L’hiver est au complet
Même qu’il déborde sur le printemps qui doit reporter son rendez-vous avec la nature. À Pâques pourtant, par tradition et en toute logique, on croyait qu’il allait arriver incessamment. Mais tout est du domaine du possible et voilà que deux semaines plus tard, nenni, de nouveau c’est la neige qui tombe, comme un hiver tout neuf! Confondant le ciel et la terre dans un nuage cotonneux, un brouillard laiteux, qui hausse encore les falaises blanches qui bordent les routes, souligne d’un trait clair les branches des arbres encore nus et couvre les champs de silence. Pourtant, il avait dégelé, la glace des rivières s’était rompue… Ces cours d’eau ressemblent aujourd’hui à des ruines avec leurs bouts de glaces éparses qui ne sont plus d’hiver et pas encore du printemps.
Tout cela est peut-être naturel, il n’empêche que c’est un peu fou. La saison morte n’en fi nit plus de mourir. Bien sûr, quand même, on va vers juillet; mais c’est d’un ralenti à se désespérer de l’été.
Habituellement, quand tombe la neige, fi ne et virevoltante, on perçoit des enjouements dans les expressions, de la bonne humeur dans les regards. C’est notre enfance qui sourit. Depuis quelque temps, cependant, on ne trouve plus rien de poétique à la blancheur légère des flocons.
Cet hiver passera-t-il à l’histoire? Comme son contraire, celui de l878 où les cultivateurs de Saint-Rémy de Napierreville labourèrent leurs champs en janvier et qu’il ne commença à neiger que le 13 mars?
C’est à voir. Le temps n’est plus aussi prévisible qu’il le fut, les changements climatiques sont une constante improvisation. Et le présent sans le passé, c’est n’importe quoi : l’hiver sans balise que nous venons de vivre en est une éloquente démonstration.