Deux ans et demi que Nancy Dubé est de retour dans sa région natale et qu’elle dirige de main de maître la Chambre de commerce Kamouraska-L’Islet (CCKL). Alors que plus personne ne s’attendait à revoir cette organisation jouer le rôle pour lequel elle a été créée, Nancy Dubé a réussi à lui insuffler en peu de temps, et surtout, en pleine pandémie, un dynamisme nouveau. Cet exploit admirable est d’autant plus paradoxal qu’il s’est déroulé en bonne partie dans l’ombre, alors que sa principale artisane était encore il y a quelques années une habituée des micros et des caméras.
Un mois après lui avoir annoncé qu’elle avait été désignée personnalité de l’année 2021 par Le Placoteux, Nancy Dubé n’en revenait toujours pas. Aucun honneur de la sorte ne lui avait déjà été accordé par le passé.
« Je suis tellement honorée. Je me suis toujours dit que ma vie allait commencer à 50 ans. Je vais avoir 51 ans, je me trouve un emploi où je me sens enfin à ma place et c’est reconnu. Je pense que je vais commencer à y croire », s’est-elle exclamée, avec toute la sincérité qu’on lui connaît.
Véritable bombe d’énergie, Nancy Dubé n’est pas du type à passer inaperçu. Chevelure charbon « rockabilly », bottes roses dans les pieds et manteau d’hiver tout aussi bonbon, elle brise le stéréotype de la « réserve » qui, à tort ou à raison, colle souvent à la peau des gens qui travaillent dans les organisations de développement économique comme la sienne.
Carrière médiatique
Si sa personnalité flamboyante la démarque clairement de la masse, son parcours professionnel a aussi de quoi impressionner. Bachelière en communication de l’Université Laval, cette native de Saint-Damase-de-L’Islet a eu une carrière que plusieurs auraient certainement enviée au sein des entreprises médiatiques les plus en vue de la région de Québec, et cela, durant une bonne dizaine d’années.
Animatrice à la radio, Nancy Dubé a été entendue aux micros de RockDétente (Rouge), Énergie et Rythme FM durant les années 2000, en plus d’être vue à la télévision comme chroniqueuse à TQS (Noovo) et même Télé-Québec. Ironie du sort, cette carrière médiatique s’est offerte à elle après avoir travaillé durant un an… à la Chambre de commerce de La Pocatière ! « C’était bien avant qu’elle devienne la CCKL. L’organisation avait touché une subvention pour m’embaucher. Mon contrat s’est terminé dès que la subvention a pris fin », se souvient-elle.
Un retour sur les bancs d’école l’a ensuite ramené à Québec, au Collège des annonceurs radio télévision (CART). Ses débuts derrière la caméra se sont effectués au Canal Vox (MAtv) au sein de l’émission CitéMag, un magazine communautaire animé par nul autre que François Paradis, aujourd’hui député caquiste de Lévis et président de l’Assemblée nationale du Québec.
« François était en “break” de TVA, à l’époque. Il avait vu mon démo et il l’avait adoré. J’avais été embauché pour réaliser une chronique sur les trucs insolites qui se déroulaient à Québec. J’ai collaboré à l’émission durant deux ans et j’ai vraiment aimé ça, car j’avais carte blanche. »
Le retour
Cette confiance que François Paradis lui a accordée, Nancy Dubé la compare aujourd’hui à celle que son conseil d’administration à la CCKL et son ancien président, le nouveau maire de La Pocatière Vincent Bérubé, lui ont manifestée dès son embauche en juin 2019. Parce qu’après une vingtaine d’années à travailler dans le domaine des médias et ensuite comme conseillère en communication pour différentes organisations, dont RECYC-QUÉBEC et la Corporation des services d’ambulance du Québec, Nancy Dubé avait besoin de changement.
Pendant toutes ces années, revenir dans la région est toujours demeuré dans les cartons pour cette ancienne élève du Collège de Sainte-Anne-de-la-Pocatière puis étudiante au Cégep de La Pocatière. Son attachement à Kamouraska-L’Islet étant profond, son conjoint originaire de Mont-Joli — un économiste de formation — et elles ont choisi de s’établir à Rivière-Ouelle en 2019, un choix de vie qui a été salutaire.
« Je suis revenue comme si je n’étais jamais partie. Je me promenais en voiture et je me disais : “Maudit que je suis bien ! Je vais mourir ici.” »
Forte de son expérience en communication à Québec, Nancy Dubé cherchait maintenant un emploi où elle pourrait mettre ses aptitudes professionnelles au service de la région et évoluer dans une organisation agile et flexible où elle évoluerait à son rythme. Le hasard l’a finalement ramené à la Chambre de commerce, 25 ans plus tard, où après coup, le chemin parcouru en peu de temps par l’organisation témoigne d’un rythme accéléré par lequel Nancy Dubé a réussi à imposer sa marque.
Parmi les constats qui s’imposaient dès son entrée en poste figurait le déficit de visibilité dont souffrait la CCKL en dehors de ses activités ponctuelles, chose qu’elle entendait naturellement remédier. Un gros travail de communications s’est donc imposé, entre autres auprès des médias locaux afin que la Chambre puisse davantage porter sa voix sur des enjeux économiques touchant les entreprises de la région. Communiqués de presse, entrevues, la CCKL a repris cette place qui lui était jadis naturellement dévolue dans le discours public.
La représentativité territoriale, un autre défi auquel Nancy Dubé s’est attaquée dès ses débuts, visait à déconstruire cette image « pocatoise » de la CCKL qui traîne toujours 20 ans après s’être constituée à partir de ce qui était jadis l’ancienne Chambre de commerce de La Pocatière. Des choix stratégiques ont donc été posés pour accentuer la représentativité des différentes parties de son grand territoire sur le conseil d’administration, mais aussi lors de la tenue de ses différentes activités de financement comme le tournoi de golf annuel et le traditionnel souper vins et fromages.
Rayonnement
Assurément remarquées, les premières actions de Nancy Dubé ont apporté un rayonnement certain à la CCKL, en plus de s’éloigner de cette image tenace de « gros club social » qui collait négativement à la peau de l’organisation. Lorsque la pandémie s’est invitée, le travail plus visible des premiers mois s’est toutefois poursuivi dans l’ombre essentiellement, les possibilités de développement sur le terrain étant plus limitées. Nancy Dubé n’y a pas vu une embûche pour autant, elle qui sondait ses membres par courriel pour tâter le pouls sur les mesures sanitaires changeantes du gouvernement ou même pour les informer sur les programmes d’aides à leur disposition pour traverser la crise.
« Sans blague, de mon bureau, je me suis sentie tout aussi utile. Je recevais des appels de nos membres et des courriels qui nous remerciaient. Je crois que ce travail d’accompagnement “à distance” a été très apprécié. »
L’effectif de la CCKL semble d’ailleurs lui donner raison. Si Nancy Dubé avoue ne pas avoir poussé davantage pour augmenter le nombre de membres depuis son entrée en poste — ce nombre se maintient autour de 250 entreprises annuellement —, une vingtaine s’est ajoutée cette année seulement.
Son organisation, qui est aussi de plus en plus consultée, est même invitée à siéger sur des comités de développement régional. Dans la foulée, des rapprochements avec la Chambre de commerce et d’industrie de la MRC de Montmagny ont également été officialisés à travers une alliance stratégique visant à donner la parole aux entreprises membres et non membres sur l’enjeu de la pénurie de main-d’œuvre. Pour Nancy Dubé, il s’agit là de signes concrets témoignant de la crédibilité retrouvée par la Chambre de commerce Kamouraska-L’Islet dans la région.
« On bat aussi des records avec nos certificats d’achats régionaux qui ont inspiré d’autres chambres de commerce au Québec à faire de même. En deux ans, on en a vendu pour environ 120 000 $ et 85 % du budget de notre campagne publicitaire de cette année a été investi dans nos médias locaux. Je crois qu’on ne peut pas être plus cohérent avec le message qu’on désire véhiculer. »
Bref, tout baigne pour Nancy Dubé à la CCKL. La tête encore pleine d’idées, elle rêve grand et il n’est pas question qu’elle s’arrête là, elle qui se voit encore à la barre de la Chambre dans quelques années. « Je n’ai jamais été aussi heureuse de ma vie dans un emploi. Si c’est ça être sur son X, clairement, je peux confirmer que je suis dessus. »