Appelées savanes dès le Régime français, les tourbières ont marqué l’histoire environnementale de la plaine du Kamouraska. Mal perçues par la population en raison du sol instable et de l’absence de bois debout, les tourbières ont généralement été contournées par les agriculteurs.
Yves Hébert
À la différence de la savane africaine, le sol de la savane québécoise est gorgé d’eau. Dans la région de Kamouraska, on utilise souvent le mot grande plaine pour désigner les tourbières se situant entre Rivière-Ouelle et Saint-Philippe-de-Néri.
À la fin du XIXe siècle, certains agriculteurs de Rivière-Ouelle font des tentatives pour convertir les tourbières en terres cultivables, mais avec grandes difficultés. La Compagnie de colonisation de Rivière-Ouelle est même créée en 1882 pour drainer, assécher et mettre en culture une vaste propriété de Rivière-Ouelle appartenant au sénateur natif de Rivière-Ouelle, Charles-Pantaléon Pelletier (1837-1911). Le projet inclut l’extraction et la vente de la tourbe, mais il avorte et la propriété passe aux mains de M.A. Guy avant d’être acquise par F.X. Lambert.
L’extraction de la tourbe devient une activité économique rentable à la fin des années 1920. La création en 1928 des Tourbières Lambert marque le coup d’envoi de cette industrie. Les équipements pour creuser le sol de l’ancienne propriété du sénateur Pelletier seront même bénis par le curé de Saint-Louis de Kamouraska en 1929. L’industrie de la tourbe connaît alors une belle croissance. Elle sera exploitée à l’île Verte en 1935 et à Saint-Charles de Bellechasse dans les années 1940. Durant la Seconde Guerre mondiale, le marché de la tourbe au Québec connaît une belle expansion. La fermeture du marché européen de la tourbe oblige les Américains à s’approvisionner au Canada. Avec les années cependant, la tourbe de sphaigne sera de plus en plus vendue à des fins horticoles.