Éliane D’Anjou : 25 ans qui changent une vie

Éliane D’Anjou. Photo : La Traversée.

Éliane D’Anjou se souvient très bien de son premier jour à La Traversée. C’était un 10 octobre, deux jours après son anniversaire. Elle se rappelle également du coup de cœur instantané qu’elle a eu pour l’organisme et sa mission. Dès lors, un seul souhait l’habitait : ne pas avoir à le quitter.

C’était en 1996, il y a bientôt 26 ans. Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis, mais la flamme d’Éliane D’Anjou, elle, ne s’est jamais éteinte. Même si à l’aube de ses 64 ans elle ose parler de préretraite, elle avoue qu’elle devra apprendre à lâcher prise, tellement sa passion pour l’organisme dont elle est aujourd’hui directrice générale depuis une bonne vingtaine d’années l’anime toujours autant.

« Je suis coachée, dit-elle, en référence à cette préretraite qu’elle souhaite entamer à partir de l’automne pour avoir plus de temps pour sa famille, ses amis et elle. Le conseil d’administration est informé de mes intentions et on a commencé à en glisser un mot aux membres », enchaîne-t-elle.

Éliane D’Anjou apprendra donc dans les prochains mois à déléguer, non pas parce qu’elle aime avoir tout sous sa gouverne, mais simplement parce que cette travailleuse acharnée n’a jamais compté les heures. Dès ses premiers moments à La Traversée, elle a su se rendre indispensable alors qu’elle avait été embauchée pour seulement une année à raison de 20 h par semaine. « Je m’étais dit, je vais créer tellement d’activités avec les membres qu’ils ne pourront plus me laisser partir », raconte-t-elle en riant.

Son souhait a finalement été exaucé, car un an après elle passait d’animatrice à intervenante, après que la direction et le conseil d’administration aient réussi à attacher le financement pour assurer la récurrence de son poste. Quelques années plus tard, elle devenait coordonnatrice à la suite du départ de Gisèle Couture, puis directrice générale de l’organisme, un cheminement qui ferait l’envie de plusieurs.

Des défis

Tout n’a pourtant pas toujours été rose durant ce quart de siècle, les défis étant toujours nombreux dans le milieu communautaire. À l’arrivée d’Éliane au milieu des années 1990, l’organisme en était encore à ses débuts et la santé mentale était tout sauf un sujet « à la mode ». Les premières années et encore aujourd’hui, démystifier les tabous autour de cette réalité demeure un engagement quotidien.

« La recherche de financement nous a aussi demandé beaucoup d’énergie. Toutes les activités que nous avons organisées pour lever des fonds dans la communauté et assurer la pérennité de notre mission, c’est juste fou! Autant les employés que les bénévoles, on ne s’est jamais empêché de voir grand. »

À quelques reprises, La Traversée a organisé de gros spectacles à la Salle André-Gagnon, alignant une série d’artistes amateurs de la région. Elle a aussi présenté en ce même lieu des pièces de théâtre montées par les membres, faisant parfois salle comble. Il y a aussi eu les activités spinning et la Zumba lumineuse du GOvember qui, en plus de susciter un élan de participation incroyable au sein de la population de la région, a permis de faire parler de La Traversée comme jamais.

Toutes ces activités, qui se sont tenues sous le signe du bonheur et de la joie, représentent bien ce qu’est La Traversée de l’avis d’Éliane D’Anjou. « Parce que notre mission est axée sur la santé mentale, les gens pensent à tort que tout est gris à La Traversée. Ce n’est pas le cas, les gens qui viennent ici aiment la vie, ils ne seraient pas là autrement. Ils veulent aller mieux et on les accompagne, on les outille pour qu’ils y parviennent. »

Des rencontres

De ces 25 années, Éliane D’Anjou retient aussi les rencontres. Les liens qu’elle a tissés avec les gens évoluant au sein du milieu communautaire kamouraskois valent de l’or, selon elle. « Les organismes de la région, ils se serrent vraiment les coudes. Si on a un problème, on est toujours à un appel de trouver la solution. »

Tous les employés, stagiaires — plus d’une cinquantaine! — bénévoles et membres du conseil d’administration sont pour la plupart des amis. Une des intervenantes, Judith St-Jean, est même devenue sa belle-fille, elle qui partage la vie de son fils depuis 20 ans!

« Quand j’ai commencé à travailler ici, je vivais une période difficile de ma vie. La Traversée a été comme un baume sur le cœur. Cette résilience-là, c’est ce que j’ai essayé de transmettre aux membres de l’organisme : oui, trébucher, mais surtout se relever et recommencer à avancer, en ne restant pas accroché au passé. C’est une belle réussite sur le plan humain dont je vais toujours rester fière. »