Le front commun s’exprime sur la Côte-du-Sud

Les grévistes ont fait des allers-retours sur la 6e Avenue Pilote à La Pocatière, entre l’hôpital Notre-Dame-de-Fatima et le Centre Bombardier. Photo : Maxime Paradis

De Montmagny à La Pocatière, les employés du secteur public font front commun sur la Côte-du-Sud. Des centaines d’entre eux ont érigé des lignes de piquetage pour trois jours devant les principaux établissements de santé et d’éducation de la région, à l’instar de ce qui s’observe partout au Québec.

Dans Montmagny-L’Islet, le point de ralliement était l’école secondaire Louis-Jacques-Casault. Des centaines de professionnels de l’éducation des deux MRC s’y étaient donné rendez-vous afin de manifester leur mécontentement. Les professionnels du Centre d’études collégiales de Montmagny étaient aussi de la partie.

Au Kamouraska, les grévistes étaient divisés en deux endroits distincts : le cégep de La Pocatière et le Centre Bombardier. Le premier rassemblait les enseignants, les professionnels et le personnel de soutien de l’établissement. Le second était le lieu de convergences de tout le personnel des écoles kamouraskoises du Centre de services scolaire de Kamouraska–Rivière-du-Loup.

À eux s’ajoutait l’ensemble des professionnels kamouraskois du Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) du Bas-Saint-Laurent. Ensemble, ils ont marché du Centre Bombardier à l’hôpital Notre-Dame-de-Fatima sur la6e Avenue Pilote, au son des klaxons, signe de l’appui de la population à leur égard.

Éducation

Le front commun, qui a rassemblé durant la semaine entre 400 000 et 600 000 travailleurs du secteur public au Québec, s’est exprimé alors qu’il y avait blocage à la table des négociations avec le gouvernement. Ce blocage, contrairement à ce qu’avançait la présidente du Conseil du trésor Sonia LeBel, n’était pas uniquement dû à l’offre salariale du 29 octobre dernier, bien que celle-ci ait été considérée comme étant « dérisoire » par les grévistes.

« Mais n’en déplaise à Mme Lebel, le salaire fait partie des conditions de travail. Qualifier de généreuse une augmentation de 10,3 %, alors que l’inflation sera autour de 18 % pour la même période, c’est franchement insultant », a déclaré le président du Syndicat du personnel de soutien scolaire Bellimont, Samuel Fortin.

Patricia Gamache, représentante du préscolaire pour le Syndicat de l’enseignement du Grand-Portage, a revendiqué des ratios autour de 18 élèves par classe, alors que ceux-ci se situent à l’heure actuelle entre 18 et 26 élèves, selon que la classe se trouve en milieu défavorisé ou non.

Selon elle, une telle mesure permettrait aux enseignants de mieux aider les élèves en difficulté, mais aussi d’accompagner davantage les élèves performants qui se retrouvent parfois, bien involontairement, laissés-pour-compte à cause de l’ampleur de la tâche.

« On manque de ressources spécialisées en soutien dans les classes, d’ergothérapeutes, d’orthophonistes. Nous n’avons jamais eu autant d’enfants de quatre ans avec des difficultés de langage. La tâche est devenue telle que des enseignants d’expérience, qui ont plus de 20 ans de métier, choisissent de quitter la profession », a-t-elle ajouté.

Ces propos trouvaient écho jusque dans le centre de services scolaire voisin. Dans une enquête réalisée le printemps dernier, les enseignants œuvrant pour le Centre de services scolaire de la Côte-du-Sud ont indiqué que plus du tiers du temps de classe passe exclusivement dans la gestion de classe et les difficultés inhérentes à celle-ci.

« Seulement 66 % du temps d’enseignement est considéré de qualité par nos membres. Ramené sur une année, c’est l’équivalent de 60 jours d’enseignement perdus. Ce n’est pas pour rien que la tâche et la composition de la classe sont au cœur de nos revendications », a pour sa part déclaré le président du Syndicat de l’enseignement de la Côte-du-Sud, Pascal Côté.

Même au collégial, les enseignants réclament une meilleure reconnaissance des différents aspects qui composent aujourd’hui leur tâche. Guillaume Dufour, président du Syndicat des enseignantes et enseignants des campus de La Pocatière et de Montmagny, le soulignait à gros trait, et s’inquiétait dans ce contexte des conséquences sur l’enseignement offert aux étudiants.

« Il est aussi question de protéger et de promouvoir la mission du réseau collégial, pour garantir l’accessibilité à une éducation supérieure de qualité », a-t-il dit.

Santé et services sociaux

De concert avec les employés du milieu de l’éducation, l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) a aussi dénoncé les dernières offres salariales gouvernementales qui « appauvrissent » les travailleurs dans le contexte inflationniste actuel.

« Notre convention collective est échue depuis le 31 mars dernier. Dans son offre, le gouvernement ne tient même pas compte de l’inflation réelle de 7,2 % vécue l’an dernier. Déjà, avec notre dernière convention, nous nous sommes appauvris, et la dernière proposition de 2 % la première année et 1,5 % les années subséquentes nous appauvrirait tout autant », a rappelé Simon Dubé, représentant national de l’APTS pour le Bas-Saint-Laurent.

Le syndicat représente l’ensemble des professionnels et techniciens à l’échelle du CISSS du Bas-Saint-Laurent. Au même titre que les infirmières, une pénurie de personnel attribuable à des conditions d’emploi mésadaptées fragilise différents secteurs d’activités, au point où l’APTS estime qu’environ un emploi sur cinq est actuellement découvert dans les milieux de travail qu’elle représente. .

« Ça signifie qu’il n’y a plus de liste de rappel. Imaginez la pression sur les équipes quand une personne est malade, ou qu’il y a un congé de maternité. Dans les établissements de santé en périphérie, comme au Kamouraska, la situation est encore plus criante, car les équipes sont plus petites, et il y a aussi la proximité de Chaudière-Appalaches qui crée une ponction au chapitre des travailleurs », s’est insurgé le représentant national pour le Bas-Saint-Laurent.

Le front commun se poursuit partout au Québec aujourd’hui et demain. Avec le mouvement de grève des infirmières (Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec) prévu pour la fin de la semaine, et celui de la Fédération autonome de l’enseignement qui représente plusieurs des enseignants en milieu urbain, c’est environ 600 000 travailleurs du secteur public qui auront été sur les lignes de piquetage durant la semaine.

Avec les informations de Maxime Paradis et José Soucy.

Ligne de piquetage devant le cégep de La Pocatière. Photo : Maxime Paradis
Le front commun devant l’école secondaire Louis-Jacques-Casault. Photo : José Soucy
Quelques grévistes à l’entrée de l’hôpital de Montmagny. Photo : José Soucy