Éditorial : Ces aimants à migrants

Avez-vous déjà pris la peine de recenser le nombre de projets originaux et innovants actuellement en développement à Saint-Germain-de-Kamouraska? D’ici la fin de l’année, la Municipalité d’un peu moins de 300 habitants devrait s’être enrichie d’un cirque extérieur et d’un gym d’escalade à l’intérieur de son église en reconversion. Il ne faut donc pas se surprendre si elle a vu sa population augmenter de 22 citoyens au courant de la dernière année pour s’établir à 298 personnes.

D’autres petites municipalités qui mènent de front d’autres projets tout aussi mobilisateurs ont également enregistré des gains significatifs dans la dernière année. C’est le cas notamment de Mont-Carmel (+50) et de Saint-André (+36). Si en terme de nombre (+71), La Pocatière est pourtant celle qui a le plus attiré en 2018, suivie de Saint-Pascal (+50), cette augmentation n’a rien de comparable en proportion à celles des trois autres municipalités citées précédemment.

« Small is beautiful »

Pourtant, on pourrait croire que La Pocatière, Saint-Pascal et même Saint-Alexandre devraient être les lieux de résidence logiques des nouveaux résidents du Kamouraska, en raison de leurs infrastructures municipales et de leur abondance de services. Ne vivons-nous pas à l’ère de l’urbanisation? Pas au Kamouraska. Ici, c’est le monde à l’envers. « Small is beautiful » comme disent les anglophones. Par conséquent, les petites municipalités agissent comme de véritables « aimants à migrants! »

Et on peut les comprendre ces nouveaux arrivants de préférer nos petites localités aux grandes. S’ils quittent la ville, ce n’est pas parce qu’ils en ont marre de la vie culturelle riche, originale et diversifiée qu’on y trouve, mais parce que le béton et la circulation finissent par les soûler et que le vert leur manque désespérément. En ce sens, la MRC de Kamouraska frappe dans le mille avec le slogan « travail et nature comme cadre de vie » pour sa campagne de marketing territorial!

Plus grande mobilité

Lorsqu’ils prennent leur aller simple pour notre région, les nouveaux arrivants veulent tout sauf s’entasser dans un bloc appartement de La Pocatière ou de Saint-Pascal. La pénurie de maisons de campagne en location, soulevées dans nos pages l’an dernier, peut en témoigner.

Pourtant, nos « villes » offrent une gamme de loisirs intéressants, mais rien de vraiment différent de ce que la banlieue montréalaise ou québécoise aurait pu leur offrir. Et justement, ils ne l’ont pas choisie malgré son accessibilité, car ça ne les branchait pas.  Un aréna reste un aréna, peu importe où il se trouve.

Au besoin, si jamais l’envie leur prend de bénéficier des services de nos villes de centralité, ils n’auront qu’à s’y rendre en voiture. Ce n’est rien une dizaine de minutes pour faire 10 km, alors qu’il leur en fallait 1 h, sinon plus, pour la même distance en ville!

Appartenir à une communauté

Une fois emménagés, nos bons migrants désirent avant tout avoir le contrôle sur leur environnement, appartenir à une communauté. Ils veulent sentir qu’ils peuvent faire une différence et ils se nourrissent de gens comme eux. La vie en ville bien rangée, où s’entasse en série une population désengagée et où tout est décidé de A à Z à l’hôtel de ville par les élus et les employés municipaux, très peu pour eux.

Ils choisissent donc par dizaines les petites municipalités dynamiques où ils pourront se fondre dans une communauté de semblables qui pensent en dehors de la boîte et où le sentiment de pouvoir changer le monde n’est pas juste une impression, mais une réalité. Avec souvent que deux ou trois employés à leur charge, ces mêmes municipalités savent très bien qu’elles n’arriveront à rien si elles ne stimulent pas l’engagement communautaire.

De fil en aiguille, ces communautés déjà mobilisées s’enrichissent de nouveaux esprits libres et créatifs qui viennent s’ajouter à une marmite déjà en ébullition. Et comme le monde attire le monde, on comprend facilement l’attraction exponentielle qu’exercent ces gens inspirants sur d’autres personnalités tout aussi entreprenantes.

Tendance?

Bref, s’il est trop tôt pour parler de tendance en matière de mouvement de population au Kamouraska, car les données annuelles du décret de population sont à prendre avec un grain de sel, rappelons-le, on peut tout de même dire que les petites municipalités semblent être celles qui ont le mieux saisi l’ADN des nouveaux arrivants qui choisissent notre territoire. Si elles ne veulent pas se faire damer le pion de l’attractivité, nos villes de centralité devraient donc s’en inspirer et porter une oreille plus attentive aux prochains « hurluberlus » qui se présenteront à leur hôtel de ville avec des projets d’apparence farfelus. Qui sait, peut-être seront-ils la bougie d’allumage qui feront d’elles les incontournables de demain?