Lorsque Denis Lagacé a fermé son ordinateur, à sa dernière journée en tant que directeur général de la Ville de Rivière-du-Loup le vendredi 29 novembre, il a pleuré une famille qu’il a vue évoluer durant 26 ans. Le lundi suivant, il troquait la chemise/cravate pour le t-shirt/kangourou aux couleurs du Camp musical Saint-Alexandre, dont il est désormais le directeur général.
« Veux-tu un café? » Des yeux, il cherche la cafetière. Parce que nous l’avons rencontré à sa toute première journée de travail. Il ne trouvera pas le lait. Si son arrivée semble surprenante, force est d’admettre en l’écoutant que sa nomination était écrite sur sa partition de vie.
Natif de Saint-Hubert-de-Rivière-du-Loup, Denis Lagacé a grandi dans une maison où la musique était une évidence. « Mon père jouait de l’accordéon, ma mère chantait avec les religieuses. Les rigodons et les chants du cahier de La Bonne chanson rythmaient les soirées familiales », se souvient-il.
Enfant, il chante à la chorale de l’église, les pieds solidement ancrés dans le premier banc, réservé à la famille. Il s’initie à la musique à l’école, déchiffrant ses premières partitions à la flûte à bec. Très jeune, il rejoint la chorale Do-Ré-Mi de Saint-Hubert, un ensemble qui a marqué les années 1980 par son dynamisme et son rayonnement.
Une anecdote marquante de cette époque illustre bien l’envergure de ses débuts. Invités à chanter au Parlement à Ottawa, les jeunes choristes entonnent La Manic dans la rotonde. Brian Mulroney, alors premier ministre, s’apprête à quitter les lieux lorsqu’il entend les premières notes de cette chanson évocatrice pour l’homme originaire de Baie-Comeau. « Il a fait demi-tour pour chanter avec nous. Voir le chef du pays unir sa voix à la nôtre était magique. Le lendemain, dans les nouvelles, tout le monde parlait de nous », raconte-t-il.
Un parcours jalonné de mélodies et de résilience
La musique, bien qu’elle soit une passion, s’efface un temps pour laisser place à une carrière en administration municipale. Mais Denis Lagacé ne quitte jamais vraiment les partitions. À travers les années, il dirige des chorales, participe à des groupes musicaux dans les bars, et ne manque pas une occasion de s’investir dans des projets musicaux.
En 2010, il rejoint le Chœur Amisol, une chorale alors sous la direction d’un certain Mathieu Rivest. « Rejoindre Amisol, c’était renouer avec ma passion, retrouver un équilibre », explique Denis. Cette collaboration lui fait découvrir, grâce à Mathieu, le Camp musical Saint-Alexandre, un lieu qu’il qualifie aujourd’hui de magique.
Devenu directeur général il y a quelques jours, il se consacrera désormais à en poursuivre la mission, tout en faisant grandir l’institution pour en faire un phare de créativité et d’apprentissage. « Ici, on n’enseigne pas seulement la musique. On enseigne des valeurs, une discipline, une passion. C’est une école de vie », dit-il.
Sa vision est claire : il veut préserver l’âme du camp tout en assurant sa pérennité. Cela passe par des investissements dans les infrastructures, un soutien accru aux employés, et l’exploration de nouvelles avenues comme des résidences artistiques ou des collaborations avec des artistes professionnels. « Les jeunes qui viennent ici repartent transformés. Ils découvrent qu’ils peuvent exprimer ce qu’ils sont à travers la musique. C’est cette magie que je veux préserver. »
Denis Lagacé veut transmettre sa passion musicale aux générations futures, et offrir un espace où l’art, la nature et l’humanité s’unissent. « La musique m’a toujours accompagné. Elle m’a offert des moments inoubliables, et m’a appris la résilience. Aujourd’hui, c’est à mon tour de la transmettre », conclut-il.
Sous sa direction, le Camp musical Saint-Alexandre semble prêt à écrire un nouveau chapitre mélodieux, où chaque note résonnera comme un hommage à la richesse de la musique, et au pouvoir qu’elle a de transformer des vies, et comme il le dit : « de construire des souvenirs ».