LA POCATIÈRE — Matin ensoleillé, encore frais et venteux. Dans la voiture, je fredonne La Libertad, la chanson phare de l’album Indalo de Lola Dargenti avec qui j’ai rendez-vous à huit heures pour le petit-déjeuner. Une intuition presque visionnaire me souffle que cette rencontre sera fort agréable. J’ai adoré l’album. Ça aide. Avec un bon dix minutes d’avance, le stress d’être en retard disparait jusqu’à ce qu’un train de marchandises me force à m’arrêter. La Libertad se termine. Bon anniversaire m’entraîne dans une douce rêverie, suivie de Résolutions. La voix vient du ciel. Les textes et les mélodies charment l’oreille. Le train est passé et la file de voitures se remet en route.
Dans le hall de l’hôtel, Lola s’inquiète de son apparence quand elle sait que je vais prendre une photo. Et pourtant… Elle est belle comme dans les chansons de Cabrel. Elle est naturelle et, ce que je découvrirai dans les minutes suivantes, d’une extrême gentillesse. Sa voix est un mélange magnifique d’accents français et argentins.
Sur une banquette près de la fenêtre, l’entrevue prend rapidement la direction d’une conversation amicale. Lola sourit et son sens de l’humour désarme les courts instants où elle perd le fil de son histoire. J’anticipais une rencontre agréable. Elle est magique.
Indalo est le fruit très réussi d’un long et rigoureux travail, mais surtout de la détermination de Lola Dargenti qui aura eu raison des obstacles. Présente sur les réseaux sociaux, Lola communique régulièrement avec ses fans via sa page Facebook et son compte Tweeter. Elle a son site Internet (www.loladargenti.com) et a elle-même conçu son application pour téléphones et tablettes intelligents. La chanteuse éclate de rire tellement elle est surprise quand je lui révèle l’avoir déjà sur mon iPhone.
Ses débuts
Née à Paris d’une mère Argentine et d’un père compositeur de musique de film (Jacques Davidovici), pas étonnant que l’amour de la musique habite Lola depuis l’enfance. « J’ai commencé très jeune à faire l’École des enfants du spectacle. J’ai appris le chant, le théâtre, le piano, la danse, le dessin… » Rapidement, influencée par le travail de son papa, elle souhaite faire les chœurs sur les musiques de film. Mais celui-ci n’est pas très chaud à cette idée, voulant la protéger contre ce milieu. Il devra bien s’y résoudre. Dès 2005, Lola prête sa voix pour plusieurs bandes sonores de courts et de longs métrages. En 2007, elle intègre l’Académie internationale de Comédie Musicale qui lui permettra d’acquérir l’esprit d’équipe en plus de perfectionner le chant, la danse et le théâtre. Elle commence à écrire ses premières chansons et enregistre un premier album autoproduit sous la direction du réalisateur Serge Perathoner (Starmania — Notre-Dame-de-Paris). Ce premier album l’amènera à faire de la scène. Elle possède aussi un bac littéraire et a fait des études de langues étrangères appliquées en anglais et en espagnol. Lola travaille présentement à l’écriture d’un livre numérique où elle racontera tout le processus de création de son album.
Ses rencontres
Deux rencontres seront déterminantes pour Lola Dargenti. En 2011, Rick Allison, dont la brillante carrière l’a consacré « homme au 25 millions d’albums », est conquis par son talent d’écriture et d’interprétation en découvrant par hasard quelques-uns de ses enregistrements sur MySpace. Petite anecdote : « la première fois qu’il m’a laissé un message sur MySpace, j’ai cru à une usurpation d’identité », lance Lola Dargenti en riant. Le contactant quelques années plus tard sur Facebook, elle comprend que c’était bien lui qui lui avait écrit. Il lui propose de travailler ensemble. C’est d’ailleurs grâce à Rick que Lola viendra au Québec enregistrer Indalo avec des musiciens québécois. Elle vit maintenant entre Paris et Montréal.
L’autre rencontre qui sera importante pour Lola est celle avec Francis Cabrel alors qu’elle fait les rendez-vous d’Astaffort dans le sud de la France. Plus tard, Rick propose à Lola de faire un cadeau de la Saint-Valentin sur sa fan-page. Elle songe à reprendre l’interprétation de Je l’aime à mourir en espagnol qu’a popularisé Shakira. Rick lui propose plutôt de faire une autre chanson de Cabrel, Je t’aimais, je t’aime et je t’aimerai. Celle-ci n’existe pas en espagnol. « J’ai écrit le texte avec ma maman qui est née en Argentine », dit-elle. Lola enregistre la maquette avec Rick qui l’envoie à Francis Cabrel. « C’est magique, mais qui est-elle ? », répond-il, ignorant à ce moment que c’est Lola qui chante. « Les gens ont eu une autre surprise pour la Saint-Valentin. Je ne me souviens plus laquelle. C’est sans importance », poursuit Lola Dargenti. Cette création magistrale se retrouve sur l’album sous le titre Te amé, te amo y te amaré.
Indalo
Indalo, un album pop-romantique aux sonorités latines, propose 10 chansons en français et trois en espagnol. Même si l’amour en est le point cardinal, Lola Dargenti y aborde des thèmes originaux. Par exemple, Bon anniversaire est l’histoire d’une rupture amoureuse et d’un bonheur souhaité à l’autre, malgré tout. Reste est une chanson qui nous rappelle qu’il ne faut jamais abandonner. Sans savoir où ça mène nous parle des doutes que l’on peut avoir au moment de s’engager dans une nouvelle relation et le fait de donner une chance à l’inconnu qui nous effraie parfois.
Prenant entre ses doigts le pendentif qui pend à son cou, Lola se penche vers moi au-dessus de la table pour que je l’admire de plus près. Le bijou confectionné par sa mère à la suite d’un voyage en Espagne à 14 ans est un Indalo. — comme le titre de l’album. En Espagne, l’Indalo, qui représente une figure humaine avec les bras étendus et un arc-en-ciel sur ses mains, est vu comme un symbole de protection. « On le dessine sur la façade des maisons », raconte Lola. Sur l’album, il devient un chant universel de liberté, d’amour, d’espoir et de paix. La Libertad est un hymne à la liberté d’être soi-même, authentique et unique dans sa différence. Cette chanson a été choisie par le réseau TVA à titre de chanson thème pour l’autopromotion printemps-été. Lola Dargenti a aussi repris Un soir de pluie popularisé par le groupe Blues Trottoir et dont son père a composé la musique. Une façon de lui rendre hommage.
À la croisé des destins
Lola Dargenti croit aux hasards de la vie, ceux qui changent une existence. Elle est reconnaissante envers la vie. « La vie ne fait toujours que des cadeaux, mais lorsqu’elle en fait, il faut être reconnaissant », dit-elle. Lola croit surtout que chacun doit faire sa chance, la provoquer, comme elle l’a fait en s’inscrivant aux rencontres d’Astaffort. La vie elle est aussi faite de paradoxes. Une heure plus tôt, un train interminable avançant à la vitesse d’un pas de tortue me faisait craindre d’arriver en retard à mon rendez-vous avec Lola Dargenti. Et voilà que ce moment passé avec elle venait de filer à la vitesse d’un TGV.