Madeleine Bélanger de Sainte-Anne-de-la-Pocatière et Thérèse Bélanger de Lévis ont toujours été tricotées serrées. Âgées respectivement de 84 et 75 ans et seules toutes les deux, elles cohabitent ensemble plusieurs semaines par année par plaisir et pour se désennuyer. La crise de la COVID-19 qui a éclaté il y a près d’un mois vient de recréer cette occasion, mais de façon plutôt inattendue.
Thérèse Bélanger avait déjà passé une partie de l’hiver chez sa sœur Madeleine avant de regagner sa demeure à Lévis, en février dernier. Quand elle est revenue de nouveau passer un peu de temps chez elle en mars, avant le début de la pandémie, c’était initialement pour une semaine. La COVID-19 en a finalement décidé autrement.
« C’est sûr que je n’avais pas prévu rester plus longtemps, donc je n’avais pas apporté beaucoup de choses avec moi », reconnaît Thérèse Bélanger.
Car plutôt que de retourner chez elle à Lévis, elle a plutôt choisi de prolonger son séjour le temps « que les choses se calment en ville ». Au Bas-Saint-Laurent, elle avoue se sentir plus en sécurité, d’autant plus que la région est fermée aux non-résidents qui tentent d’y entrer et que peu de cas de la COVID-19 y ont été recensés.
« À Lévis, il y a plus de résidences pour personnes âgées, donc c’est plus insécurisant un peu », ajoute-t-elle.
Et même si son fils y demeure, elle trouve moins embarrassant d’être chez sœur à Sainte-Anne-de-la-Pocatière que de devoir lui demander au quotidien de lui porter assistance pour ses commissions, par exemple. Sa sœur Madeleine, de son côté, estime également que les multiples services de livraison qui ont été mis en place dans la région pour les aînés sont également plus accessibles qu’en ville, leur permettant ainsi de vivre aisément leur confinement à domicile comme il se doit.
« On est vraiment traité comme de la royauté », s’exclame-t-elle.
Chanceuses
Il n’y a pas à dire, les deux sœurs se considèrent très chanceuses de pouvoir compter l’une sur l’autre dans les circonstances, elles qui en profitent pour marcher quand la température le permet, sur une route 132 pratiquement déserte. Plusieurs amies de leurs âges n’ont pas cette chance, selon elles.
« On a des amies qui sont seules et qui n’ont même pas d’ordinateur ni de tablettes numériques. C’est difficile pour elles de garder un contact visuel avec leurs proches dans les circonstances », souligne Madeleine Bélanger.
Depuis le début de la crise, elles avouent téléphoner à plusieurs d’entre elles sur une base régulière afin de maintenir un lien. « Le téléphone sonne tellement souvent que des fois on n’a même pas le temps de se parler », poursuit Thérèse Bélanger, à la blague.
Qui plus est, les deux sœurs participent chaque semaine à deux rendez-vous familiaux par Zoom, un système de vidéoconférence qui leur permet de garder contact avec les membres de leur famille répartis un peu partout au Canada et aux États-Unis. Leurs frères et sœurs ayant des descendants unilingues anglophones, un rendez-vous francophone est organisé le vendredi, suivi d’une conférence anglophone le samedi. Ils étaient d’ailleurs près d’une quarantaine à s’être rassemblés de la sorte pour célébrer Pâques virtuellement le 12 avril.
Autrement, Madeleine Bélanger mentionne se sentir privilégiée d’avoir toujours l’autonomie lui permettant de demeurer seule chez elle, dans l’immédiat. Quand elle voit comment certaines résidences pour aînés ou CHSLD sont actuellement des lieux d’éclosions importants de la COVID-19, elle avoue se sentir en sécurité dans sa maison, elle qui prévoit tout de même s’installer dans une maison pour retraités au sortir de la pandémie.
« C’est sûr que si j’habitais déjà dans une résidence, mon premier réflexe devant une pandémie comme celle-là aurait été de me réfugier chez ma sœur Thérèse. Heureusement, ni l’une ni l’autre ne somme dans cette situation, ce qui nous permet de vivre cette période particulière de façon très sereine et enrichissante », conclut-elle.
Précision : L’entrevue pour cet article a été réalisée par Messenger et la photo qui l’accompagne a été prise à une distance de plus de cinq mètres des sujets à l’extérieur du domicile de Mme Bélanger, dans le pur respect des règles de distanciation sociale édictées par la direction de la santé publique.