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Ces femmes qui tissent

Plusieurs fois par semaine, elles sont une vingtaine à se rendre au deuxième étage de la gare de Sainte-Anne-de-la-Pocatière. Depuis plus d’un an, c’est là qu’est aménagée la Salle de tissage du Cercle de Fermières de La Pocatière. Seules ou en groupe, elles tissent pour le plaisir, ou pour réaliser des pièces qui doivent être exposées. Dans tous les cas, elles ne s’ennuient jamais et l’entraide n’est jamais très loin, sinon « au bout du fil. »

Candide Beaulieu tisse depuis 35 ans. C’est elle qui est responsable de la Salle de tissage à la gare. Elle nous raconte comment les Cercles de Fermières ont été créés à l’époque pour permettre aux femmes de socialiser et de sortir de l’isolement. À La Pocatière, le Cercle aura 90 ans en 2018.

Aujourd’hui, la réalité des femmes a bien changé. L’isolement n’est plus la problématique numéro un qu’elles rencontrent. Le temps, c’est ce qu’elles manquent cruellement. Ce précieux temps, c’est aussi ce que ça prend quand vient le temps de se lancer dans le tissage. « Pour un gros projet, on peut prendre jusqu’à deux semaines pour monter un métier à tisser », d’indiquer Candide.

Dans ce contexte, pas surprenant qu’il soit difficile de recruter. Et cette situation est d’autant plus préoccupante, car les Fermières du Québec sont détentrices d’un savoir-faire unique et pas seulement en matière de tissage. « On essaie d’intéresser une certaine relève à travers des ateliers d’artisanats jeunesse à l’école primaire. On essaie aussi d’impliquer des jeunes femmes quand elles viennent visiter l’atelier, mais on est consciente qu’elles manquent de disponibilité », de mentionner Candide Beaulieu.

Heureusement, il y a les retraitées. C’est le cas d’Hélène Landry, qui s’est jointe au Cercle de Fermières de La Pocatière il y a quatre ans et qui depuis s’adonne au tissage. Sa première expérience au métier à tisser, elle s’en souvient comme si c’était hier. « J’étais en train de faire une couverture. Je me suis accrochée dans mes fils et j’en ai cassé une bonne dizaine. Je ne savais pas quoi faire. Heureusement, Candide était là et c’est elle qui m’a montré à les remplacer », raconte-t-elle. « C’est la beauté de la chose. Il y a toujours quelqu’un pour nous aider. Si ce n’est pas sur place, c’est “au bout du fil” », enchaîne-t-elle.

« Il faut souvent aller à Québec pour trouver ce dont on a besoin pour tisser. C’est souvent un frein pour celles qui aimeraient se lancer », – Céline Pelletier.

Des défis

Outre le recrutement, un autre défi auquel sont confrontées ces tisserandes est la disponibilité du matériel. Cette problématique, tous les Cercles de Fermières en région la rencontrent. « Il faut souvent aller à Québec pour trouver ce dont on a besoin pour tisser. C’est souvent un frein pour celles qui aimeraient se lancer », d’expliquer Céline Pelletier, tisserande depuis 17 ans.

Mais ces petites embûches paraissent bien futiles pour ces passionnées, une fois le travail terminé. Elles n’y pensent pratiquement plus lorsque leurs pièces sont exposées ou vendues. Et elles arrivent même à les oublier quand elles apprennent que leurs linges de vaisselle, par exemple, se retrouvent maintenant sur des comptoirs de cuisine de la France ou du Colorado. « Il faut se le dire, c’est un passe-temps qui demande beaucoup de patience, mais c’est surtout un défi passionnant où l’on ne s’ennuie jamais », de conclure Candide Beaulieu.