L’ISLET – La Société québécoise d’ethnologie (SQE) présentait samedi dernier, au Musée maritime du Québec, devant une vingtaine de personnes, la démarche qui a mené vers la reconnaissance du canotage sur glace au titre de patrimoine immatériel du Québec, de même que les perspectives en vue de la reconnaissance internationale.
Tel que le mentionnait l’ethnologue Richard Lavoie, il faut savoir qu’il s’agit d’une reconnaissance patrimoniale importante. La pratique- de la navigation en canot à glace est le deuxième élément à être reconnu par le ministère de la Culture, après les chants de gorge inuits. C’est la SQE qui est à l’origine de la demande de désignation patrimoniale.
Le patrimoine immatériel se décline en cinq catégories : les savoir-faire, les connaissances-, les expressions, les pratiques et les représentations vivantes. La pratique des savoirs et des savoir-faire de la navigation en canot à glace remonte à plus 400 ans, le premier témoin d’origine européenne ayant été Samuel de Champlain à l’hiver 1609, alors qu’il a vu un groupe d’Amérindiens traverser le fleuve en canots d’écorce vers Québec. Elle est toujours vivante et se transmet encore de façon dynamique.
« Le canotage sur glace résulte de transferts- culturels entre Amérindiens et Euro-Québécois-, ces derniers ayant ensuite adapté des embarcations – des pirogues, puis des canots –, qui devinrent de plus en plus sophistiquées et solides, comme moyen de transport-. Au fil des ans, en particulier avec le Carnaval de Québec depuis 1955, cette navigation est passée du transport- au sport », de souligner l’ethnologue.
Longue route encore
Bien que la SQE ait réussi à faire reconnaître le titre de « patrimoine maritime vivant » par le Gouvernement du Québec en moins de quatre ans en février 2014, il semble que le chemin pourrait être plus long pour accéder au « Saint des Saints », soit la reconnaissance du phénomène à l’international, du côté de l’UNESCO, comme but ultime.
« Le fait est que, pour l’instant, comme le soulignait le présentateur de la rencontre- l’ethnologue Jean Simard, le gouvernement fédéral n’a pas encore signé la convention internationale de cet organisme pour la reconnaissance du patrimoine immatériel ». Or pour que soit reconnu un phénomène à L’UNESCO, l’État nation doit avoir adhéré à cette convention. Cependant, les ethnologues continuent leur travail et gardent- bon espoir que le gouvernement du Canada colla-borera, d’autant plus que le Québec a un statut particulier à L’UNESCO.
Recherches en cours
Au cours de cette présentation, qui a eu lieu au Musée maritime, les ethnologues Richard Lavoie et Suzanne Marchand ont également présenté les résultats des recherches menées actuellement pour terminer de documenter la navigation en canot à glace sur le fleuve Saint-Laurent depuis Montréal, jusqu’aux îles de La Madeleine.
Ces recherches et celles faites auparavant, qui avaient permis la production du livre Naviguer en canot à glace, un patrimoine immatériel ayant servi à la reconnaissance, devraient faire l’objet d’une exposition su Musée maritime du Québec. Le rapport final de cette deuxième partie des recherches sera déposé le 31 mars prochain au ministère de la Culture.
Canotiers présents
Cette présentation a été suivie de la projection du film Noël à l’Île-aux-Grues, un classique du cinéma québécois réalisé par le cinéaste Richard Lavoie, en 1964. Basé sur un fait vécu, ce film montrait la difficile traversée en canot à glace de cinq insulaires devant emprunter le canot à glace pour retourner à l’Île-aux-Grues la veille de Noël. Pris au milieu du fleuve, ceux-ci passent la nuit à dériver sur une glace et ne peuvent rentrer au bercail que le lendemain, jour de Noël.
À la suite de la projection, les échanges du public sont allés bon train avec les deux canotiers invités à participer à l’événement, MM. Roger Lachance et Jacques Roy. En plus de connaître les acteurs du film, tous des insulaires, ils y sont allés de leurs anecdotes et de commentaires fort intéressants, rappelant des souvenirs- concernant l’époque du canot comme moyen de transport et aussi celle de leurs bonnes années de course en canot.
Quand au canotier Raynald Fortin, 71 ans et toujours actif, il s’est joint au groupe un peu plus tard, après être allé à Québec pour recevoir- le trophée NCSM Montcalm, au Musée naval. Ce trophée, un aviron enjolivé à la main par des membres de la marine, souligne l’esprit de corps, la combativité, la ténacité et l’esprit d’équipe des canotiers de la catégorie sport. Il sera remis chaque année une équipe méritante.