« Où se cache le nouveau préfet kamouraskois ? », disent certains. Plus de 100 jours se sont déjà écoulés depuis l’élection de Sylvain Roy à la préfecture du Kamouraska et nombreux sont ceux qui soulèvent sa discrétion. Quatre mois jour pour jour après avoir été nommé vainqueur à la suite d’une élection au taux de participation anémique, le nouveau préfet parle des dernières semaines consacrées à l’apprentissage de sa nouvelle fonction, dans un contexte marqué par une recrudescence pandémique au tournant de la nouvelle année.
Sylvain Roy est attablé à la salle du conseil des maires de la MRC de Kamouraska, le cellulaire déposé d’un côté, son masque de l’autre. Entre les deux, le nouveau préfet avait disposé ses papiers, remplis d’annotations, un cérémonial qui rappelle l’entrevue qu’il avait accordée lors de sa campagne à la préfecture en octobre dernier.
Plus discret que son prédécesseur Yvon Soucy, qui en privé reconnaissait être de nature timide, Sylvain Roy se défend peu de cette visibilité jugée beaucoup moins grande. Il cite bien sûr la pandémie qui a repris de la vigueur avec le variant Omicron à la suite de son élection, ce qui peut expliquer en partie pourquoi il a été « moins présent » dans l’actualité et sur le terrain, sans insister davantage, sachant que la COVID a le dos large deux ans après son apparition. Il fait aussi du télétravail au moins deux ou trois jours par semaine et les dernières séances du conseil des maires étaient par Zoom, rappelle-t-il.
« Je vais être franc, je crois que je vais avoir besoin d’un bon tour de roue d’un an avant de dire que j’ai bien assimilé la fonction et les dossiers. C’est beaucoup de lecture. Je ne tiens pas à être sur toutes les tribunes non plus, je suis quelqu’un qui aime réfléchir avant de prendre les décisions, bien peser le pour et le contre. Mais quand je suis décidé, je reviens rarement en arrière », confie Sylvain Roy.
En ce sens, le nouveau préfet est certes quelqu’un de très assumé, malgré la nature plutôt calme qui l’habite en public. Moins flamboyant que son adversaire lors de la campagne électorale, il demeure fidèle à lui-même et à ce qu’il a dit qu’il prioriserait advenant son élection, encore là des éléments qui n’avaient pourtant rien de bien concret pour le commun des mortels, mais qui ne l’ont pas empêché d’être élu, comme la gouvernance ou même le renouvellement de la planification stratégique.
Sur ce dernier point, Sylvain Roy avoue être en réflexion. Plusieurs MRC au Québec n’ont pas de planification stratégique et il se rappelle que celles élaborées à l’échelle du Kamouraska au début des années 2000, alors qu’il était maire de Saint-Joseph-de-Kamouraska, visaient à pallier des manques évidents qui ont depuis été comblés. 20 ans plus tard, il constate donc que la concertation qui a découlé de ces planifications a bien fonctionné. Les différentes tables — agriculture et bioalimentaire, forêt, culture, tourisme, soutien à l’entreprise — issues de la dernière planification 2015-2020 ont toutes bien rempli leur mandat, trouvant une erre d’aller satisfaisant, sauf peut-être celle du développement social toujours en attente d’orientations plus claires en provenance de Québec, de l’avis du préfet.
« Serait-il plus sage d’envisager une planification organisationnelle, au lieu d’une nouvelle planification stratégique ? Ma réflexion est là à l’heure actuelle, même si rien à l’interne ne me démontre que le fonctionnement actuel de la MRC nécessite une forme quelconque de restructuration », poursuit-il.
Gouvernance
Misant beaucoup sur l’importance d’une saine gouvernance durant sa campagne électorale, Sylvain Roy mentionne que son entrée en poste comme préfet s’est bien déroulée. Mélangeant un bel éventail d’élus expérimentés et novices, la table du conseil des maires semble encore habitée d’une certaine unanimité comme à l’époque où Yvon Soucy la présidait. Peu d’enjeux ont nécessité d’aller en vote, selon le préfet.
L’arrivée de nouveaux élus a aussi permis un certain renouvellement sur les tables de concertation, ainsi que les différents comités ou organisations sur lesquels ils sont amenés à représenter la MRC de Kamouraska. Un travail a été effectué pour regrouper certains d’entre eux, reconnaît le préfet, afin d’alléger la tâche des maires dont plusieurs travaillent à temps plein en parallèle de leur fonction et qui doivent également représenter leurs municipalités de la même manière à l’échelle locale. Lui-même siège actuellement sur 33 comités, ce qui est beaucoup, dit-il, même s’ils ne se réunissent pas sur une base quotidienne.
« Ce que je réalise, c’est que les MRC sont réellement devenues ces gouvernements régionaux qu’on souhaitait qu’ils soient au début des années 2000. À défaut d’avoir des millions à redistribuer, on dispose quand même davantage de leviers financiers intéressants pour accompagner notre milieu et voir à son développement. »
Cette nouvelle réalité permet d’ailleurs aux MRC de mieux choisir leurs combats, selon Sylvain Roy. La semaine dernière, alors que le gouvernement du Québec annonçait le transfert en région de 2000 postes de fonctionnaires par attrition d’ici le 30 septembre 2022, la MRC de Kamouraska se voyait en quelque sorte « oubliée ». La Chambre de commerce de Kamouraska-L’Islet a même depuis réagi, réclamant sa part du gâteau pour la région, lors d’éventuelles annonces. Pragmatique, Sylvain Roy avoue qu’il ne déchirera pas sa chemise sur cet enjeu.
« Kamouraska est moins dévitalisée que bien d’autres MRC au Québec et la dévitalisation est le critère qui a guidé le gouvernement dans ses choix. Ça, ça veut dire qu’on gagne à d’autres niveaux et que notre tissu socioéconomique est plus résilient. Comme préfet, je préfère de loin représenter une MRC qui est moins dévitalisée que l’inverse », a-t-il déclaré, démontrant à nouveau son côté « assumé ».
Sylvain Roy préfère plutôt consacrer ses énergies à revendiquer une meilleure couverture cellulaire à l’échelle de la MRC, par exemple, point essentiel au développement des régions et à l’occupation optimale du territoire. Il fonde aussi beaucoup d’espoirs dans le développement éolien, dont le récent appel de projets lancé par Hydro-Québec pourrait voir le premier parc éolien se développer en sol kamouraskois si les promoteurs associés à l’Alliance de l’Est, dont fait partie le Kamouraska, venaient à remporter l’appel d’offres.
« Actuellement, le Kamouraska reçoit l’équivalent de 915 000 $ en redevances annuellement, simplement parce qu’on fait partie de l’Alliance de l’Est. Advenant qu’on développe un parc éolien dans l’arrière-pays, c’est entre 2,7 et 3,1 M$ qu’on pourrait recevoir cette fois, par année. C’est des sommes considérables, fixes, sur de longues périodes qui sont assurées au Kamouraska avec un projet comme celui-ci et qui ont le potentiel d’influer de manière significative le développement économique, social et culturel de notre MRC. Sachant tout le potentiel en matière de vent dont on dispose, l’éolien est clairement une opportunité qu’on ne peut laisser passer. »