Yvon Soucy : Une décennie à la préfecture

Yvon Soucy devant l’édifice Claude-Béchard. Photo : Maxime Paradis.

Visage marquant de la politique régionale des dernières années, Yvon Soucy agit à titre de préfet de la MRC de Kamouraska depuis dix ans. Une décennie à défendre des enjeux et des projets qui ont changé le visage de ce territoire composé de 17 municipalités et peuplé d’un peu plus de 20 000 habitants. Retour sur dix années qui ont aussi positionné différemment cette structure administrative qu’il représente et qui semble plus que jamais s’imposer comme une voix politique qui a du poids à l’échelle régionale.

Yvon Soucy nous a accueillis à l’édifice Claude-Béchard de Saint-Pascal, là où tous les services de la municipalité régionale de comté de Kamouraska – un terme qu’il préfère à l’acronyme MRC – ont été regroupés en 2015. Construit à coût nul pour les citoyens du Kamouraska, tient-il à rappeler, le bâtiment a été un des gros projets de la décennie pour le préfet, qui ne cache pas carburer à ce genre d’entreprise. « L’édifice Claude-Béchard, c’est ce qui m’a incité à faire un deuxième mandat à la préfecture, à même titre que la Maison du Kamouraska m’a motivé pour le troisième », avoue-t-il.

Celui qui n’a jamais vu la vie politique comme une carrière flirte pourtant avec ce milieu depuis près de 15 ans. Élu à la mairie de Mont-Carmel en 2005 en compagnie d’autres jeunes parents de sa municipalité tout aussi soucieux à l’idée de revitaliser le village, Yvon Soucy prévoyait tirer sa révérence au terme de ce premier mandat. Il faut dire que ces quatre années avaient été plutôt costaudes et que plusieurs projets avaient permis d’insuffler ce nouveau dynamisme que ses collègues du conseil municipal et lui rêvaient pour Mont-Carmel.

« J’avais le sentiment du devoir accompli et j’avais prévu retourner à ma vie d’entrepreneur », résume-t-il (NDLR : Yvon Soucy est copropriétaire de la Résidence Pierrette Ouellet avec sa conjointe Nancy Lavoie). Jamais la préfecture ne lui avait traversé l’esprit, jusqu’au jour où l’ancien préfet Jean-Guy Charest a annoncé qu’il ne solliciterait pas un autre mandat. « Je suis rentré chez moi en me disant que ça pourrait m’intéresser. Quand j’en ai parlé à Nancy, je pense qu’elle était encore plus convaincue que moi », se souvient-il.

Yvon Soucy a finalement été élu une première fois par acclamation cette année-là. Il a depuis répété l’exploit à deux autres reprises, en 2013 et 2017, récoltant chaque fois l’appui de ses pairs au conseil des maires.

« Il me reste encore deux ans et je n’ai pas pris de décision si je vais continuer ou non. J’ai besoin de me sentir utile, je n’aime pas la routine. »

À ce chapitre, il a été plutôt bien servi ces dix dernières années. Outre les grands projets de l’édifice Claude-Béchard et de la Maison du Kamouraska, Yvon Soucy a porté en quelque sorte le nouveau positionnement que la municipalité régionale de comté a pris au courant de la décennie, un rôle qui ne se limite plus qu’à la planification en matière d’aménagement du territoire, à la gestion des matières résiduelles ou à la préparation des rôles d’évaluation, par exemple.

Les dix dernières années ont vu les « champs de compétence » de la MRC de Kamouraska s’élargir par l’intégration du service de développement économique, suite à la disparition des CLD; la création de Promotion Kamouraska, qui assure, entre autres, le volet en matière d’attractivité territoriale; la mise en place du Parc régional du Haut-Pays, un projet fédérant les municipalités de l’arrière-pays kamouraskois afin de mettre en valeur leurs attraits et d’en faciliter leur développement; ou même en participant au déploiement de la filière mycologique (champignons) sur son territoire, en collaboration avec Biopterre.

Autant de projets parfois critiqués qui n’ont pas manqué de remettre en doute la pertinence des MRC, mais qui ont surtout assuré un rayonnement du Kamouraska au-delà de ses frontières naturelles. Des projets mobilisant qui semblent aussi à l’origine d’une unité sans faille autour de la table du conseil des maires de la MRC, Yvon Soucy étant beaucoup trop humble pour attribuer le mérite de cette absence d’esprit de clocher au leadership dont il peut faire preuve auprès de ses collègues maires. « On a des élus extrêmement compétents au Kamouraska et j’ai toujours eu la même approche, celle du travail d’équipe. Je crois n’avoir jamais hésité à utiliser les forces de chacun quand c’était nécessaire. Le préfet n’est pas toujours le meilleur porteur de ballons », dit-il modestement.

Il n’en demeure pas moins qu’Yvon Soucy est rarement resté dans l’ombre, apportant son appui à ses collègues maires sur plusieurs enjeux régionaux : l’avenir de Bombardier ou des soins de santé au Kamouraska, l’incertitude entourant le statut de l’ITA, Campus de La Pocatière ou même le déploiement de la couverture cellulaire et de l’internet haute vitesse sur le territoire. En portant la voix de la MRC en symbiose avec celle des municipalités qui la compose, le préfet a contribué à renforcer le poids politique du Kamouraska auprès des paliers gouvernementaux provincial et fédéral, au point qu’on sent de plus en plus ses voisines, comme L’Islet, s’en inspirer afin d’avoir la même considération de leur part.

Cette approche n’est peut-être pas unique au Kamouraska et à son préfet, mais elle a assurément porté ses fruits, au point où elle est peut-être devenue le nouveau créneau à occuper pour les MRC du Québec afin qu’elles soient enfin reconnues comme un réel palier de gouvernance régional par les instances supérieures. Un palier de gouvernance où pourrait même aboutir tous ces regroupements de services aujourd’hui souhaités par plusieurs municipalités rurales. Bref, il y a assurément là un beau défi pour Yvon Soucy qui semble craindre l’ennui plus que tout. Et à titre de premier vice-président de la Fédération québécoise des municipalités, il est clairement au bon endroit pour faire cheminer l’idée.