Britany Carrier ne l’a pas trouvé drôle. Cette étudiante de 2e année en Santé animale au Cégep de La Pocatière a dû faire trois heures de route inutilement le 11 mai en avant-midi pour finalement découvrir que son cours avait été annulé à la dernière minute, à cause de la grève des enseignants.
Habitant Saint-Damase en Matapédia, Britany Carrier loue une chambre aux résidences du Cégep de La Pocatière. Avec la pandémie, elle passe la majeure partie de son temps chez elle et se déplace au Cégep au besoin lorsque ses cours se déroulent en présentiel. Dans les deux dernières semaines, il était prévu que cette présence en classe se limiterait qu’à un seul cours durant la semaine. Elle ne prévoyait donc pas demeurer inutilement aux résidences, ce qui a motivé ses allers-retours.
« Ce que je déplore, c’est que l’information nous soit transmise à la dernière minute. Jusqu’à ce matin (11 mai), on nous disait que c’était très probable qu’il y ait la grève. C’est seulement ce midi qu’on nous l’a confirmé. Et moi, je viens de faire trois heures de route pour rien », s’est-elle exclamée.
Cette grève de deux jours décrétée à partir du 11 mai à midi avait pourtant été annoncée par le Syndicat des enseignantes et enseignants des campus de La Pocatière et de Montmagny (SEECLPM) il y a un peu plus d’une semaine. Dans ses communications avec les étudiants via sa plateforme Colnet, le message envoyé par la direction du Cégep de La Pocatière le 7 mai dernier faisait toutefois état de « possibles » actions de grève pour les 11, 12 et 13 mai, et que davantage d’informations seraient communiquées concernant la reprise des cours en présentiel ou à distance entre midi et midi : 15 le 11 mai et 7 h 30 et 7 h 50 les 12 et 13 mai, si ceux-ci devaient être annulés.
« Étant donné qu’il doit d’abord y avoir constatation de grève avant de confirmer la tenue d’une grève, nous avons pris soin de mentionner que les indications nécessaires allaient leur être transmises à des moments précis pour chaque journée ciblée, quelques minutes après avoir constaté la grève », a indiqué dans un document Frédéric Busseau, coordonnateur du service des communications et du développement des effectifs étudiants au Cégep de La Pocatière.
Le président du SEECLPM David Boutin abonde dans le même sens. Des changements de dernière minute au niveau national à la table des négociations auraient très bien pu remettre en question cette grève à quelques minutes de son déclenchement, même chose pour les jours subséquents, ce pour quoi le Cégep de La Pocatière n’a d’autres choix que d’adopter une approche prudente et quotidienne dans ses communications.
« Ça fait partie de la réalité, malheureusement. Nous sommes sincèrement désolés pour cette étudiante et tous ceux qui sont touchés de près ou de loin par cette grève. Mais si on fait ça, c’est ultimement pour eux, pour leur offrir un meilleur encadrement et un meilleur accompagnement dans notre enseignement », a-t-il ajouté.
Même si elle se considère comme un dommage collatéral de cette grève, Britany Carrier se montre tout de même compréhensive. Comme elle l’a elle-même soulignée, elle est d’avis qu’une grève se doit d’être déclenchée à un moment où son impact sera maximal. Elle trouve simplement dommage que cela se déroule en fin de session, à quelques jours des examens, dans une situation pandémique qui a déjà occasionné son lot de stress aux étudiants et qui a complexifié leurs apprentissages dans la dernière année.
Frédéric Busseau a précisé que l’horaire de fin de session s’appliquait à partir du 14 mai pour les étudiants. Il les invite à consulter l’horaire en ligne puisque des examens prévus durant les jours de grève ont pu être déplacés dans la semaine du 17 mai.
Revendications
Représenté au niveau national par la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ-CSN), le SEECLPM a rappelé qu’il n’y avait toujours pas d’avancées à la table des négociations avec le gouvernement. Les revendications concernent toujours l’attractivité et les conditions de travail pour les employés à statut précaire, notamment ceux de la formation continue qui gagnent 50 % du salaire d’un enseignant régulier, précise David Boutin.
Davantage de ressources spécialisées sont aussi réclamées en soutien aux enseignants du collégial qui doivent conjuguer avec une augmentation significative des étudiants à besoins particuliers depuis quelques années.