2000 $ par mois pour avoir accès à ses traitements en hémodialyse

Francine Caron. Photo : Maxime Paradis

Si elle avait eu le choix, Francine Caron n’aurait jamais contacté les médias pour raconter son histoire. Après des mois à faire la route vers Montmagny, et parfois même Lévis, pour recevoir ses traitements d’hémodialyse, la sexagénaire de Saint-Pascal est à bout de ressources financières. Alors qu’elle doit jongler avec la possibilité de mettre un terme à ses traitements, au péril de sa vie, elle dénonce aujourd’hui un système de santé sclérosé qui l’affaiblit physiquement et financièrement.

Francine Caron souffre de la maladie de Berger, une maladie auto-immune qui atteint les reins. Non éligible à une greffe, elle a vu sa condition progresser au cours des dix dernières années vers l’insuffisance rénale, au point où depuis mai dernier, elle doit recevoir des traitements d’hémodialyse à raison de trois jours par semaine.

Suivie par un néphrologue à l’Hôtel-Dieu de Lévis, ses premiers traitements ont eu lieu là-bas, l’obligeant à avoir recours à un transport qui lui coûtait 500 $ par semaine, son conjoint toujours sur le marché du travail ne pouvant l’accompagner. Quelques semaines plus tard, elle était transférée à l’unité d’hémodialyse de Montmagny, ce qui la soumettait toujours à un service de transport qui s’élevait cette fois à 450 $ par semaine.

« Il n’y avait pas de place à Rivière-du-Loup, et Rimouski est beaucoup moins accessible de Saint-Pascal. La logique était que je poursuive en Chaudière-Appalaches, où je suis déjà suivi par les spécialistes de là-bas », explique la dame.

Après cinq mois de traitements et quelques hospitalisations provoquées par des infections à ses cathéters, Francine Caron se retrouve à avoir déboursé 9000 $ en frais de transport seulement, sans parler de divers médicaments particulièrement dispendieux qu’elle doit aussi assumer. À bout de ressources financières, c’est maintenant son conjoint qui lui avance les 2000 $ nécessaires à ses transports mensuels, ce qui désole la dame qui se perçoit aujourd’hui comme un fardeau financier de plus pour le couple. « Mon mari ne peut se permettre d’arrêter de travailler », enchaîne-t-elle.

Solutions

Diverses solutions s’offrent pourtant à Francine Caron dans sa situation, et ce n’est pas faute de les avoir essayées. Dans tous les cas, c’est le « système » qui plus souvent qu’autrement l’empêche d’améliorer son sort.

Elle se qualifierait entre autres au programme Transport-Hébergement pour les soins médicaux ou de réadaptation des personnes résidant au Bas-Saint-Laurent. Ce programme permettrait de payer une partie des frais encourus par ses transports vers les hôpitaux de Chaudière-Appalaches, et serait même rétroactif, selon les informations qui lui auraient été fournies. Or, les démarches qu’elle aurait entamées à cet effet en collaboration avec une intervenante sociale du CLSC local n’auraient pas abouti, faute de suivi de la part de celle-ci. Depuis, c’est une intervenante sociale à l’hôpital de Montmagny qui a pris le relais, « par pure charité chrétienne », s’exclame Francine Caron, reconnaissante de cet accompagnement alors qu’elle habite pourtant au Bas-Saint-Laurent. Mais là encore, plusieurs embûches se poseraient dans le traitement de son dossier, au point où elle ne serait pas à la veille de recevoir son premier chèque.

Il y a aussi l’hémodialyse à domicile, que Francine Caron a déjà demandée, mais dont elle attend toujours l’opération lors de laquelle lui sera installé le cathéter qui lui permettra d’y avoir recours. Sans cesse repoussée, cette opération serait maintenant prévue que pour décembre ou janvier. Comme un certain temps de guérison sera nécessaire à la suite de l’opération avant qu’elle puisse enchaîner avec ses traitements à domicile, elle estime qu’elle en a encore pour quelques mois à devoir voyager à Lévis ou Montmagny pour avoir accès à l’hémodialyse.

Impossible jusqu’à tout récemment, Francine Caron pourrait maintenant avoir accès au service d’hémodialyse du Centre hospitalier régional du Grand-Portage à Rivière-du-Loup. Désormais en activité six jours par semaine, 14 places supplémentaires y sont disponibles. De l’avis de Gilles Turmel, conseiller aux relations médias au CISSS du Bas-Saint-Laurent, Mme Caron ne devrait pas tarder avant d’aviser son personnel soignant à Montmagny, afin de demander son transfert à Rivière-du-Loup, « il y a de la place dès maintenant », a-t-il répondu par courriel.

Francine Caron fondait aussi beaucoup d’espoir auprès du nouveau député de Côte-du-Sud, Mathieu Rivest, qui l’a visité personnellement la veille de son élection, et qui avait promis « s’occuper de son dossier s’il était élu », a-t-elle rapporté. Près d’un mois après son entrée en poste, elle attend toujours de ses nouvelles et avoue déplorer le manque de suivi qu’on lui a accordé. Le Placoteux a aussi interpellé un membre de l’équipe de M. Rivest à ce sujet, qui a confirmé être au fait du cas de Mme Caron et que certaines validations demeuraient à faire. Aucun retour ne nous a été fait depuis.

« Tout ce que je demande, c’est qu’on m’aide à payer mes covoiturages, ou qu’on me fasse l’opération pour que je puisse avoir accès à l’hémodialyse à la maison ; je ne demande pas la lune… Et si c’est impossible à courte échéance de m’opérer dans le public, qu’on me la fasse au privé ! Plus vite je vais sortir des mailles de leur “système”, plus vite je vais être heureuse et retrouver ne serait-ce qu’un semblant de vie normale. »