Maxime Paradis : Portrait d’une intégration régionale réussie

Il allait de soi de tenir cette entrevue dans ce café que Maxime a considéré durant une décennie comme son deuxième bureau. Photo : Éliane Vincent

Depuis deux décennies, les auditeurs de CHOX et les lecteurs du Placoteux ont appris à connaître Maxime Paradis. À force de le voir sillonner les territoires du Kamouraska et de L’Islet, son personnage leur est devenu aussi familier que celui d’un collègue de travail ou d’un voisin de palier. Au moment de quitter l’espace public pour des tâches nouvelles, Maxime — puisque c’est ainsi que tout le monde l’appelle — a accepté de revoir avec Le Placoteux son parcours médiatique.

Maxime est un fils de la Capitale-Nationale, de Val-Bélair, plus précisément. Ses parents sont des gens curieux, informés, et la radio et les journaux font partie du quotidien de la maisonnée. À table, on parle d’actualités, de culture, un peu de politique. Les opinions sont bien campées et les discussions sont animées, mais toujours ouvertes. Le journaliste y voit la source de son intérêt pour les communications.

« Je viens d’une famille de communicateurs, même s’ils n’ont pas travaillé dans le domaine. Avec le recul, je crois que j’étais prédestiné! »

Dès le primaire, Maxime participe au journal scolaire avec sa sœur aînée, peut-être poussé par son intérêt pour la série Scoop qui fait alors fureur à la télé. Au secondaire, la musique entre dans sa vie, et le mixage le passionne.

« Chez nous, on parle fort et la musique s’écoute fort, sur un vrai bon système de son! » Son père, vendeur d’électronique chez Tanguay, lui procure un équipement complet. Les soirées de Maxime seront faites de consoles, de lecteurs cd et de gros haut-parleurs.

La suite logique

Avec de pareils loisirs, le chemin vers la radio était tout tracé. Il écoute les postes à la mode, et l’envie de s’asseoir derrière le micro grandit. Comme il est raisonnable, il se garde un second choix… l’histoire et la géographie, qui répondent à une autre de ses passions, celle des atlas, des drapeaux et des voyages.

Mais il est pressé de vivre, et il préfère faire une attestation d’études collégiales en animation radio et télévision au Collège radio télévision de Québec. Il y travaille sa voix et sa diction, apprend à rédiger dans tous les styles, il découvre le métier. « Ça m’a demandé beaucoup d’efforts, mais j’ai vraiment profité du fait que beaucoup des étudiants dans mon groupe étaient près de la trentaine, ça m’a aidé à prendre de la maturité », se souvient Maxime.

Après sa formation, le destin frappe à sa porte. Dans ce milieu extrêmement fermé, dès sa sortie de l’école, le jeune diplômé reçoit deux offres de radios régionales, pour des mandats à temps partiel. Ça l’intéresse, mais il a vent par une amie que la radio de La Pocatière est à la recherche d’un animateur. Il obtient une entrevue avec Gilles Gosselin, qui repère rapidement le potentiel de ce jeune homme dont le démo n’était pourtant pas à la hauteur.

À 18 ans, il se retrouve là où il voulait être, derrière le micro de CHOX-FM, coanimateur de l’émission du matin avec Jacques Dufour dont la réputation est déjà bien établie. Maxime se souvient : « Jacques a été tellement patient avec moi… je ne connaissais rien! » Petit à petit, avec l’aide de ses collègues et de son patron, il se familiarise avec la région, comprend l’importance de l’information locale. Gilles Gosselin lui apprend les arcanes de la région, Jacques Dufour et Michel Harvey lui apprennent la rigueur du métier de la radio. « Je les regardais travailler, et j’ai appris comment approcher les gens, comment créer une relation de confiance réciproque. Ça m’a défini comme animateur, et ça eu un impact phénoménal sur ma carrière, il faut que tu écrives ça! »

C’est durant ces années-là que le p’tit gars de Val-Bélair est devenu un Pocatois convaincu, amoureux de sa ville et de sa région. « Au début, j’étais persuadé que j’allais rapidement faire mon chemin vers les grands centres. Mais les racines ont poussé sous mes pieds très vite, et j’ai compris que La Pocatière serait chez moi pour un long moment. »

Aller sur le terrain

Après plus de dix ans de radio, Maxime ressent le besoin de s’éloigner de l’animation, et de pousser le journaliste en lui sur le terrain. Il veut trouver la nouvelle, plus seulement la commenter. Comme si sa fée marraine avait veillé au grain, Le Placoteux lui ouvre ses portes. Encore une fois, il se retrouve dans une équipe à sa mesure. « Quand on côtoie un homme comme Maurice Gagnon, s’exclame le journaliste, on apprend vraiment à écrire. J’ai constaté rapidement l’influence positive qu’il a eue sur mes textes! »

Maxime insiste sur la force des équipes qu’il a vues se succéder au Placoteux, le talent de Stéphanie Gendron pour la gestion d’équipe, les liens solides tissés avec les autres membres de la coopérative d’information. Il reconnaît aussi la grande liberté éditoriale que tous ses patrons lui ont toujours laissée. « On nous a laissés définir une ligne éditoriale propre au Placoteux, sans jamais briser la frontière entre le secteur des ventes et celui des nouvelles. »

Devenu rédacteur en chef, Maxime poursuit sur la lancée éditoriale amorcée par Stéphanie Gendron. La confiance sans faille du lectorat ne s’est jamais démentie, même quand le journaliste a soulevé des dossiers chauds. « On a réussi à développer une réputation de rigueur journalistique que nous avons, je pense, méritée. Le public s’en est bien rendu compte, et nous a suivis là-dedans. » Résultat, Le Placoteux maintient un lectorat enviable, et cette fidélité lui évite encore le sort funeste de beaucoup d’autres médias régionaux.

Changer d’air

Mais il vient un temps où le regard du public devient lourd à porter. Malgré les nombreux prix de journalisme qui confirment qu’il est à sa place, professionnellement, Maxime a besoin d’ombre. La pandémie a changé certaines dynamiques sociales, et il n’arrive pas à retrouver son élan. « Je pensais pourtant être sur mon X, faire encore un bon bout au Placoteux, mais après ces deux années-là, j’ai perdu le plaisir du métier, malgré l’appui indéfectible de la direction et de mes collègues. »

Il garde donc l’œil ouvert, au cas où la vie lui ferait un signe. Et bien sûr, la vie lui a fait un signe. Il a eu vent d’un poste ouvert à l’UPA du Bas-Saint-Laurent, à La Pocatière, et il a plongé. L’agriculture l’intéresse depuis longtemps, lui qui a rêvé il n’y a pas si longtemps de devenir gentleman-vigneron, et tâter des relations publiques, après avoir été de l’autre côté du communiqué, n’est pas pour lui déplaire. « Je change complètement de position. Je vais maintenant avoir à faire la promotion des orientations de mon organisation, et c’est excitant pour moi, juste assez mystérieux pour générer un bon stress ».

Les enjeux immenses du monde agricole le touchent déjà profondément, et il sait déjà qu’il mettra toute son énergie à communiquer cette réalité. « Je n’ai jamais pu rester indifférent aux préoccupations des gens. C’est ça qui va continuer à me driver, contribuer à améliorer le sort des agriculteurs. »

Maxime Paradis a fait de la radio et du journalisme écrit comme il a toujours voulu le faire, en cherchant à élever le niveau de l’information régionale. « Les médias contribuent à garder nos régions vivantes, et j’ai aimé faire rayonner mon coin de pays. J’en tire une certaine fierté, et je continuerai à garder le contact avec le vrai monde, en souhaitant que les journaux et la radio conservent encore longtemps le rôle important qu’elles jouent dans nos communautés, avec rigueur et honnêteté. »

Et surtout, Maxime est très heureux que ce nouveau défi, qu’il a trouvé à deux pas de chez lui, lui permette de changer de carrière sans quitter cette région qu’il aime tant. S’il ne fera plus de reportages aux quatre coins du Kamouraska et de L’Islet, il restera profondément attaché à ce territoire qu’il a choisi, et qu’il continuera à parcourir, pour le plaisir. Et même s’il a soif d’ombre et d’arrière-plan, parions qu’il sera heureux si vous le saluez quand vous le croiserez dans son café préféré.