Faire de l’élevage éthique et responsable, à l’ère du véganisme

Les cochons de 40 Arpents sont en liberté et servent à labourer des parcelles de terre destinées à l’agriculture maraîchère. Photo : Facebook 40 Arpents.

On pourrait croire qu’Isabelle Vaillancourt et Patrick Lavoie sont à contre-courant. À l’ère du véganisme où des voix s’élèvent au nom de la survie de la planète et du bien-être animal pour réclamer la fin de la consommation de la viande, ces deux éleveurs de porc de Saint-Onésime-d’Ixworth sont de ceux qui prônent une consommation moindre, mais de meilleure qualité.

Les coups d’éclat du mouvement végane dans des restaurants de Montréal n’ont pas manqué de faire réagir Isabelle Vaillancourt et Patrick Lavoie. D’une part parce qu’ils avouent avoir déjà mangé à quelques-unes de ces tables et avoir apprécié leur expérience. D’autre part parce que les chefs de ces restaurants ont le souci d’encourager les circuits courts en achetant auprès de producteurs locaux comme eux qui ont une préoccupation poussée pour l’environnement et le bien-être animal.

« On est d’accord avec les gens qui prônent le véganisme : on ne peut plus faire de l’élevage aujourd’hui en 2020 sans avoir une préoccupation pour le bien-être animal. Mais ne plus en faire tout court, ce n’est pas la solution pour nourrir la planète », de l’avis d’Isabelle Vaillancourt.

À leur ferme 40 Arpents, le couple d’éleveurs cherche plutôt à faire la démonstration depuis 2017 qu’il est possible de diminuer sa consommation de viande en prônant la qualité plutôt que la quantité, et cela, en menant un microélevage respectueux de l’animal et de l’environnement. Il se limite ainsi à une production d’une cinquantaine de porcs par année, nourris au grain biologique, qui passent la majeure partie de leur temps en liberté dans les champs et dont la viande est transformée en différents produits comme du bacon, du jambon et des charcuteries.

Engraissés sur une plus longue période de temps que dans un élevage conventionnel, les porcs d’Isabelle et Patrick sont conduits à l’abattoir au nombre de quatre à la fois maximum. Un choix qu’ils ont fait afin de ne pas soumettre leurs animaux aux conditions d’un transport à grande échelle où les bêtes sont plus entassées, donc dans moins bonnes conditions. Et comme ils font également de la production maraîchère, les porcs servent à labourer les parcelles de terre qu’ils cultivent, en plus d’enrichir le sol de leur fumier, avant d’être conduits à l’abattage.

« Si tu veux une qualité de sol qui va te permettre de produire des légumes tous les ans, l’apport de matières organiques animales est essentiel, alors qu’avec juste des végétaux, ça ne suffira pas. Tout est complémentaire, c’est une roue qui tourne », explique Patrick Lavoie.

C’est pourquoi ils espèrent que le mouvement végane ne nuira pas trop à celui de l’alimentation locale, qui lui cherche encore à s’imposer de façon plus importante dans le quotidien des consommateurs depuis maintenant une bonne dizaine d’années.

« Notre souhait est que le discours autour de la bouffe soit plutôt orientée autour d’une meilleure alimentation, diversifiée et non excessive. Et c’est possible d’y arriver si on est plus nombreux à encourager les producteurs qui ont les meilleures pratiques en matière de bien-être animal et de respect de l’environnement. Ce qu’il faut ce n’est pas interdire, mais de nuancer le débat », concluent-ils.