La cuisante défaite de la Coalition avenir Québec au profit du Parti Québécois, lors de l’élection partielle dans Jean-Talon le 2 octobre dernier, a visiblement été une claque au visage pour le gouvernement Legault. Preuve à l’appui, depuis cette dégelée, les erreurs se multiplient du côté de la CAQ, et ce, au même moment où les Québécois sont aux prises avec une crise inflationniste sans précédent.
Il y a d’abord eu la volte-face de François Legault sur le troisième lien, le lendemain de la partielle, alors qu’il avait au préalable « tiré la plogue ». Le projet a pourtant été promis pendant trois élections, entre autres la dernière, alors qu’il a depuis été établi que l’état-major de la CAQ savait durant cette campagne qu’il ne se concrétiserait pas. À cela s’ajoute l’augmentation de 30 % des salaires des députés, pendant les négociations avec les employés du secteur public.
La Coalition avenir Québec aurait-elle perdu ses instincts politiques, voire même son sens commun?
Mais ce n’est pas tout : il fallait que le ministre des Finances, Eric Girard qui, avouons-le, possédait pratiquement une fiche parfaite depuis son élection, offre une subvention de 5 à 7 millions pour la visite des Kings de Los Angeles à Québec en 2024, et ce, pour de simples parties de pré-saison. De plus en plus de Québécois ont besoin de l’aide alimentaire afin de se nourrir convenablement, au point où les banques alimentaires du Québec crient famine. Elles réclamaient d’ailleurs une somme d’urgence de 18 M$, mais seulement 10 M$ leur ont été octroyés depuis.
Bref, subventionner des joueurs millionnaires et des propriétaires milliardaires dans pareilles circonstances n’apparaît pas l’idée du siècle. D’autant plus que ce type d’exercice dans la LNH s’est déjà fait dans le passé à prix nul pour la ville hôtesse. Sans parler du Canadien de Montréal qui était prêt à répondre à la commande gratuitement.
Le plus pathétique de cette saga est sûrement la batterie d’arguments énumérés par le ministre Girard pour justifier sa décision. Ce n’est pas compliqué, même lui n’avait pas l’air d’y croire, surtout lorsque le discours change en cours de route. Il fallait le voir regarder partout à la fois pour comprendre le ridicule de la situation. Par ailleurs, où sont les études concernant les possibles retombées économiques pour ce festin de roi défrayé par les contribuables?
Au début, l’événement était mis en place pour célébrer le hockey à Québec, avec des explications plus qu’alambiquées, pour ensuite favoriser les loisirs, pour finalement prouver aux hautes instances de la Ligue nationale de hockey que Québec mérite son retour parmi les grands.
En somme, la subvention de 5 à 7 M$ servira à payer les repas, l’hébergement et le déplacement des joueurs de hockey et du personnel des équipes, ainsi que les pertes de revenus des Bruins de Boston et des Panthers de la Floride, pour montrer, finalement, qu’on en vaut la peine.
Oui, oui, on pige dans l’argent des contribuables, pendant une crise inflationniste qui frappe l’entièreté des Québécois, pour payer les dépenses de ces millionnaires, ainsi que pour éponger les pertes de revenus de deux richissimes formations états-uniennes! Y a-t-il un pilote dans l’avion?
Ne pensez-vous pas que cette démonstration de léchage de derrière fera changer d’idée le grand manitou de la LNH, Gary Betteman? Non! Tant et aussi longtemps qu’il sera à la tête de la LNH, il n’y aura pas de retour des Nordiques. Et le « ministre des Nordiques » Eric Girard semble bien le savoir, lui qui calcule — devant les journalistes — que les chances du retour de l’équipe prodigue sont de… 10 %! Par ailleurs, est-ce qu’on souhaite véritablement partager le marché du Québec? N’oublions également pas qu’une franchise coûte au bas mot plus d’un milliard de dollars…
Dissension dans la famille
Parlons maintenant des députés de la CAQ, sur le terrain, dans leur propre circonscription. Il va sans dire qu’ils se font talonner par leurs citoyens à propos de cette dépense frivole qui ne passe nullement auprès de la population.
Ces députés commencent aussi à se questionner publiquement puisque, visiblement, ils ne sont pas écoutés au sein du caucus caquiste. Ils se rendent bien compte qu’actuellement, leur formation politique traverse une tempête, et que les chances d’y survivre s’évanouissent de jour en jour, bien qu’il reste trois ans à ce gouvernement majoritaire. Un parti qui implose s’est déjà vu ailleurs dans le monde.
Oui, la grogne se fait sentir, et avec raison si on se fie au sondage Pallas Data publié le mardi 21 novembre dernier. La Coalition avenir Québec de François Legault est passée deuxième, à 24 % des intentions de vote, six points de moins que le Parti Québécois qui, lui, en obtient 30 %. Depuis septembre dernier, la CAQ a perdu 10 points, et le PQ a fait un bond de 11 points. Le gouvernement est donc en situation très précaire, voire même en position de chute libre!
Cependant, où le bât blesse davantage, c’est dans la région métropolitaine de Québec. Les résultats y sont désastreux pour la CAQ, puisqu’elle est désormais quatrième avec 17 % des appuis, alors que le PQ domine avec 35 %. Le Parti conservateur prend la deuxième place avec 20 %, alors que Québec solidaire arrive troisième avec 18 %. On dit cependant, du côté du sondeur, que la taille de ce sous-échantillon régional est de 179 répondants seulement. On voit très bien en contrepartie qu’une tendance se dessine.
Imaginez, quatrième à Québec, alors que c’était naguère la région la plus favorable à la formation de François Legault. Il y a véritablement place à l’inquiétude…
Un parti incapable de se relancer
Les jeux ne sont pas encore faits pour la CAQ, et elle pourrait éventuellement rebondir. Elle doit actuellement resserrer ses troupes, et ensuite passer les fêtes sans qu’il lui arrive une autre tuile sur la tête. Le temps et l’actualité pourraient lui être bénéfiques. Par contre, force est de constater que la coalition de François Legault est la seule responsable de son présent sort.
Non seulement la CAQ s’est fait prendre à mentir à la population, mais elle multiplie les bourdes dans des circonstances où elle devrait performer.
Ce n’est sûrement pas en tentant de surfer sur la triste mort du chanteur des Cowboys fringants, Karl Tremblay — en lui promettant des funérailles nationales, car il semble y avoir presque unanimité sur le défunt, ou bien en chantant une de ses chansons d’une façon farfelue, comme l’a fait récemment Bernard Drainville —, que la CAQ va remonter dans les sondages. La seule façon d’y arriver, c’est de se mettre au travail pour le peuple, en fonction de lui uniquement, et de cesser de gouverner en s’orientant avec la saveur du moment.
Si tel n’est pas le cas, chaque député de cette formation sera ultérieurement devant un choix pour assurer sa survie politique.