L’empreinte carbone du télétravail

Photo : Glenn Carstens-Peters (Unsplash.com).

Vous regardez votre voiture moisir dans l’entrée de votre cour depuis le début de la COVID-19 et vous ne vous souvenez plus la dernière fois où vous en avez fait le plein parce que vous êtes en mode télétravail à la maison? Tant mieux pour votre porte-monnaie, mais pour la planète, il semblerait que ce qui à première vue semble écologique ne le soit pas totalement.

François Lapointe, chargé de communications et de sensibilisation chez Co-éco, avoue qu’il était de ceux qui ne croyait pas que le télétravail puisse avoir un impact aussi grand en matière d’émissions de gaz à effet de serre (GES) avant de faire une recherche sur le sujet avec ses collègues de l’organisme. « En fait, ce n’est pas tant le télétravail que toute notre consommation numérique qui a une incidence », poursuit-il.

Courriels trop volumineux qui dorment longtemps dans nos boîtes de réception avant d’être supprimés, visionnements abusifs de vidéo en ligne (streaming), ces deux principales pratiques sont responsables pour environ 4 % des émissions de gaz à effet de serre sur la planète à l’heure actuelle. Ces données sont celles communiquées par l’équipe de Co-éco à l’intérieur d’une capsule vidéo, disponible paradoxalement… sur sa page Facebook!

Ainsi, une année typique de production et de consommation de courriels pour un utilisateur moyen en occident représenterait l’équivalent d’un trajet en voiture de 320 km, environ la distance qui sépare La Pocatière et Saint-Hyacinthe. Le visionnement de vidéos en ligne, quant à lui, génèrerait à lui seul 60 % des flux de données mondiaux, soit près de 300 millions de tonnes de CO2.

Pourquoi?

Alors que se tourner vers des outils numériques a été valorisé ces dernières années, entre autres pour des raisons écologiques, ne serait-ce que pour diminuer notre consommation de papier ou le stockage physique de matériel difficilement réutilisable comme des DVD ou des cd de données, il paraît aujourd’hui difficile de croire que nos comportements en ligne soient finalement moins « verts » qu’on ne pourrait le croire.

En fait, tout est une question de « stockage ». Même si tous ces courriels ou ces vidéos sont consommés directement sur nos ordinateurs ou nos téléphones intelligents, ils sont inévitablement stockés quelque part dans de gigantesques centres de données. Ces milliers de serveurs entassés les uns sur les autres consomment énormément d’énergie et doivent être constamment maintenus dans un environnement frais afin d’éviter qu’ils surchauffent. Le hic, c’est qu’ils sont alimentés, dans certains cas, par de l’électricité produite de façon extrêmement polluante comme des centrales au charbon, notamment aux États-Unis et au Royaume-Uni.

« L’activité de ces centres de données représentait l’équivalent de 1,3 % des émissions de GES en 2018 et il est prévu qu’en raison de la demande croissante qu’on observe depuis quelques années, l’industrie numérique pourrait en venir à générer autant de gaz à effet de serre que nos voitures en 2025-2026, soit environ 28 %. Et cette donnée ne prend pas en considération l’augmentation du télétravail à laquelle nous assistons actuellement », indique François Lapointe.

Solutions

Parmi les solutions évoquées, l’aménagement de centres de données de ce type au Canada, où dans d’autres pays où l’électricité est produite proprement et à moindre coût, est souvent évoqué. Le Québec en recenserait déjà une quarantaine selon François Lapointe.

Individuellement, dans un contexte où le télétravail semble être une tendance lourde qui se poursuivra même après la COVID-19, Co-éco suggère quelques pratiques à adopter comme :  cesser le visionnement de séries en streaming qui ne nous plaisent pas; diminuer la résolution de l’image en passant en basse résolution; adopter davantage la baladodiffusion plutôt que les influenceurs sur YouTube; limiter le nombre de destinataires et les pièces-jointes volumineuses dans nos courriels, faire régulièrement le ménage de nos boîtes de réception et se désabonner d’infolettres que nous ne consultons plus.

En mode télétravail, il serait sage de ne pas mettre au rancart trop rapidement le téléphone et de l’utiliser en priorité lorsque la situation ne nécessite pas l’usage d’outils de visioconférence comme Zoom ou Messenger. Autant de petits gestes additionnés qui peuvent faire la différence, selon le chargé de communications et de sensibilisation de Co-éco.

« Contrairement à la voiture, il est facile de contrôler certains paramètres de notre consommation numérique au quotidien. Agir maintenant par le biais de ces quelques petits gestes pourrait faire jusqu’à 60 % de différence en archivage et en bande passante. Ce n’est pas rien », rappelle-t-il.

Consultez la capsule vidéo de Co-éco sur le sujet : https://www.facebook.com/coecobsl/videos/226396765362482/.