Pénurie de logements : Des promoteurs plutôt rares

Photo : Naomi Hébert (Unplash.com)

Kamouraska-L’Islet vit une pénurie de logements, certes, mais cette problématique d’apparence plutôt nouvelle dans la région ne serait pas le fruit du hasard. L’absence de promoteurs sur le territoire ces dernières années expliquerait en grande partie pourquoi les unités locatives restantes sont à la fois rares et vieillissantes.

Il y a déjà un moment que la MRC de L’Islet se dit préoccupée par la pénurie de logements sur son territoire. Reconnue pour ses industries en croissance qui emploient de plus en plus de travailleurs étrangers, mais également des travailleurs de plus en plus spécialisés en provenance des grands centres urbains, la problématique s’y est pointée aussitôt qu’avant la COVID-19, au point où la MRC a décidé de commander une étude sur le sujet.

« Ce que l’étude a fait ressortir, c’est qu’entre 2014 et 2018, il y a eu une diminution de 491 à 485 unités de multilogements. Ça peut sembler peu, mais c’est si chaque unité contenait entre six et dix logements chacune, au cumulatif ça fait des dizaines en moins », résume Sylvain Thiboutot, directeur du service de développement économique à la MRC de L’Islet.

Ces logements ont été essentiellement abandonnés ou convertis à d’autres usages.

En ce qui concerne le parc locatif restant, ce dernier est vieillissant, l’étude faisant ressortir que 50 % de celui-ci date d’avant 1960. « Seulement 2 % de tous les logements ont été bâtis entre 2011 et 2016. Pas besoin de rappeler que les besoins des gens d’aujourd’hui ne sont plus les mêmes qu’il y a 50 ans », poursuit Sylvain Thiboutot.

Le coût de location moyen de 475 $/mois — le plus bas de tout Chaudière-Appalaches lorsque l’étude a été réalisée en 2019 — n’aide pas non plus. L’offre n’étant pas à la hauteur de ce que les gens recherchent, plusieurs font le choix, pour quelques dollars de plus par mois, de profiter de l’accessibilité des prix sur le marché immobilier local pour s’acheter une résidence. Pour les promoteurs, le prix n’incite guère à rénover ou même à bâtir de nouveaux immeubles à logements, le retour sur investissement étant beaucoup trop long.

« Ici, ce n’est pas comme en ville où les promoteurs voient toutes leurs unités louées avant même que la construction du bâtiment ne soit terminée et qui vivent même, dans certains cas, de la surenchère. Tout ça mis ensemble fait qu’on se retrouve avec la crise que nous vivons aujourd’hui. »

Mains liées

Au Kamouraska, Saint-Pascal n’a pas mené une étude aussi exhaustive que la MRC de L’Islet, mais la directrice du développement et des communications Emilie Poulin tire les mêmes constats. La demande en logement locatif est bien réelle, mais les promoteurs ne sont pas au rendez-vous pour développer et les municipalités sont limitées dans ce qu’elles peuvent faire.

« On a les mains liées. Nous, comme ville, on peut développer des logements sociaux pour les gens à faibles revenus, mais nos besoins ne sont pas là actuellement. Ceux qui nous contactent pour louer un appartement, c’est des travailleurs qui font des salaires respectables, des professionnels qui cherchent quelque chose au goût du jour », résume-t-elle.

Sylvain Thiboutot est aussi du même avis, ainsi que Sébastien Demers, courtier immobilier résidentiel et commercial chez RE/MAX Élégance. Ce dernier ajoute même à cela la clientèle des préretraités ou des jeunes retraités, en moyen, mais qui ne veulent plus s’occuper d’une maison. « Il y a une demande dans la région pour du plus haut de gamme », déclare-t-il.

Selon lui, il y aurait actuellement des investisseurs intéressés à développer ce type de logements dans le secteur de La Pocatière. Ces projets se concrétiseront-ils à court ou moyen terme ? « Je viens de vendre un terrain qui pourrait accueillir un projet d’environ 13 logements à La Pocatière. Mais le coût des matériaux demeure cher », rappelle-t-il.

Sylvain Thiboutot croit de son côté que les communautés sont rendues à explorer d’autres avenues. « L’approche «un promoteur construit et ensuite il loue» est peut-être plus difficile en région. Il faut commencer à évaluer d’autres modèles de gouvernance comme les OBNL ou les coopératives », conclut-il.