De gros défis attendent l’ITAQ dans la revitalisation de la Ferme-école Lapokita

La vacherie de la Ferme-école Lapokita. Photo : Maxime Paradis

Les défis techniques, patrimoniaux et organisationnels n’ont d’égal que les sommes qui seront investies. L’Institut de technologie agroalimentaire du Québec (ITAQ) s’apprête à investir l’équivalent de 70 M$ en infrastructures à son campus de La Pocatière. La Ferme-école Lapokita, qui absorbera une bonne partie de l’enveloppe, sera modernisée au maximum au terme de l’exercice, mais non pas sans heurts.

Si travaux il y a cet été à l’ITAQ de La Pocatière, ceux-ci toucheront les salles de bain du bloc D sur tous les étages du bâtiment principal. « C’est une phase un, on fonctionne par canalisation », explique Hugo Morin, directeur des ressources matérielles, des opérations et des technologies de l’information à l’Institut de technologie agroalimentaire du Québec.

Des 140 M$ issus du Plan québécois des infrastructures 2023-2033, l’ITAQ compte en investir environ la moitié à La Pocatière au cours des cinq prochaines années. Le gros du chantier de l’institution sera toutefois de l’autre côté de la route 230, à la Ferme-école Lapokita. La désuétude des installations ne date pas d’hier.

En 2019, l’Association générale des étudiants de l’ITA de La Pocatière (AGÉITAL), appuyée par leurs enseignants, émettait un mémoire qui en témoignait. Le document avait été envoyé au premier ministre François Legault et au ministre de l’Agriculture André Lamontagne. Depuis, l’OBNL qui fait la gestion de la ferme a ajouté sa voix à la mêlée, en dénonçant régulièrement son sous-financement.

L’ITAQ semble avoir compris les besoins, à écouter Hugo Morin. Le 1er mai, un appel d’offres qui concerne la réfection de l’enveloppe extérieure du pavillon B et de la vacherie a été lancé. Dès lors, un premier défi s’imposera : la partie au-dessus de la maçonnerie est composée de tuiles d’amiante qui devront être retirées. « On aimerait aussi voir ce chantier être réalisé au courant de l’été », poursuit le directeur des ressources matérielles, des opérations et des technologies de l’information à l’Institut de technologie agroalimentaire du Québec.

Nouvelles constructions

Or, si la coquille extérieure de la vacherie est refaite, l’ITAQ est consciente qu’elle n’aura d’autre choix que de sortir le troupeau laitier de ce bâtiment à court terme. Construit en 1915, le bâtiment ne sera bientôt plus conforme à la nouvelle réglementation en matière de bien-être animal, qui préconise des vaches en stabulation libre. En ce qui concerne les autres univers de production, la vacherie serait aussi « difficilement adaptable » aux nouvelles réalités d’aujourd’hui. « Notre intérêt est d’intégrer le plus possible les technologies à notre univers d’enseignement, pour avoir accès à des données qui serviront à l’enseignement et au partage avec d’autres acteurs de la communauté », ajoute Hugo Morin, qui assure qu’il y a des idées sur la table pour une nouvelle vocation.

La construction d’une nouvelle vacherie est donc inévitable, tout comme un nouveau centre équestre, dont le bâtiment actuel sera à terme démoli. L’objectif serait de créer un pavillon qui réunirait autant le centre équestre que l’écurie de la relève, la maréchalerie et l’écurie de reproduction. En lieu et place de l’écurie de relève, un bâtiment multiélevage, promis depuis plusieurs années, serait aménagé. « Dans sa condition actuelle, ce ne serait pas une bonne gestion des fonds publics que de rénover le centre équestre. »

Avant d’y parvenir, un deuxième défi s’imposera donc : un jeu de chaises musicales avec le déplacement du troupeau chevalin d’un bâtiment à l’autre. « On est encore à étudier l’ordre dans lequel tous ces projets devront être réalisés. Logiquement, il faudrait terminer par le bâtiment multiélevage », enchaîne Hugo Morin.

Patrimoine

Le troisième défi de l’ITAQ sera au chapitre de la meunerie et de la bergerie. Les deux bâtiments annexés ont été construits respectivement en 1935 et en 1915. En 2020, une levée de boucliers qui dépassait largement les frontières de la région avait permis de reconnaître la valeur patrimoniale des deux bâtiments, forçant le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec et la Société québécoise des infrastructures à reculer sur leur demande de démolition auprès de la Ville de La Pocatière.

De l’avis d’Hugo Morin, la portion meunerie serait suffisamment « saine » pour la réhabiliter en une forme de pavillon multiservice. La structure de la bergerie serait cependant trop détériorée pour envisager d’autres projets, à moins de rénovations majeures et coûteuses. La démolition serait une fois de plus inévitable. « Il risque d’y avoir de l’opposition. On va discuter avec le milieu pour arriver à une décision éclairée. Il va falloir trouver une solution qui réponde aux ambitions de l’ITAQ, sans négliger pour autant le patrimoine bâti. »

Autres projets

Tous ces projets de démolition et de reconstruction seraient vraisemblablement entamés au courant de 2024. Le premier en lice concernerait la gestion des affluents (fumiers). L’ambition de l’ITAQ est d’intégrer des équipements qui permettraient la séparation du liquide et du solide, afin de permettre une réintégration de cette matière solide en litière sous les vaches. « Ça ferait une circularité avec très peu d’extrants de matières à étendre. Ça serait intéressant pour des démonstrations pédagogiques et les fermes du milieu. »

Ramener tous les univers de production sur le site de la Ferme-école Lapokita demeure toujours dans les cartons, comme mentionné par la directrice générale Aisha Issa l’automne dernier. À court terme, Hugo Morin a confirmé que l’ITAQ ira plutôt en partenariat avec des fermes à proximité en ce qui concerne le porc et l’ovin.