Sylvain Hudon : La vie après la politique

Sylvain Hudon sur son terrain. Photo : Maxime Paradis.

Sylvain Hudon n’est certainement pas de ceux qui garderont un goût amer de son passage en politique municipale. Après un mandat comme conseiller et trois à titre de maire, il aborde l’avenir avec sérénité, plein de projets personnels et encore un fort désir de s’impliquer socialement, mais différemment et à son rythme.

Sylvain Hudon revenait d’une balade en bordure du chemin de fer près de l’avenue de la Gare où il réside à La Pocatière. Il venait tout juste de récolter des graines d’asclépiades, cette plante vivace qui donne des fleurs en forme d’ombelles. « Je vais en planter sur mon terrain. C’est une plante qui attire les monarques. Mes petits-enfants vont adorer ça », dit-il.

Quand il parle de son « terrain », Sylvain Hudon fait référence à une zone inondable de 100 000 pieds carrés en bordure de la rivière Saint-Jean, au cœur de La Pocatière, et qu’il a acheté en deux parties au fil du temps, la première il y a déjà plus de 18 ans. « Quand j’ai acheté ça, c’était en quelque sorte pour permettre à la nature de reprendre ses droits. Avec le temps, c’est devenu mon plus bel exutoire. À la grandeur que j’ai, j’en ai suffisamment pour m’amuser jusqu’à la fin de mes jours. »

Il faut dire que l’endroit a effectivement l’allure d’un véritable terrain de jeu pour ce passionné de jardinage et d’horticulture. Depuis, il y a planté pas moins d’un millier d’arbres et aménagé sentiers et étangs où grenouilles et oiseaux rares en milieu urbain y trouvent aujourd’hui refuge.

Une virée quotidienne dans cette petite oasis bien camouflée près de chez lui et on comprend bien la sérénité d’esprit qui a toujours habité le maire sortant, mais qui lui a aussi valu le surnom de « maire des fleurs » auprès de ses principaux détracteurs. À cet égard, Sylvain Hudon ne s’en est jamais trop formalisé. L’embellissement de La Pocatière a été certes quelque chose qui a fleuri sous son règne à la mairie, mais il a toujours entendu beaucoup plus souvent des commentaires de citoyens satisfaits de cette orientation que de frustrations.

« Les gens qui marchent dans la ville, ça leur plaît, et les gens de l’extérieur qui venaient à La Pocatière avaient aussi toujours que de bons mots à dire sur nos aménagements. Le verdissement de la ville, j’en suis fier, c’est une belle carte de visite et j’espère que ça ne va pas s’arrêter », a-t-il déclaré, promettant néanmoins de ne pas jouer les « belles-mères » auprès du nouveau maire élu.

Les critiques

Durant tout son passage en politique municipale — il a été conseiller municipal de 2005 à 2009 et ensuite maire de 2009 à 2021 —, Sylvain Hudon semble avoir été relativement imperméable aux critiques. Pour cet archéologue de formation qui a passé sa vie dans le public, notamment comme libraire et agent de gare, la critique était le prix à payer de la proximité qu’il désirait maintenir avec les citoyens de sa ville.

« Les gens m’arrêtaient sur le trottoir pour me parler ou débarquaient à l’hôtel de ville pour venir me voir à mon bureau. Des gens jamais contents, il va toujours y en avoir, mais j’étais plutôt heureux de voir qu’on se sentait suffisamment à l’aise avec moi pour m’adresser les choses. On m’a rarement manqué de respect et durant toutes ces années, je ne crois pas m’être fâché plus de deux fois ! »

Cette nature posée lui a d’ailleurs souvent été reprochée dans les épineux dossiers du maintien des soins de santé à l’hôpital Notre-Dame-de-Fatima, l’avenir de l’usine Bombardier ou même plus récemment dans le débat sur la direction générale de l’ITAQ. Sylvain Hudon s’en défend bien malgré tout. Selon lui, nul besoin de hausser le ton pour se faire entendre, si la réceptivité n’est tout simplement pas au rendez-vous. Toutefois, il ne cache pas que le manque d’écoute des paliers supérieurs de gouvernement sur différents enjeux commençait à l’impatienter au plus haut point dans ses dernières années comme élu.

« Par moment, on a l’impression de toujours répéter la même chose. Et il semble aussi exister une certaine image de carte postale qui a la vie dure et qu’on associe beaucoup à notre région dans les bureaux des fonctionnaires gouvernementaux, comme s’il ne fallait pas se développer pour ne pas l’altérer. Ce n’est pas les projets qui manquent quand on est élu, mais on est souvent ralenti par toutes sortes de ministères », confie-t-il.

Esprit tranquille

L’image retenue de La Pocatière à l’échelle du Québec, qui ne se résumait souvent qu’à l’avenir incertain de l’usine Bombardier devenue Alstom, est une autre de ses déceptions. Chaque fois que les journalistes nationaux débarquaient, il essayait de ramener les projecteurs sur les industries présentes au sein du Parc de l’innovation et qui emploient des centaines de personnes, ou même les deux maisons d’enseignement collégial qui font l’envie de bien des communautés au Québec, mais rarement on s’en intéressait, déplore-t-il. Mais de là à en garder un goût amer ? C’est mal connaître Sylvain Hudon.

« Quand tu te lances en politique, il faut que tu sois en mesure d’accepter qu’il y ait certaines idées que tu vas réussir à faire avancer, mais d’autres non. Parfois, tu sèmes pour l’avenir, ceux qui te suivent en récoltent le fruit, à même titre que toi tu l’as peut-être fait par rapport aux projets poussés par tes prédécesseurs », philosophe-t-il.

Ainsi, on pourrait dire que Sylvain Hudon quitte la politique municipale avec le sentiment du devoir accompli, mais la formule a peut-être été un peu trop galvaudée avec le temps. Partir l’esprit tranquille est peut-être plus à l’image de l’homme qu’il a été. Et pour l’avenir, il serait surprenant qu’il s’ennuie. Homme de public, il continuera de s’impliquer, assure-t-il, à son rythme et dans ce qu’il choisira. Sauf que pour le moment vous le pardonnerez, mais la nature l’appelle.