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Ce monde, c’est nous !

Photo: IA

Ça a pris un an, mais on s’est enfin apprivoisé. Depuis les débuts de cette chronique, je tenais à ce qu’un dialogue s’établisse entre vous et moi. Je suis plutôt du genre impatient, mais j’ai compris que vous deviez apprivoiser la bibite — son approche, son humour particulier et un tantinet sarcastique. Ben, imaginez qu’en une semaine, vous avez été trois à me parler des Laroucheries. Pas le père, le Fils et le Saint-Esprit à la même table ; trois personnes différentes, rencontrées dans des occasions différentes, dans des contextes différents.

J’en suis très content, d’autant plus que ça fait changement des « honnn, mais vous avez dont ben engraissé depuis que je vous ai vu à la télé ! » J’avoue. Même Ozempic ne semble pas pouvoir avoir raison de mon tour de taille un tantinet débordant. Et comme mes assurances collectives ne paient pas pour cette coquetterie lorsque diabète il n’y a pas, je vais continuer d’engraisser. Trouvez-vous un autre sujet pour amorcer une conversation avec moi.

Toujours est-il que…

Ces chroniques d’humeur, je les écris surtout pour vous divertir. Et deux des trois personnes qui m’en ont parlé m’ont dit aimer particulièrement lorsque je leur présente des gens ordinaires, attachants et empathiques, qui redonnent confiance en l’humanité. Ça les encourage. Parce qu’on dira ce qu’on voudra, comme dirait mon défunt père, ça va mal.

Ça meurt en tabouère par les temps qui courent. Le portrait des personnalités vivantes a encore perdu deux grands en une semaine : Victor-Lévy Beaulieu et Serge Fiori. Vous aviez gagé sur Janette Bertrand ou Dominique Michel ? Méchants…

Quand j’étais petit, je me souviens avoir demandé à ma mère ce qui se passait quand on mourait. Elle m’avait répondu qu’on allait chez le petit Jésus. Je n’ai pas osé lui demander pourquoi personne ne revenait jamais de chez le petit Jésus, que j’imaginais alors comme le méchant ogre du petit Poucet.

Si on me pose la question maintenant, j’étendrai mes bras tout le long de leur petite taille et je répondrai : « ça ». « Ça » dans le sens de « ça ». Rien. La vie continue. VLB était l’un de nos plus grands écrivains. Il nous a fait réfléchir sur notre identité, notre condition de « peuple en devenir ». Je crois même qu’à un moment donné, il a dit de nous qu’on était arriérés. Parce qu’il ne mâchait pas ses mots. Aujourd’hui, on ne peut plus dire ça. Même si c’est vrai. Et là, ben il est mort. Qu’est-ce qui se passe depuis ? Rien. Enfin, s’il est à la table du petit Jésus et continue de s’indigner, ce dernier doit avoir les oreilles en criss… Mais pour nous, la vie continue.

« Où est allé tout ce monde qui avait quelque chose à raconter », a écrit Fiori. Mon Serge, il meurt ce monde. À vitesse « Grand V ». Et le pire, c’est qu’on l’oublie ce monde. Le cadavre est à peine froid qu’on est passé à autre chose. On m’a toujours dit qu’on ne pouvait pas savoir où on s’en allait si on ne savait pas d’où on venait. Alors, où s’en ira-t-on lorsque notre patrimoine humain aura disparu, que sa mémoire aura été oubliée, et que sa seule référence sera celle que l’intelligence artificielle aura voulu inventer ?

Ce monde qui a quelque chose à raconter, c’est vous. Le patrimoine d’aujourd’hui, c’est la mémoire collective de demain. C’est la raison pour laquelle je suis content qu’on se soit apprivoisé. Donc, à votre suggestion, j’irai avec plaisir visiter le parc de la Madone à Saint-André-de-Kamouraska. Bientôt, je vous présenterai aussi Monsieur Lutin, un homme qui redonne espoir et change des destins, rien que parce qu’il fait ce qu’il aime, et essaie ce qu’il veut. Alors, continuez de m’écrire, de m’arrêter sur la rue. C’est comme ça que nous éviterons d’oublier.

Parlant d’oublier, il y a 16 ans, en 2019, le maxillaire inférieur me décrochait et j’inondais ma cuisine de larmes. Michael Jackson mourait. À l’époque, j’ai pleuré ma vie. Et vous savez quoi ? Même si c’était mon idole depuis plus de 40 ans et que j’ai dansé la chorégraphie de Thriller à travers le monde, si Facebook n’avait pas été là pour me le rappeler, de l’aurais complètement oublié !

I’m bad…

Illustration générée par IA