Vues sur le cinéma québécois en région

RIVIÈRE-DU-LOUP – La tenue à Rivière-du-Loup du festival Vues dans la tête de… a été l’occasion, vendredi dernier, de réunir les cinéastes Micheline Lanctôt, Philippe Falardeau et Robin Aubert pour discuter de la place du cinéma québécois en région.

Quand on regarde les titres des films produits par ces trois cinéastes, on constate que plusieurs d’entre eux n’ont jamais été projetés sur nos écrans. Cette réalité n’est pas propre aux régions, soutient Micheline Lanctôt. Elle se reflète aussi à Montréal. C’est un problème de distribution et de diffusion. «Il n’y a pas beaucoup d’écrans pour le cinéma québécois de façon générale», dit-elle. 

Selon Philippe Falardeau, les salles de cinéma privées devraient être soutenues par des fonds publics pour diffuser des films québécois qui ont du mal à attirer les foules. 

«Ça nous prend des festivals et des réseaux de cinémas indépendants pour que nos films soient vus. Ce n’est pas le réseau des salles commerciales qui permet ça», dit-il.

Production

Outre la diffusion, la production de films québécois en dehors de Montréal comporte sa part de défis.

«Pour tourner en région, il faut que ce soit des sujets qui s’y prêtent», souligne Philippe Falardeau.

Son plus récent long-métrage, Guibord s’en va-t-en guerre, a été tourné à Val-d’Or parce que le sujet s’y prêtait. «Ça n’avait aucun sens dans la réalité de mon histoire de tourner près de Montréal», dit-il.

À part Rafaël Ouellet et Sébastien Pilote, très peu de cinéastes tournent en région, constate la réalisatrice et comédienne.

«Le problème de tourner en région, s’en est un de coûts», dit-elle.

Il est déjà difficile d’obtenir des budgets adéquats pour tourner à Montréal, se déplacer à plus de 25 kilomètres de la ville devient un frein de plus au financement.

Plus cher en région

Madame Lanctôt estime qu’il en coûte un million de plus pour produire un film en région alors qu’une bonne partie du budget n’est même pas visible à l’écran. On doit prévoir le transport, l’hébergement et d’autres frais additionnels. 

Philippe Falardeau confirme cette estimation. Guibord a coûté 800 000 $ de plus juste parce qu’il a été tourné à Val-d’Or. 

«La plupart de mes films, je les ai faits dans mon village [Ham-Nord Athabaska]», raconte Robin Aubert. Pour tourner en région, ajoute le cinéaste et comédien, il faut réduire l’équipe.

«Quand on est cinquante dans un champ pour filmer un char qui passe, ce n’est pas normal. On peut faire ça à deux», dit-il.

Robin Aubert tient aussi à tourner dans son coin de pays pour l’apport que cela apporte à l’économie locale.

«Ça donne de la job à du monde qui travaille à la coop, à ceux qui louent des chalets. C’est positif pour tout le monde», dit-il.

Films autochtones

«On peut faire des films avec moins de monde, être plus mobile, s’extraire de la ville, mais il faut aussi que le tandem producteur-réalisateur soit au diapason», ajoute Philippe Falardeau. 

Le cinéma est une machine complexe et c’est une illusion, selon Micheline Lanctôt, de penser que les nouvelles technologies peuvent réduire les coûts de façon substantielle. 

Quel est l’avenir du cinéma québécois? Philippe Falardeau croit que dans les 15 prochaines années, les plus gros titres vont provenir des communautés autochtones. De plus en plus de sujets vont émerger de ces communautés, dit-il.