L’art de «surcycler»

Karine Verpillot dans sa cour. Photo : Christine Beaudoin

Karine Verpillot marie son art à son sens de la vie. Elle épluche les brocantes, écocentres et ventes de garage à la recherche de toiles ou d’autres objets qui ne sont plus utilisés, puis échantillonne des éléments de son environnement, tels que la terre ou le bois flottant. Ensuite, elle combine le tout pour créer de nouvelles œuvres, avec pour seul achat la peinture. Il s’agirait d’une pratique artistique qui s’inscrit dans le « surcyclage ».

Contrairement au recyclage, le surcyclage ne comprend « pas de transformation en tant que telle. Il n’y a pas de notion de temps ou de coût », explique l’artiste. La nuance serait dans le fait de redonner de la valeur à ces objets inutilisés, plutôt que de la leur enlever.

Art vibratoire

Les intentions jouent un rôle central dans les créations de Karine Verpillot. « Ça dépend des lunettes qu’on met », dit-elle, pour réussir à se rendre compte que « ce qui est vieux, ou ce qui semble ne plus avoir de valeur en a toujours ». La surcycleuse fait attention de prêter de « bonnes vibrations » à ses œuvres, en s’assurant d’y ajouter de la lumière, de la joie et de la brillance.

Autrement bénévole, naturopathe et professeure de méditation, la peintre a à cœur les enjeux de surconsommation. Elle raconte, entre autres, que les contraintes auxquelles elle faisait face lors de son baccalauréat en lettres, arts et philosophie l’ont poussée à sourcer son matériel d’art dans l’usagé. Pour cette raison, Karine Verpillot décrit sa pratique, ainsi que son mode de vie, comme étant entre la surconsommation et la nature. La Pascalienne d’adoption mentionne au passage que la plupart des meubles chez elle sont récupérés.

Processus

La surcycleuse entame ses œuvres en utilisant deux couleurs « de base », et travaille de manière intuitive. Elle laisse la toile s’imprégner de sa maison, et inversement. Il est important pour Karine Verpillot de laisser l’œuvre évoluer en son temps, et de prendre du recul. Sur une période pouvant aller jusqu’à quelques mois, le tableau se précise.

Entre temps, l’artiste mélange sa peinture à des matériaux comme la terre ou le charbon de bois pour y ajouter une texture et une profondeur. « Je ne veux pas que ce soit lisse, je veux que ce soit comme la vie. Je veux qu’il y ait des bosses », exprime-t-elle. Plus tard dans le processus, elle consulte sa collection d’objets trouvés dans la nature pour voir lequel se rajoutera à l’œuvre.

La toile prend tranquillement forme, jusqu’à ce que l’artiste se sente bien avec elle. À ce moment, elle y appose sa signature pour signaler la fin du processus.

Ses toiles peuvent ensuite être achetées, ou troquées. « Ça va dans mes valeurs, et ça a un sens pour moi. […] L’esprit de communauté, c’est important, ainsi que de promouvoir les gens autour de moi. Donc, si par exemple, je peux avoir du pain ou des produits locaux grâce à mes toiles, alors wow! je suis vraiment heureuse. » Elle souhaite que l’art soit accessible à tout le monde.

Pour Karine Verpillot, sa pratique artistique « sème des graines » et donne un sens à sa vie. « Parce que je fais ça depuis longtemps, parce que j’ai des enfants, parce que je vois comment est le monde et où on s’en va, et que je veux faire ma part de colibri. »