Il y a de celles qui se laissent porter et qui semblent toujours aboutir au bon endroit au bon moment. Marie-Claude Deschênes est de celles-là. De son embauche comme enseignante au Cégep de La Pocatière à la direction générale de l’établissement, jamais elle n’a hésité à dire oui au changement, sans le moindre regret.
Lorsqu’elle a été embauchée au Cégep de La Pocatière, au début des années 90, Marie-Claude Deschênes avoue qu’elle était très « naïve ».
« J’étais en congé de maternité et quelqu’un que je connaissais m’a dit qu’il y avait des postes d’ouverts. J’ai postulé, pensant que c’était pour un poste en administration. Je me suis finalement retrouvée en enseignement », raconte-t-elle.
Et là aurait pu s’arrêter son parcours professionnel. Parce qu’elle l’avoue d’emblée, autant elle n’avait pas prévu enseigner, autant elle se serait très bien vue continuer tellement elle aimait ça. « Je n’aurais jamais pensé que ça pouvait être ma voie », confie-t-elle.
Mais cela ne l’a pas empêchée pour autant de saisir l’opportunité de la direction des études du Cégep, après 18 ans passés à enseigner. « Je m’étais dit : pourquoi pas! » L’année d’après, elle remplaçait par intérim à la direction générale de l’établissement pour une première fois. Elle assume désormais cette fonction de façon permanente depuis 2015.
Bref, il a fallu environ 25 ans à Marie-Claude Deschênes pour qu’elle obtienne de façon définitive ce poste en administration sur lequel elle croyait avoir postulé à l’époque. Un long détour, mais que la bachelière en administration des affaires de l’Université Laval ne regrette pas une minute.
« L’administration ne m’a jamais quitté pour autant, car je l’ai enseigné durant 18 ans en cheminement régulier et à la formation continue », rappelle-t-elle.
Vivre le changement
En parallèle à son cheminement professionnel, Marie-Claude Deschênes a assisté – peut-être même contribué – à ces changements qui s’opéraient sur le marché du travail pour les femmes. Des postes jadis presque toujours pourvus par des hommes ont commencé à être occupés de plus en plus par la gent féminine, ce qui n’était pas le cas à ses débuts.
Elle cite en exemple ses années où elle étudiait en administration des affaires, un domaine qui était réputé à l’époque pour avoir plus « de cravates que de jupes »; ses premières années à la direction des études en 2008, où elle était à l’époque la seule femme au sein de l’équipe de direction du Cégep; ou même son premier conseil d’administration, lorsqu’elle remplaçait à la direction générale en 2009, qui était composé presque exclusivement d’hommes. Partout autour d’elle, et surtout depuis les dix dernières années, elle dit constater la parité de plus en plus dans les postes de direction dans le réseau des cégeps. Une force complémentaire, selon elle.
« De toute manière, ça ne m’a jamais impressionné d’être entouré d’hommes, car je n’ai jamais senti que je n’étais pas à ma place parce que j’étais une femme. Peut-être suis-je arrivée dans les bonnes années ? J’ose croire que c’est plutôt parce qu’on fait confiance à mon jugement et mon leadership », poursuit-elle.
Une chose est sûre, si Marie-Claude Deschênes avoue ne s’être jamais préoccupée du débat féministe, elle dit aujourd’hui mieux saisir toute la portée que sa fonction de directrice générale peut envoyer. C’est pourquoi elle se fait un devoir de demeurer accessible, car elle comprend que son parcours peut inspirer d’autres femmes.
Mère de deux enfants, elle espère aussi être un modèle pour ses deux filles aujourd’hui dans la vingtaine, même si elle se questionne à savoir si cela peut être intimidant pour elles d’avoir une mère qui prend « autant de place ». « Ont-elles souffert par la bande de ça? Doivent-elles vivre avec l’effet de la comparaison? Moi j’ai toujours voulu les tirer par le haut, les encourager à développer leur autonomie pour qu’elles puissent se réaliser par elles-mêmes et qu’elles tracent leur propre chemin. J’ose espérer que mes accomplissements les stimulent », conclut-elle.