Le recrutement de paramédics cause de plus en plus de maux de tête à Tommy Chouinard, propriétaire d’Ambulance Chouinard à La Pocatière. Avec deux mobiles fonctionnant avec des horaires de faction et aucun quart de travail à l’heure, l’attractivité de son entreprise auprès de la nouvelle génération de paramédics n’a jamais été aussi faible.
« J’ai des candidats potentiels, mais s’il n’y a pas de conversion d’horaire, je vais les perdre, ils ont été clairs », a déclaré d’entrée de jeu Tommy Chouinard.
Les horaires de faction appartiennent à une autre époque, se plaît-il à rappeler. Lorsqu’il a terminé sa technique ambulancière au milieu des années 90, il était déjà question de les abolir, se souvient-il. Certaines entreprises ont depuis vu leurs horaires être convertis en quart de travail « à l’heure », mais à La Pocatière, le propriétaire d’Ambulance Chouinard attend toujours.
« Placer seulement un de mes deux mobiles “à l’heure” me permettrait de créer quatre postes à temps complet. Là, tu deviens attractif », s’exclame-t-il.
Être de garde 24 h par jour, sept jours sur sept, comme l’impose un horaire de faction, ne plaît pas à la nouvelle génération de paramédics de l’avis de Tommy Chouinard, car cet élément nuit entre autres à une bonne conciliation travail-famille. La contrainte du lieu de résidence qui oblige le paramédic à habiter à cinq minutes de la caserne ambulancière est un autre frein à l’embauche, poursuit-il.
« Qui va accepter de venir travailler en région en étant de garde 24 h par jour, sept jours sur sept, mais en étant payé 12 h, avec toutes ces contraintes ? Les jeunes n’ont qu’à attendre que des postes à l’heure se libèrent en ville et ils finissent par partir », indique Tommy Chouinard.
Sous les 28 h
Avec une utilisation moyenne de 26,20 h par semaine de ses véhicules en 2019-200, La Pocatière ne se qualifie toujours pas pour une conversion d’horaire, car le ministère de la Santé demande désormais une moyenne de 28 h par semaine pour procéder au changement. Tommy Chouinard estime que cela s’explique aisément.
« La Pocatière, c’est dense, et l’hôpital est dans notre cour. Le temps de transport est beaucoup moindre. Mais je réponds probablement à plus d’appels qu’une entreprise ambulancière qui défonce son 28 h en une semaine, simplement parce qu’elle a plus de kilomètres à parcourir pour se rendre au centre hospitalier. »
Le nombre d’heures d’utilisation des mobiles importe donc peu pour Tommy Chouinard. La rapidité d’intervention que procure un horaire à l’heure avec des paramédics qui demeurent dans leur véhicule ou à la caserne ambulancière en permanence devrait être la seule variable prise en considération par le Ministère, estime-t-il.
Cet argument rejoint depuis longtemps celui de Stéphane Lévesque, président de la Fraternité des travailleurs et travailleuses du préhospitalier du Québec secteur Saint-Jean-Port-Joli. L’entreprise pour laquelle il travaille, Paraxion, ainsi que ses collègues paramédics, plaident depuis aussi longtemps que ceux d’Ambulance Chouinard pour que soit converti à l’heure le dernier mobile fonctionnant avec un horaire de faction. Ce dernier a une utilisation moyenne de 27,69 h par semaine en 2019-2020.
À plus d’une reprise, Stéphane Lévesque a fait valoir l’argument du déploiement dynamique sur le territoire que procurerait un second mobile à l’heure dans L’Islet-Nord. Une approche concertée dans ce déploiement, avec les ressources ambulancières limitrophes, viendrait optimiser la couverture de la Côte-du-Sud au bénéfice de tous.
« On parle de la pandémie comme d’une situation d’urgence pour justifier qu’on n’agit pas pour les horaires de faction. Chaque fois qu’une personne fait le 9-1-1 dans la région, c’est parce qu’elle est en situation d’urgence. Il ne faudrait peut-être pas l’oublier », conclut Stéphane Lévesque.