La sécheresse connue à l’été 2018 a des conséquences désastreuses sur les producteurs agricoles des régions les plus touchées au Québec. La rareté du foin pèse lourd sur les finances des fermes, comme en témoignent trois producteurs laitiers du Kamouraska.
100 $, c’est le prix moyen d’une balle de foin en ce début d’année 2019. Un prix occasionné par la rareté provoquée par la sécheresse de l’été 2018. Pour les producteurs agricoles du Bas-Saint-Laurent, cette situation est intenable. « Quand on n’est pas dans une situation comme cette année, le prix tourne autour de 30 ou 35 $ la balle », d’indiquer Gilbert Marquis, président de la Fédération de l’UPA du Bas-Saint-Laurent.
À ce prix, la situation est difficile pour plusieurs producteurs agricoles du Québec. Au Bas-Saint-Laurent, Gilbert Marquis rappelle que la région en est à son deuxième été de sécheresse consécutif. « Plusieurs producteurs de la région sont sur le respirateur artificiel. Pour arriver, ils diminuent leur troupeau en envoyant des bêtes à l’encan. Ils n’ont pas le choix, ils n’ont pas d’argent pour les nourrir », déclare-t-il.
Comptes impayés
Propriétaire de deux fermes laitières à Saint-Alexandre, Céline Dumont confirme les dires du président régional de l’UPA. Possédant environ 140 vaches en lactation sur ses deux sites, elle avoue se tirer pas si mal d’affaire pour le moment. Toutefois, elle sait que ce n’est pas le cas de tout le monde. « J’entends de mes fournisseurs qu’ils ne sont pas payés actuellement parce que des producteurs n’avaient pas le choix d’acheter du foin. Il y a toujours une limite à diminuer son cheptel. Non seulement ç’a un impact sur ta relève laitière à long terme, mais les bêtes que tu gardes, tu dois les nourrir quand même », mentionne-t-elle.
De plus, comme le souligne Gilbert Marquis, viennent s’ajouter la neige et le froid, qui poussent les animaux à manger davantage. « Ça fait juste amplifier la rareté. Et pour ceux qui réussissent à acheter du foin quand même, il n’est pas toujours de qualité non plus », déclare-t-il.
Producteur laitier biologique à Sainte-Anne-de-la-Pocatière, Charles-Étienne Pelletier avoue qu’en plus de tous ces facteurs, sa spécialisation ajoute une pression financière encore plus importante pour son entreprise. « En partant, on paye toujours nos balles de foin plus cher dans le biologique. Quand tu es performant, tu as une certaine marge de manœuvre. Mais là, le coussin qu’on avait, on l’utilise pour compenser le manque de foin. Qu’est-ce qu’on va faire si quelque chose d’inattendu brise ? », questionne-t-il.
Indemniser
Pour Nathalie Lemieux, présidente du syndicat local de l’UPA au Kamouraska et copropriétaire d’une ferme laitière à Saint-André, le gouvernement fédéral n’a pas d’autres choix que de revoir les paramètres de couverture de l’assurance récolte de la Financière agricole du Québec (FADQ) pour mieux indemniser les producteurs agricoles touchés par la sécheresse de 2018. « Ils ont déjà accepté de le faire pour 2019. On leur demande seulement de le faire aussi pour 2018. Ce n’est pas complexe, il me semble. »
De son côté, Céline Dumont estime que les producteurs agricoles ont le droit à cet argent, d’autant plus qu’ils cotisent à 40 % pour ce fonds d’assurance. « On a des pertes et on veut réclamer. C’est tout à fait normal. On ne demande pas de l’argent en plus, seulement ce à quoi nous avons contribué. »
Gilbert Marquis, lui, va plus loin. « On s’attend à de l’action de la part du fédéral dans ce dossier. Parce que si jamais on se retrouve avec des fermetures d’entreprises au Bas-Saint-Laurent, je ne me gênerai pas pour les tenir responsables de la situation », conclut-il.