Biopterre a depuis longtemps fait de la recherche sur les champignons terrestres l’un de ses créneaux d’excellence. À ces connaissances s’ajoutent maintenant les champignons marins, mais pas n’importe lesquels : ceux du Saint-Laurent.
Félix-Antoine Bérubé-Simard est spécialisé dans la microbiologie ainsi que dans la biologie cellulaire et moléculaire. À titre de codirecteur – innovation et transfert de technologie – mycotechnologies chez Biopterre, il fait partie de l’équipe de chercheurs qui procède depuis 2020 à l’analyse des champignons marins trouvés dans le fleuve Saint-Laurent, notamment dans le secteur de Blanc-Sablon sur la Basse-Côte-Nord. « On doit avoir au-dessus de 300 souches d’identifiées », dit-il.
Les champignons marins piquent la curiosité. Le commun des mortels ignore bien souvent leur existence, alors que les scientifiques se sont peu intéressés à eux par le passé, contrairement aux bactéries. « Il faut dire que la définition de champignon marin est encore relativement récente. Elle doit avoir tout au plus une cinquantaine d’années », poursuit Félix-Antoine Bérubé-Simard.
Des découvertes prometteuses
Par la recherche fondamentale que Biopterre mène sur les champignons marins, le centre collégial de transfert de technologie rattaché au Cégep de La Pocatière cherche à élargir ses connaissances sur le sujet afin d’orienter les projets de recherches appliquées pour ses futurs clients. Certaines propriétés identifiées dans le cadre de ces travaux ouvrent d’ailleurs de belles fenêtres que l’équipe de chercheurs souhaite continuer à étudier.
Des champignons marins du Saint-Laurent sont entre autres très efficaces pour éliminer certains contaminants dans l’eau, notamment les colorants textiles. « Ce n’est pas suffisant pour purger le fleuve de toute la pollution humaine, mais oui, des champignons marins ont ce potentiel », explique le microbiologiste. Le même procédé pourrait aussi être réalisé avec d’autres de ces champignons, mais cette fois en milieu terrestre.
La résistance des champignons marins aux températures basses et à de forts degrés de salinité est un autre trait qui joue à leur avantage comparativement aux champignons terrestres, notamment pour des usages industriels.
« Les enzymes des champignons terrestres ont souvent besoin d’une température entre 50 et 60 °C pour être efficaces, ce qui n’est pas le cas pour les champignons marins du Saint-Laurent. Le gain financier devient intéressant dans des régions nordiques, où il faudrait autrement les chauffer de façon importante pour en faire usage pour de quelconques procédés industriels. »
Intérêt pharmaceutique
Biopterre souhaite maintenant pousser ses recherches davantage du côté pharmaceutique, puisque la littérature scientifique fait déjà état du potentiel antibiotique, ou même anticancer, des champignons marins. La médiatisation de ces découvertes récentes poursuit justement cet objectif : trouver un partenaire de l’industrie qui permettrait de pousser les recherches en ce sens.
« On souhaiterait également pérenniser annuellement des activités de recherche avec le cégep, par le biais d’un financement pour des activités qui engloberaient autant les techniques de bioécologie et de l’informatique que les sciences de la nature. Une étudiante a déjà été en mesure d’identifier une souche du Saint-Laurent qui est plus efficace qu’une souche terrestre pour éliminer les bactéries, entre autres. Ce genre de collaboration est porteur pour nos travaux. »