Place aux lecteurs: Bombardier : Le président du Fonds mondial du patrimoine ferroviaire s’exprime

(NDLR : M. Denis Allard est le président du Fonds mondial du patrimoine ferroviaire. Il dresse le portrait du marché actuel du matériel de transport en commun en Amérique du Nord, dont la production à l’usine de Bombardier à La Pocatière dépend énormément.)

Au cours de l’année 2012, face à la situation économique qui touche durement nos voisins américains, les adversaires politiques de M. Barack Obama à la Chambre des Représentants, ont exigé la création de nouveaux emplois aux États-Unis dans le secteur manufacturier, dont le secteur du matériel roulant ferroviaire.

Dorénavant, et pour obtenir une aide financière du département américain des transports USDOT, le contenu et la main d’oeuvre américaine exigés pour la réalisation d’équipements de transports en commun ont été redressés à 100 %.

À elle seule, cette mesure protectionniste remet en cause les accords de libre-échange signés entre nos deux pays, dont le Buy American Act de 2009. Un accord pourtant récent. Mais, à partir du moment où la situation économique d’un pays tourne mal et que les opposants politiques s’en mêlent, nous avons la preuve ici, que ce sera une fois de plus chacun pour soi. Ainsi, peu importe ce qui a été convenu et signé avec les Américains, quand ça va mal, c’est chacun pour soi.

En gros, le carnet de commandes de l’usine de La Pocatière pour les cinq prochaines années, risque d’en souffrir un certain temps encore. Il pourrait fort bien être à son plus bas niveau, de toute l’histoire de l’usine pocatoise. Les perspectives d’emploi, au niveau du personnel qualifié et en nombre d’heures de travail, seront grandement affectées.

Devant le conflit de travail qui sévit présentement, je ne vous cacherai pas ma vive inquiétude. Ce conflit, s’il s’éternise, pourrait faire perdre à Bombardier des contrats, dont le contrat des voitures du métro de Montréal. Cela fait des années que les Montréalais attendent pour le renouvellement du parc de wagons du métro.

De plus, je désire vous faire remarquer qu’un gouvernement minoritaire exaspéré et sous la pression des partis d’opposition à l’Assemblée nationale pourrait refiler à une autre compagnie le soin de livrer la marchandise à meilleur coût.

Dans la réalité géopolitique actuelle du Québec, parce que le gouvernement de Mme Marois est minoritaire, nul ne peut prédire ce que les partis d’opposition pourraient exiger. La partisanerie politique n’a pas de frontière.

En conclusion, le débrayage des employés de l’usine de Bombardier à La Pocatière est une grave erreur de stratégie de la part des syndiqués de l’usine. Aussi légitimes que soient les revendications et la position des employés, le rapport des forces en présence ne favorise aucunement le règlement en faveur de la position syndicale.

Denis Allard, président
Fonds mondial du patrimoine ferroviaire