Des 525 personnes qui travaillent chez Aliments ASTA de Saint-Alexandre, 175 sont des travailleurs étrangers temporaires. L’annonce d’Ottawa, qui forcera l’entreprise à réduire de 30 % à 20 % la proportion de travailleurs étrangers temporaires, pourrait mettre en jeu une cinquantaine de postes.
« Depuis la pandémie, nous avons intensifié le recours aux travailleurs étrangers pour pallier la pénurie de main-d’œuvre. Nous avons investi massivement pour optimiser nos processus, mais nous avons besoin d’effectifs pour soutenir la production », explique Édith Laplante, directrice générale du développement organisationnel chez Aliments ASTA, qui utilise les services de travailleurs étrangers depuis 2012.
Le secteur de la transformation de la viande s’était vu accorder une dérogation lui permettant d’atteindre 30 % de travailleurs étrangers, un seuil supérieur à la norme de 20 % dans le secteur alimentaire. La décision d’Ottawa de ce pourcentage à 20 % représente ainsi un défi de taille non seulement pour cet acteur majeur de la transformation alimentaire porcine dans la région, mais pour toute l’industrie.
La réduction du personnel étranger aura non seulement un impact sur la capacité de production de l’entreprise, mais aussi sur sa contribution à l’économie locale. Parce qu’outre les chiffres, il y a aussi l’aspect humain. « Ces travailleurs ne sont pas de passage. Ils sont ici sous des contrats de 24 à 36 mois, et certains envisagent de s’établir définitivement. Ils font partie intégrante de notre communauté et de notre économie locale. Chaque emploi à l’usine génère en moyenne quatre autres emplois dans la région, notamment dans le commerce de détail. La perte de ces travailleurs aura un impact économique direct sur les entreprises avoisinantes », précise Mme Laplante, qui ajoute qu’Aliments ASTA a investi dans la construction de logements pour faciliter l’intégration des travailleurs étrangers.
Autres obstacles
Plusieurs travailleurs envisagent de devenir résidents permanents, mais les délais de traitement des demandes constituent un autre obstacle. « Pour obtenir la résidence permanente, il faut cumuler 24 mois de travail au Québec. Pourtant, les nouveaux permis de travail temporaires sont désormais limités à 12 mois, ce qui complexifie le processus, et augmente la pression sur ces familles qui espèrent s’établir ici », déplore Mme Laplante. Cette instabilité administrative contribue au stress des employés étrangers, qui ignorent si leur contrat pourra être renouvelé.
Aliments ASTA demande des ajustements à la politique d’Ottawa pour mieux répondre aux réalités du secteur de la transformation alimentaire et de sa localisation régionale. Des démarches politiques sont en cours pour obtenir des délais supplémentaires, et des options permettant de préserver les emplois. « Le temps presse. Notre demande pour une application plus souple de cette nouvelle règle en région est demeurée sans réponse pour l’instant », conclut Mme Laplante.