Les tergiversations entourant l’avenir du projet de tramway à Québec font réagir jusqu’en Côte-du-Sud. Si le ministre de l’Économie Pierre Fitzgibbon estime que le contrat n’est pas « vital » à l’avenir d’Alstom à La Pocatière, le président du syndicat des travailleurs souhaite néanmoins que ce projet se réalise, car il ferait travailler au moins une centaine d’employés au sein de l’usine.
La déclaration de Pierre Fitzgibbon a été faite dans les jours suivant la révélation par le maire de Québec, Bruno Marchand, du souhait que son administration soit le maître d’œuvre du projet de tramway. Bénéficiant déjà d’un faible appui populaire dans la vieille capitale, le projet coûterait entre 12 et 13 G$ si sa construction était menée par un consortium privé.
En demandant au gouvernement Legault d’être le maître d’œuvre du projet, la Ville de Québec estime qu’elle pourrait s’acquitter de la facture pour environ 8,4 G$. Aucune décision n’a encore été rendue par le gouvernement du Québec à cet effet, mais l’explosion des coûts de plus de 4 G$ par rapport au projet initial sème aujourd’hui le doute sur sa possible réalisation.
Or, la Ville de Québec a signé un contrat de 569 M$ avec la multinationale Alstom, le 24 avril dernier, afin qu’elle conçoive, fournisse et entretienne le tramway pour une durée de 30 ans. Les 34 rames prévues dans le cadre de ce contrat seraient assemblées à l’usine de La Pocatière, qui lors des dernières années sous Bombardier criait à l’aide régulièrement lorsque les contrats se faisaient rares.
« Ce n’est pas une question de vie ou de mort pour La Pocatière », a déclaré le ministre de l’Économie à Radio-Canada, questionné à savoir si l’avenir de l’usine était en péril advenant la mort du tramway de Québec.
Le contrat serait toutefois bienvenu, croit-il, d’autant plus qu’il aiderait Alstom à respecter ses obligations en termes d’emplois qui accompagnent le prêt pardonnable de 56 M$ octroyé en 2021 par le gouvernement du Québec afin de moderniser l’usine de La Pocatière.
Marco Lévesque, président du syndicat des employés de l’usine, ne s’est pas montré en désaccord avec les propos du ministre, même s’il voit la chose au-delà des obligations évoquées par Pierre Fitzgibbon. « Je comprends ce qu’il dit quand il mentionne que ce n’est pas vital, car c’est vrai qu’on a d’autres beaux contrats devant nous. Mais plus on en a, plus c’est facile aussi de conserver nos employés, notre expertise. Repartir à zéro et embaucher dans le marché actuel, ce n’est déjà pas facile… »
Électriciens, peintres, monteurs, ouvriers de production sont quelques-uns des emplois qu’Alstom cherche toujours à pourvoir à La Pocatière, selon les propos rapportés par Marco Lévesque. Même si le tramway de Québec n’était pas le plus gros contrat de l’usine, il contribuerait assurément à sa stabilité, ce qu’Alstom cherche à faire à La Pocatière depuis qu’elle est propriétaire. « Augmenter de 100 employés, pour ensuite redescendre de 50 parce qu’on n’a pas assez d’ouvrage, ce genre de fluctuation n’est gagnante pour personne », ajoute le président.
Pas mort ni enterré
Chez Alstom Amériques, Adrien Vernhes aux communications n’a pas voulu se prononcer sur l’impact que la perte du contrat du tramway de Québec aurait sur l’usine de La Pocatière.
« Vous comprendrez que nous souhaitons laisser à la Ville et au gouvernement du Québec le soin de définir les prochaines étapes avant de commenter davantage », a-t-il écrit.
Le député de Côte-du-Sud Mathieu Rivest a pour sa part rappelé que le projet n’était pas mort ni enterré. « Si c’est rendu si cher, est-ce faute d’avoir évalué d’autres solutions pour les infrastructures? La ministre des Transports Geneviève Guilbault et le premier ministre François Legault doivent rencontrer le maire de Québec à ce sujet. Tout n’est pas encore joué. »