Le docteur Pierre La Rochelle, médecin depuis plus de 20 ans à l’urgence de La Pocatière, a publié un avis dans une revue médicale citant une recherche qui l’amène à se questionner sur l’impact du retard dans l’injection d’un médicament qui peut sauver des vies, depuis qu’une directive amène les ambulanciers à transporter des blessés graves à l’hôpital le plus spécialisé dans un rayon de 60 minutes.
Depuis décembre, dans le Bas-Saint-Laurent, Chaudière-Appalaches et la Capitale-Nationale, les ambulanciers doivent suivre la consigne à l’effet qu’une personne en trauma doit être amenée à l’hôpital le plus spécialisé à 60 minutes de route, plutôt que 30 minutes auparavant.
À titre d’exemple, dans le Bas-Saint-Laurent, le transport d’une personne qui aurait été blessée gravement dans un accident dans la région du Kamouraska n’ira plus à l’hôpital de La Pocatière si Rivière-du-Loup est située à moins de 60 minutes des lieux de l’accident.
Cette décision a été prise pour éviter les transferts et pour être plus efficient. Les spécialistes ont conclu à partir de l’expérience au Québec depuis 14 ans qu’un blessé sévère avait plus de chance dans un centre de plus haut niveau (comme Rivière-du-Loup par rapport à La Pocatière). La limite a été fixée à 60 minutes.
«La tendance va vers les centres de plus haut niveau. La question est on la met où la ligne, on a passé beaucoup de temps à l’évaluer. La recommandation la meilleure a fait que ç’a été fixé à 60 minutes», de dire le médecin-conseil en traumatologie pour l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS) Julien Clément.
Médicaments contre les hémorragies
Le docteur La Rochelle soulève toutefois un point intéressant. Une étude sur un médicament, l’acide tranexamique, qui aide à limiter les hémorragies, démontre que si l’injection est faite dans la première heure après l’accident, le taux de mortalité suite à des saignements est réduit de 32 %. Il est de 21 % s’il est donné entre une heure et trois heures après.
«Quand on retarde consciemment l’injection, on accroît le risque de mortalité», résume le docteur La Rochelle. Celui-ci souhaite, à partir de cette étude de 2010 faite dans plusieurs pays, ouvrir le débat auprès de ses collègues médecins. Actuellement au Québec, les ambulanciers ne peuvent pas donner ce médicament qui doit être donné par intraveineuse.
Quant à l’article cité par le docteur La Rochelle, le médecin-conseil Julien Clément se questionne sur le fait qu’il soit basé sur certains patients d’hôpitaux de pays où ils n’ont pas accès à tous les moyens pour contrer les hémorragies que l’on a au Québec. Il ne remet toutefois pas en question l’efficacité du médicament.