Le Musée québécois de l’agriculture et de l’alimentation (MQAA) reviendra-t-il à sa mission d’antan? Rien n’est moins sûr, mais le président, la directrice générale et d’autres gens interrogés s’entendent sur une chose : le musée, dans sa forme actuelle, est incohérent, et un important chantier s’impose pour clarifier la ligne directrice à adopter.
Son nom est pourtant sans équivoque : Musée québécois de l’agriculture et de l’alimentation (MQAA). Or, aux yeux des visiteurs et des gens de la région, le MQAA serait encore ancré dans sa mission ethnologique de jadis, lorsqu’il portait encore le nom de Musée François-Pilote.
« Les expositions temporaires sont orientées vers l’agriculture et l’alimentation, mais quand on monte aux étages supérieurs, c’est demeuré essentiellement le musée de l’abbé Leclerc », résume le président du MQAA, Philippe Dubé.
Fondé en 1974 par Paul-André-Leclerc, le Musée François-Pilote proposait, jusqu’au début des années 2010, une forme d’incursion dans la vie rurale québécoise d’autrefois, en particulier celle de la Côte-du-Sud.
L’orientation agriculture et alimentation, en lien avec le riche passé agricole de La Pocatière, a été donnée il y a une dizaine d’années à la suite d’une première planification stratégique. Le tout a été officialisé en février 2016 par le changement de nom de l’établissement.
Le président avait déjà évoqué la possibilité de revenir à une mission plus régionale pour le MQAA, qui serait orientée davantage vers le terroir et les savoir-faire propres à la Côte-du-Sud. Il jugeait alors le virage agriculture et alimentation amorcé il y a une décennie comme « incomplet ».
Les diverses consultations menées ces derniers mois tendent à lui donner raison. « On nous l’a dit noir sur blanc que nous ne sommes pas vraiment un musée d’agriculture et d’alimentation. Et notre ancienne vocation, il s’avère que les gens l’appréciaient », déclare Philippe Dubé.
Revoir les collections
Faire table rase des dix dernières années ne serait toutefois pas dans les plans, pas plus qu’un autre changement de nom, du moins pour le moment. L’objectif serait plutôt de trouver le fil conducteur entre le volet plus ethnologique et celui de l’agriculture et de l’alimentation qui s’est imposé progressivement ces dernières années, afin de redéfinir la mission du musée.
« Cette réflexion va aussi nous orienter par rapport à nos collections, ce dont on doit se départir ou qu’on devrait conserver », ajoute la directrice générale, Maryse Hénault-Tessier.
Le travail à faire à ce chapitre serait d’ailleurs colossal. Tout ne serait pas catalogué adéquatement, de sorte que la mise en valeur des artéfacts peut être compliquée, mais également leur consultation par des chercheurs externes. Une demande de financement a été placée récemment afin d’acquérir un logiciel récent de gestion des collections. Le tout se ferait en partenariat avec la Seigneurie des Aulnaies. Cette demande vient avec l’affichage d’un emploi pour un conservateur à temps plein, poste à combler incessamment.
« Mieux numériser nos collections va ultérieurement faciliter le virage numérique qu’on souhaite implanter de façon graduelle dans nos expositions », poursuit la directrice.
Des indicateurs positifs
L’ampleur des chantiers du MQAA s’accompagne néanmoins de bonnes nouvelles. Financièrement, le musée se porte bien. Un excédent d’exercice de 106 109 $ a été dévoilé en assemblée générale annuelle le 28 novembre dernier.
La fréquentation est aussi repartie à la hausse avec 2217 visiteurs en date de l’AGA, une hausse de 31 % par rapport à l’an dernier, après un plancher de 828 personnes atteint durant la première année de la pandémie.
L’emplacement peu visible du MQAA, situé dans l’ancien couvent des sœurs de la Sainte-Famille derrière le Collège de Sainte-Anne-de-la-Pocatière, est pointé du doigt depuis toujours pour expliquer la difficulté à accueillir davantage de visiteurs. L’approche de l’administration à cet égard est toutefois en train de changer.
S’il n’est pas exclu de déménager le musée dans le futur — le bail avec le Collège se termine en 2029 —, autant le président que la directrice générale en sont à se demander s’il n’est pas possible pour le MQAA d’essayer de tirer profit de son emplacement actuel, au lieu de le voir comme un irritant.
« Nous ne sommes plus si obsédés à quitter. Peut-être pouvons-nous profiter de notre déficience [visibilité] et en faire un atout? Voilà où on en est aujourd’hui », conclut Philippe Dubé.