Interdire complètement le cellulaire dans les écoles québécoises et sur les terrains des établissements, c’est la principale recommandation dévoilée récemment par la Commission spéciale sur l’usage des écrans chez les jeunes, avant même le dépôt de son rapport final attendu le 30 mai.
La présidente de la Commission, la députée de Rivière-du-Loup–Témiscouata Amélie Dionne, explique que cette mesure fait l’unanimité parmi les membres de la Commission, ainsi que chez une majorité de citoyens et d’acteurs du milieu scolaire. « En janvier, la Fédération des syndicats de l’enseignement a sondé ses membres : 76 % des enseignants se sont dits favorables à une interdiction totale du cellulaire sur le territoire de l’école », dit-elle.
En parallèle, une consultation publique en ligne, une tournée dans plusieurs établissements scolaires, et l’analyse d’écoles déjà soumises à une telle interdiction ont renforcé cette orientation. « Au Collège Notre-Dame à Rivière-du-Loup, la mesure est en place depuis cinq ans. Quand on questionne les jeunes là-bas, ils nous disent qu’ils ne reviendraient pas en arrière. Ils ont compris les bienfaits de cette limitation. »
Majorité numérique
Au-delà du cellulaire à l’école, la Commission s’intéresse aussi à la question de la majorité numérique, soit l’âge à partir duquel un jeune pourrait légalement accéder aux réseaux sociaux. « C’est un enjeu important. Les experts entendus en commission nous ont tous dit qu’il faut retarder l’accès à ces plateformes, qui peuvent causer de la dépendance », conclut Amélie Dionne. Le rapport final, prévu pour le 30 mai.
Le Syndicat de l’enseignement du Grand-Portage, par la voix de sa trésorière Nathalie Dionne, estime que le principal défi lié à l’interdiction complète des cellulaires à l’école ne sera pas l’adhésion à la mesure, mais sa gestion. « En classe, je peux gérer. Mais quand arrivent les entrées, les sorties, ou les pauses sur le terrain de l’école, c’est là que ça se complique », explique Mme Dionne, également enseignante.
Selon elle, la mesure, bien qu’appuyée, demandera une adaptation majeure sur le plan de la surveillance, en particulier au secondaire. « Il y a du personnel de soutien qui s’occupe des surveillances, mais ça risque d’être plus compliqué pour eux », note-t-elle, comparant la situation à celle de la vapoteuse ou de la cigarette, interdites aux mineurs mais tout de même présentes dans les milieux scolaires.
La directrice adjointe de la Commission scolaire Kamouraska-Rivière-du-Loup, Geneviève Soucy, affirme que la recommandation de la commission n’amènerait donc pas un énorme changement de culture à la situation actuelle. « Le cellulaire est interdit dans les salles de classe officiellement depuis septembre 2024 à la suite de la directive du ministère, mais nos écoles avaient déjà mis des mesures en place en ce sens depuis quelque temps. Chaque école et son conseil d’établissement sont autonomes dans le déploiement de leur code de conduite et de leurs règles de vie. »
Mme Soucy cite à titre d’exemple l’école secondaire Chanoine-Beaudet de Saint-Pascal, qui a déjà entrepris une démarche de consultation auprès du personnel, des parents et les élèves à ce sujet. « Du côté du centre de services, nous estimons que chaque outil qui crée une distraction en classe ne devrait pas s’y retrouver, puisque l’objectif est de préserver la qualité de l’apprentissage. Évidemment, il est important de poursuivre le développement des compétences numériques chez les élèves », conclut-elle.
