Hélène Desjardins : Du fleuve à l’aquarelle

Hélène Desjardins. Photo : Maxime Paradis.

Michel Rivard chantait qu’il voulait la voir. Hélène Desjardins, elle, rêvait de la peindre. La mer, celle qui s’appelle toujours fleuve sur les berges de son Kamouraska natal, c’est elle qui a conduit Hélène Desjardins à la peinture. Et comme si elle ne pouvait se défaire de cette image de l’eau qui l’a toujours habitée, ce n’est que lorsqu’elle a découvert l’aquarelle qu’elle a réellement trouvé sa voie comme artiste peintre.

Elle n’a pas eu d’autre choix que de tout arrêter son travail, si elle désirait se raconter correctement. Participante au 26eSymposium du Kamouraska, Hélène Desjardins s’adonne à peindre les chutes de la rivière Ouelle à Saint-Onésime-d’Ixworth, près du fameux pont couvert. D’ailleurs, on peut l’apercevoir, pratiquement complété, dans le haut du tableau. « Je suis rendu aux chutes. C’est un gros défi et je suis un peu nerveuse, je dois avouer. Je n’en ai jamais fait », avoue-t-elle.

En même temps, les défis, c’est ce qui la stimule. Autrement, elle ne serait pas aquarelliste.

« L’aquarelle, c’est le médium du lâcher-prise. Ç’a été très formateur dans ma vie », enchaîne-t-elle.

Anciennement enseignante en mathématique au Collège de Sainte-Anne-de-la-Pocatière, Hélène Desjardins avoue qu’avant, elle était plutôt de nature « cartésienne. » « En fait, je crois que c’est peut-être pour ça que j’ai arrêté de peindre à l’huile. C’était trop près de ce que j’ai toujours été », indique l’artiste, retraitée de l’enseignement depuis 2004. Ça, mais principalement un coup de cœur pour l’aquarelle, cette indomptable qu’Hélène Desjardins a mis à sa main, un coup de pinceau à la fois, après s’en être éprise lors d’un précédent Symposium au début des années 2000.

Depuis, elle s’y adonne à temps plein, se formant ici et là avec des aquarellistes de renoms de partout dans le monde, allant jusqu’à suivre des stages en France et même en Italie. « Je choisis toujours mes formations en fonction de ce que j’ai le goût de développer ou d’apprendre. Mais je ne vais jamais au-delà d’un ou deux stages, car je ne veux pas en venir à copier un autre aquarelliste », confie-t-elle.

Parce qu’avoir sa propre signature, Hélène Desjardins y croit. D’ailleurs, elle pense bien humblement l’avoir développée au fil du temps, que se soit en essayant de reproduire une atmosphère unique sur chacune de ses toiles, à travers cette quête de lumière qu’elle cherche toujours à bien conserver, ou même ce désir de flou qu’elle équilibre suffisamment afin de bien recréer ce style semi-figuratif dans lequel elle aime bien inscrire ses œuvres. « Je n’aime pas me comparer aux autres, mais oui, je crois faire quelque chose de distinctif », reconnaît-elle.

Kamouraska

Et comme si se dévouer corps et âmes à son art ne suffisait pas, en parallèle, Hélène Desjardins semble s’être investie d’une mission : promouvoir le travail des artistes peintres de sa région. Que ce soit au sein du regroupement des artistes peintres du Kamouraska, Reg’ Art, dont elle assume la présidence, ou même à titre de responsable de la salle d’exposition de l’Édifice Gérard-Dallaire de La Pocatière, depuis près de 10 ans, s’impliquer bénévolement semble être devenue une deuxième nature pour l’aquarelliste de Sainte-Anne-de-la-Pocatière. « Je crois qu’il est important de valoriser le travail des artistes peintres. La beauté du monde qu’ils s’efforcent de traduire à travers leurs œuvres, il faut qu’elle soit vue », s’exclame-t-elle.

Une affirmation dans laquelle s’inscrivent à merveille ses Carnets de Kamouraska, parus en 2006, et écoulés depuis à environ 850 exemplaires. « J’étais ambitieuse, j’avais commandé un tirage de 1000 exemplaires. Il doit m’en rester environ 150 », dit-elle en riant.

Véritable déclaration d’amour à son village natal, les Carnets de Kamouraska sont le fruit d’un été, celui de 2005, où Hélène Desjardins a choisi de peindre ses coups de cœur. « Je revenais d’un stage avec Gilles Matte qui a réalisé plusieurs carnets sur des régions du Québec et je me disais que Kamouraska en méritait un », se souvient-elle.

Elle a fait paraître le tout à compte d’auteur, avec l’aide de son conjoint Gilles Lévesque, qui a insufflé aux textes une touche de poésie. Ce livre, qu’elle tenait à ce qu’il soit accessible en terme de prix, c’est ce qui l’a introduit au Symposium du Kamouraska aime-t-elle rappeler, mais c’est aussi ce qui a fait le plus voyager son art, trouvant preneur auprès de nombreuses personnes provenant de partout au Québec, ou d’ailleurs dans le monde.

Mais aujourd’hui bien installée dans la salle de Saint-Germain, dans le cadre du 26eSymposium, Hélène Desjardins prend pour la première fois ses distances avec Kamouraska. Un pas qu’elle a osé franchir, non pas parce qu’elle est en froid avec son village natal, mais tout simplement parce qu’elle avait le goût de changement et qu’elle aime bien sortir de sa zone de confort. Quant au Fleuve, qui l’a souvent inspiré, elle ne lui a pas tourné le dos non plus. Telle l’eau, Hélène Desjardins est simplement en mouvement. Et cette fois-ci, c’est dans un affluent du Saint-Laurent qu’elle s’est transportée, le temps d’une oeuvre et de braver ces nouveaux flots qui l’ont inspiré et qu’elle tente maintenant d’apprivoiser.