J’ai récemment fait mon petit tour à La Pocatière, comme je le fais régulièrement. À la sortie 436, après plusieurs heures de route depuis Montréal, j’ai quitté la 20 et, je l’ai vue apparaître : la future maison du Kamouraska, sur le site de la Grande-Anse. Celle qui, lorsqu’elle sera complétée, remplacera le pavillon d’accueil fréquenté depuis des années par les locaux comme par les touristes. Un bien beau site que celui de la Grande-Anse. Ouvert, marin, bucolique, juste assez en retrait pour qu’on puisse profiter des berges sans être trop dérangés par l’autoroute d’à côté.
Or, ce qui se profile ressemble à une autre grosse construction commerciale, jurant avec le site au lieu de le mettre en valeur. Rouge en plus, question de ne pas la manquer! Comment justifier un tel manque de vision? Pourquoi n’avons-nous pas eu l’intelligence de conserver au site son caractère modeste, accueillant et surtout, ouvert sur le fleuve et ses berges?
Il me semble important de rappeler que le site de la Grande-Anse — la halte, les berges, la piste cyclable, les installations artistiques — est généralement l’unique chose que les visiteurs – québécois et étrangers — connaissent de La Pocatière. Nous le savons, les touristes ne montent pas la côte, ils ne parcourent pas la 4e Avenue et ne prennent pas non plus le chemin de la montagne du Collège. Non. Ils font le plein aux pompes à essence et continuent tout droit ou obliquent vers le fleuve et viennent y faire un tour. Un arrêt en passant.
La halte de la Grande-Anse est donc notre unique occasion de faire bonne impression. Cela aurait justifié, selon moi, que nous donnions aux visiteurs un avant-goût de la beauté du Kamouraska. Les y introduire en quelque sorte. Et puis, leur donner le goût de La Pocatière aussi, pourquoi pas? Pensez au pavillon d’accueil de la Seigneurie des Aulnaies. Vous voyez? Simple, beau, et qui se fond au paysage. Mais, nous ne sommes pas allés dans ce sens-là et cela me déçoit. Déjà l’apparition récente du concessionnaire sur la 132 m’avait abasourdie, mais bon, j’ai fait contre mauvaise fortune bon cœur. Après tout, il y a déjà, pas très loin, à l’ouest, quelques fast-foods apparemment incontournables n’est-ce pas? On ne peut pas tout avoir…
Je ne me soucie pas des coûts ou du retard des travaux, car je sais que d’autres le feront ou l’ont déjà fait. Mais je me soucie de la beauté. À La Pocatière, comme ailleurs. En fait, à La Pocatière un peu plus qu’ailleurs, car c’est aussi chez moi. Et puisque La Pocatière ne semble pas attacher beaucoup d’importance à son image de marque ni à son rapport au fleuve, il me semble important de remettre ces préoccupations à l’avant-plan. Donc, la beauté, celle qui attire des visiteurs toujours plus nombreux chaque été au Kamouraska; celle qui mérite qu’on se déplace pour la voir, la contempler… J’ai donc beaucoup de mal à concevoir qu’on puisse ainsi volontairement massacrer une telle carte de visite. À moins qu’on veuille dire aux visiteurs : allez-y, passez tout droit! J’attends qu’on m’explique.
Geneviève Chagnon, propriétaire d’une résidence secondaire à La Pocatière