Éditorial : Snober le Symposium, un art pratiqué au Kamouraska

Artiste au Symposium de peinture du Kamouraska. Photo : Archives Le Placoteux

Quinze minutes avec les maires du Kamouraska, c’est tout ce que demandait Yves Ayotte, président du Symposium du Kamouraska, comme sa prédécesseure Mireille Bérubé avait l’habitude d’avoir. Sa demande a été refusée, le conseil des maires de la MRC de Kamouraska est trop sollicité. Il est revenu à la charge depuis, et les élus doivent trancher prochainement en plénière.

Tout ce que souhaite Yves Ayotte avec cette audience, c’est un appui financier récurrent de la MRC de Kamouraska à son événement. Mais avant d’en arriver là, le président du Symposium doit réussir à se faire inviter. Après sa sortie publique, gageons qu’il le sera. Le Kamouraska est sensible, nos politiciens municipaux au premier chef. Une sortie comme celle-là reste rarement lettre morte.

N’empêche qu’un autre refus serait plutôt malvenu. Après presque 30 ans d’existence, le Symposium est l’événement estival à l’historique le plus long au Kamouraska, après l’Expo agricole de Saint-Pascal. Quand on voit aujourd’hui comment les événements disparaissent aussi vite qu’ils ont été créés, on ne peut être qu’admiratif. Un minimum de considération, lire ici 15 minutes d’écoute de la part des maires à une séance régulière est à la moindre des choses.

Finances

Où ce n’est pas gagné d’avance, c’est au financement récurrent souhaité pour que l’événement continue d’être un rendez-vous artistique, avec bourses et formations offertes aux artistes, plutôt qu’une semaine de vente de tableaux dans trois salles d’expositions. Si les municipalités kamouraskoises n’acceptent pas individuellement d’augmenter leur participation financière, il y a peu de choses que la MRC de Kamouraska puisse décréter de son propre chef, outre une commandite annuelle qui d’ordinaire tourne autour de 1000 $, et que le Symposium reçoit généralement d’office.

Car même si la MRC de Kamouraska est dotée d’une politique culturelle, le créneau financier qui l’accompagne est celui de la gestion des « enveloppes » par des fonctionnaires. Le Symposium pourrait, par exemple, aller chercher au plus 4000 $ lors d’un appel de projets innovants en culture. Vous avez bien lu, quatre mille misérables dollars, avec tout ce que ça comporte de réflexion au préalable par une armée de bénévoles déjà surchargés, de gestion durant le symposium, et de reddition de comptes post-événement.

Soit le ridicule ne tue pas dans nos MRC, soit nos bons fonctionnaires sont déconnectés des besoins réels de nos organisations culturelles en proposant des programmes aussi vides de sens et d’argent. On comprend le président du Symposium à ne pas vouloir se plier à ce type de masturbation intellectuelle pour fonctionnaire, devenu maintenant la norme pour encadrer chaque denier public dépensé. Mais comme il s’agit des règles du jeu, aussi imparfaites soient-elles, soit le Symposium du Kamouraska accepte de s’y plier, soit il passe son tour… Pour l’utilité véritable à la culture kamouraskoise, on repassera!

COFEC kamouraskoise

Si le Kamouraska souhaitait réellement aider ses événements culturels, comme le Symposium, tout en étant innovant, un qualificatif dont il aime bien se draper, il pourrait s’inspirer de la Corporation des fêtes et événements culturels de Saint-Jean-Port-Joli (COFEC). Depuis 2004, une ressource permanente et rémunérée vient en soutien aux comités organisateurs de la Fête d’hiver, de la Biennale de la sculpture, de la Fête des chants de marins, des Concerts d’été et des Violons d’automne. Recherche de commanditaires, demande de subventions, communications, paperasse, la COFEC est déléguée par ses membres pour agir en son nom sur ces fronts, et une convention entre les membres régit le financement que chacun reçoit pour son événement.

La formule a sûrement ses défauts — rien n’est parfait —, mais près de 20 ans après sa création, la confiance des membres ne fléchit pas, eux qui ont tout le loisir de travailler à la programmation de leur fête sans trop se préoccuper de tracasseries administratives. Et du côté de la Municipalité de Saint-Jean-Port-Joli, qui finance la COFEC à hauteur de 175 000 $ par année, ou encore des entreprises du milieu qui lui versent près de 120 000 $ annuellement, en argent ou en biens et services de toute sorte, fini la sursollicitation par différents comités, la COFEC étant désormais le point de ralliement.

Quand on regarde le succès et le rayonnement des fêtes et des événements culturels de Saint-Jean-Port-Joli, il est difficile de croire que le Kamouraska ne serait pas capable d’aspirer à pareille réussite avec un minimum de volonté, ne serait-ce qu’en copiant minimalement la formule. En plus, au lieu d’avoir une multitude d’intervenants qui s’y prennent à différents moments pour obtenir des audiences au conseil des maires de la MRC, un seul répondant les solliciterait et parlerait en leur nom : le président de la COFEC kamouraskoise! Un seul petit 15 minutes par année, il n’y a pas à dire, même nos bons maires en sortiraient gagnants!