Éditorial : La lucidité de Robert Bérubé

Rares sont les maires, comme celui de Saint-Pacôme, à avoir tenu un discours qui se rapproche le plus d’un plaidoyer en faveur d’éventuelles fusions municipales. Même s’il a tenu à préciser qu’il s’agissait là de son point de vue personnel, Robert Bérubé, qui se qualifiait de « maire économique » lors de notre entretien, s’est prononcé avec beaucoup de lucidité sur un enjeu dont il faudra bien débattre un jour dans la région, mais que pour le moment, on repousse toujours à plus tard.

Cette lucidité, elle n’est sûrement pas étrangère au passé de gestionnaire d’entreprises privées et d’institutions publiques de Robert Bérubé. Mais il serait aussi surprenant qu’elle ne soit pas attribuable aux situations exceptionnelles que traverse sa Municipalité depuis quelques années et qui entraînent, parfois, des frais importants aux contribuables, qui eux, sont toujours de moins en moins nombreux pour les assumer.

Ne serait-ce qu’au chapitre des directeurs généraux, Saint-Pacôme procédera peut-être bientôt à l’embauche d’un septième directeur général en cinq ans. Une situation qui amène chaque fois son lot de questions sans réponse auprès des citoyens de la Municipalité, en plus de provoquer des frais à l’embauche ou même, à l’occasion, lorsqu’il est question de licencier.

Par exemple, qui ne se rappelle pas la saga Philippe Côté, sous le règne de l’ancienne mairesse Nathalie Lévesque? Coût de la facture : près de 100 000 $, incluant les frais d’avocats. M. Côté contestait la fin de son contrat décrété par l’ancien conseil. Le tout s’est réglé hors cour. Certes, il s’agit là d’un cas exceptionnel, mais qui fait la démonstration que le licenciement peut aussi entraîner des frais inattendus aux municipalités.

Les élus

Chez les élus, chaque démission conduit souvent à une élection partielle, donc des coûts supplémentaires pour les citoyens. Heureusement, depuis 2017, Saint-Pacôme peut se targuer d’avoir fait des économies de ce côté. Lors de la dernière élection municipale, aucun scrutin n’a été nécessaire, tous les candidats ayant été élus par acclamation. Il n’en sera pas toujours ainsi.

Depuis, deux conseillers ont démissionné. Si plus d’un candidat se présentent aux sièges #2 et #6 d’ici le 10 mai 16 h 30, il y aura élection le 9 juin prochain. Saint-Pacôme devra alors débourser. C’est le coût de la démocratie direz-vous? Bien sûr, mais une petite municipalité aussi endettée que Saint-Pacôme a-t-elle le loisir de se permettre des élections partielles à répétition, en plus d’une élection générale tous les quatre ans? Rappelez-vous que sa dette s’élève à 3,5 M$ contre 2,2 M$ en moyenne pour les municipalités de même taille.

Pas juste Saint-Pacôme

Vu de l’extérieur, le cas de Saint-Pacôme semble unique dans la région, mais pourtant, il ne l’est pas. La problématique d’embauches et de départs de directeurs généraux et monnaie courante dans plusieurs municipalités de Kamouraska—L’Islet, souvent pour les mêmes raisons soulevées par Robert Bérubé.

Comment offrir plus de soutien aux directeurs généraux des petites municipalités, alors que le nombre de contribuables à la baisse ne permet pas de procéder à l’embauche d’autres ressources en renfort? Des structures plus grosses, composées d’employés aux fonctions complémentaires ne seraient-elles pas la solution, en plus de permettre quelques économies au passage?

Sur le plan politique, outre le coût des élections, combien de temps la région continuera de se payer le luxe de 218 élus (31 maires, 186 conseillers, 1 préfet élu) sur deux MRC, pour seulement 40 000 personnes qui en assument les frais? Les municipalités de la région sont-elles réellement mieux représentées de la sorte? Ou la promiscuité des citoyens sur ces petits territoires n’encourage-t-elle pas les vieilles rancoeurs de village au détriment de l’intérêt collectif, au point où l’appareil politique municipal finit par être instrumentalisé au profit du règlement de ces conflits?

En osant réfléchir à mots couverts au sujet des fusions municipales, Robert Bérubé a assurément fait preuve de lucidité. Maintenant, reste à voir les élus qui oseront faire preuve de courage en passant à l’action.