SAINT-PASCAL — Margot Campbell ne l’avouera jamais. Elle s’en défendra, même. Mais on le déduit en la voyant en entrevue à la télévision, en regardant attentivement sa photo, ou encore, en entendant sa voix au téléphone. La fontaine de jouvence coule derrière son jardin et elle y a bu. La preuve? Elle a fait de cette jeunesse retrouvée le thème de son premier roman : L’habit de lumière.
Moins sollicitée par la scène et la télévision, la comédienne Margot Campbell a décidé de réaliser une ambition qu’elle caressait déjà adolescente : écrire. En 144 pages, elle nous invite à une réflexion sur la quête de la jeunesse. Et, elle le fait d’une plume habile et captivante : « Pourquoi, le jour de ses soixante-dix ans, une main étrangère était-elle venue reculer l’horloge du temps pour lui redonner sa jeunesse? » (p. 126)
Maude, une dame de 70 ans d’une grande beauté, se réveille un matin avec l’apparence de ses vingt ans. Le médicament qu’elle a pris pour soigner son arthrite en serait de toute évidence la cause. Dans un restaurant, elle se fait aborder par Xavier, son ancien amoureux, à qui elle se présentera plus tard comme la petite-fille de Maude. Un premier rebondissement – car il y en aura tout au long du roman – nous fait découvrir que quelque chose de louche se cache derrière ce soudain rajeunissement.
Le passage du temps
En filigrane de cette intrigue, le lecteur est amené à s’interroger sur le passage du temps auquel, c’est le cas de le dire, personne n’échappe. Dès les premiers mots de Margot Campbell, au téléphone, on constate que nous ne nous étions pas parlé depuis les tournages de Cormoran, à Kamouraska, il y a 20 ans. Si, dans le livre, Xavier revoit, après toutes ses années, une Maude identique à celle qu’il a connue, il en est de même de cette belle voix que portait jadis Mariette, la servante des Cormoran, que je retrouve. Les mêmes intonations. La même musique.
« Depuis que je suis peu sollicitée pour jouer, j’ai du temps à moi et des idées. Je me suis dit pourquoi je n’essaierais pas? », raconte Mme Campbell pour parler de ce désir d’écriture.
D’où lui est venue l’idée de ce roman? « Peut-être parce que je vieillis, et peut-être parce que je me dis, ah, ce serait bien de rester le corps jeune », répond l’auteure.
Une fantaisie
Même si des produits ou des crèmes antirides permettent de freiner le vieillissement, « L’habit de lumière » se situe davantage dans la science-fiction, dans la fantaisie. Margot Campbell reconnaît que si, comme dans son roman, une pilule de rajeunissement existait, les impacts sur la vie des gens seraient nombreux. La romancière a d’ailleurs accepté de retirer de son livre un premier chapitre où l’intrigue en l’an 2300 montrait les effets à long terme de ce remède.
Accepter
« Ce que j’ai cherché à dire, c’est que, même si c’est très dur, et surtout pour les femmes, de se voir vieillir, il faut l’accepter et mettre ses valeurs ailleurs que dans l’aspect physique », dit la romancière. Selon Margot Campbell, la pression est très forte pour les femmes pour rester jeune et belle.
« Quand une femme perd cela, elle a un moment de panique, elle se dit, je ne serai plus intéressante pour personne. Dans la société, c’est un peu le reflet qu’on nous donne aussi », constate Mme Campbell. Elle-même vient d’un métier, la télévision, où la place est mince pour les rôles de femmes plus âgées.
Même dans la société, le regard des gens est différent. « Dans une réception, si une femme de mon âge est à côté d’une belle jeune femme, dit-elle, ce n’est forcément pas la dame âgée qui va avoir l’attention.»
La peur?
Margot Campbell tente de nous faire croire qu’elle a 75 ans… Bon, admettons qu’elle dit vrai. Est-ce que vieillir lui fait peur? « Je sais bien que je ne fais pas mon âge, répond-elle avec un sourire dans la voix, mais le chiffre est là quand même et le bout de vie qu’il me reste rétrécit tous les jours. On y pense beaucoup plus quand on arrive à mon âge. »
Oubliée par les metteurs en scène, Mme Campbell a choisi d’écrire pour employer sa créativité. « Autrement, c’est là que la vieillesse nous poigne », dit-elle.
Margot Campbell est-elle revenue au Kamouraska depuis la fin de Cormoran? Oui. Au moins trois ou quatre fois. « On a des amis qui habitent à Saint-Denis », précise celle qui prévoit d’ailleurs se rendre en Gaspésie cet été. Elle pourra à nouveau saluer les habitants de Baie d’Esprit.