Écrire le quotidien

Corine de Repentigny, écrivaine publique. Photo : Éliane Vincent

Corine de Repentigny est écrivaine publique. Si vous êtes comme la plupart des gens, ce titre ne vous dit rien, même s’il est d’une grande utilité pour la communauté. Rencontre avec une passionnée des mots et des gens.

Une écrivaine publique rédige pour autrui des lettres, des actes légaux, et tous ces textes qui sont parfois difficiles à composer pour qui n’a pas les connaissances ou le talent pour aligner les mots. Ce métier est aussi vieux que l’écriture elle-même. Dès l’Antiquité, les scribes égyptiens le pratiquaient, et on peut le voir évoluer au fil des siècles, toujours nécessaire.

Au 21e siècle, le métier inclut la rédaction de billets pour les réseaux sociaux, de textes pour les sites web, de demandes de subvention, de lettres de présentation, d’hommages funéraires… En bref, chaque fois que le syndrome de la page blanche apparaît, l’écrivain public peut rendre service.

Écrire pour conserver

Corine de Repentigny est arrivée de son Lotbinière natal il y a une trentaine d’années. Elle a fait mille métiers, a beaucoup voyagé, et a adopté le Kamouraska comme sa terre d’accueil. Diplômée du Cégep de La Pocatière en écologie appliquée, elle porte à la nature un amour indéfectible, et décrit l’écriture comme sa soupape et son tremplin créatif.

De l’écologie, elle conserve le désir de préserver l’environnement. Ce désir s’incarne aujourd’hui dans son activité d’écrivaine publique, transposé à la mémoire collective. Outre les services de rédaction de documents administratifs ou autres, elle offre son écoute aux aînés pour écrire leur biographie. « Une amie à moi, qui crée des urnes funéraires, m’a dit un jour que les gens ont besoin de parler de la personne qui n’est plus là », rappelle Corine.

Cette remarque lui a fait prendre conscience de son désir de raconter les histoires des autres, pour enrichir le patrimoine commun, et préserver le souvenir de ce qui était autrefois, et qui passe vite. « J’aime entendre les histoires des gens, et j’aime écrire des récits. Quand j’écoute des aînés me raconter leur parcours, j’ai envie de conserver une trace de ces vies-là, plus simples que les nôtres, et pas si lointaines, au fond. »

Métier méconnu

Quand on pratique un métier aussi peu conventionnel, le défi consiste à développer un marché. Et ce n’est pas toujours facile de démontrer l’importance d’une écriture soignée dans ce monde qui carbure à l’instantanéité. Corine de Repentigny sillonne le Kamouraska, épluche les sites web, traque les erreurs de rédaction et les fautes d’orthographe, laisse sa carte, propose ses services.

Elle fait aussi des approches auprès des résidences pour aînés, propose des ateliers aux résidents, au cours desquels elle les guide vers leurs souvenirs, pour les mettre en mots. « Je veux stimuler leurs sens, leur rappeler les odeurs, les sons, les modes de leur enfance et de leur vie, pour les raconter », poursuit l’écrivaine. Elle y voit une façon de raviver leur estime personnelle, de prendre conscience de la richesse de leur parcours, quel qu’il soit.

Et sa façon de raconter prend les formes les plus diverses. « Pas besoin d’écrire 100 pages, parfois, ça peut même être un livre de recettes, une liste de chansons agrémentées de tranches de vie. Tout est bon pour entrer dans les souvenirs », rappelle celle qui aurait bien aimé pouvoir lire ne serait-ce que dix pages de la vie de son arrière-grand-mère. À ces personnes, elle présente son projet comme « un présent pour le futur ».

Pour l’instant, Corine de Repentigny doit encore travailler dur pour trouver des débouchés à son talent. En attendant, elle écrit des textes de blogue où elle célèbre la nature, sur son site www.servicescourtepointe.com. Mais parions que son amour de la langue, de l’écrit et des gens finira bien par trouver sa voie.