapport au soutien moral qu’il prodigue aux étudiantes. « C’est difficile pour les filles de comprendre les raisons qui motivent ces coupures. Elles se sentent larguées. »

Pour Sylvain Beaulieu, même le volet national a été retardé de plusieurs mois, et il sera difficile de motiver ses étudiantes à s’y inscrire : « Au CFA, les étudiantes sont en stage à ce temps de l’année. Elles sont plus difficiles à joindre et donc à recruter. Surtout qu’on n’a presque pas d’information à leur donner sur le concours. Le site internet parle du 20 mars pour le lancement du volet national, mais on n’en sait pas plus. »

Selon Kevin Morin, attaché politique du député de Côte-du-Sud Norbert Morin, cette suspension du volet régional de CLF est temporaire. « Dans le contexte de la fermeture des directions régionales du ministère de l’Éducation, qui géraient ce programme, il était plus sage de reporter d’une année la tenue du volet régional de Chapeau les filles!, mais il sera de retour en 2015, c’est certain. » Il serait d’ailleurs géré par les responsables du volet national, selon M. Morin.

Quant au retard constaté au national, il serait attribuable à des problèmes d’organisation, eux aussi temporaires. « Nous sommes très conscients des bienfaits de ce programme pour la motivation des femmes à faire des choix de carrière différents, a insisté l’attaché politique. Cette pause est due à des circonstances particulières, mais il n’est pas question de saborder Chapeau les filles! »