Le Québec et la Californie sont désormais les seuls en Amérique qui maintiennent une tarification du carbone pour limiter l’usage du pétrole, principal responsable du réchauffement du climat. Mais de plus en plus de Québécois semblent prêts à rejoindre le club des « aveugles volontaires » qui préfèrent voir brûler ou noyer leurs villes et villages plutôt que de payer leur gaz un peu plus cher, et surtout, d’en consommer moins.
Ce qui est en jeu dans ce débat, comme dans celui des oléoducs, c’est notre contribution à la diminution des émissions de gaz à effet de serre qui provoquent le réchauffement accéléré du climat, avec toutes les conséquences qui en découlent. Nous savons que les transports sont chez nous la source principale de ces émissions. Nous savons aussi que les Québécois aiment bien les gros chars et les pick-up, et les Canadiens, le pétrole.
Le Québec est une goutte dans l’océan de la pollution, me direz-vous. Mais toutes les contributions pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre de la part des automobilistes sont utiles, comme en témoigne cette liste du nombre de tonnes de GES émis par habitant dans le monde :
- Amérique du Nord : 15 tonnes par habitant (États-Unis, 18 ; Canada, 19 ; Québec, 11)
- Amérique du Sud : 5 tonnes par habitant
- Europe : 8 tonnes par habitant
- Asie : 6 tonnes par habitant (Chine, 11 ; Inde, 3 ; Japon, 1)
- Objectif à atteindre pour éviter la catastrophe : 2 tonnes par habitant
Le Québec s’inscrit malgré tout parmi les bons élèves. Nous avons exclu définitivement l’exploitation des énergies fossiles et leur exportation par oléoduc. Les villes imposent une taxe sur l’immatriculation pour soutenir les transports en commun. Nous avons rejoint la Californie dans une bourse du carbone qui oblige les entreprises qui polluent trop à acheter des crédits à des entreprises qui polluent moins : le plafond d’émission et le prix des crédits d’émission sont fixés par le gouvernement, et les profits qui en découlent (plus d’un milliard $ l’an dernier) servent à alimenter un Fonds vert (qu’il faudra cependant apprendre à mieux utiliser). Enfin, et surtout, nous possédons et développons un réseau d’énergies propres et renouvelables considérable avec Hydro-Québec, que nous devons aussi apprendre à mieux utiliser.
Aujourd’hui, parce que Trump et le reste du Canada, qui vivent du pétrole, balancent toutes leurs taxes — bêtement remboursables — sur le carbone, au mépris des catastrophes climatiques qui se multiplient, allons-nous revenir en arrière nous aussi ?
Ce n’est pas une raison pour nous, au Québec, de reculer. Les pays de l’Union européenne et plusieurs grands pays d’Asie ont aussi leur bourse du carbone. Nous sommes, comme la Californie, une société distincte. Nous avons su préserver nos programmes sociaux universels et nos principes d’égalité, même si cela nous impose de payer des impôts plus élevés que partout ailleurs. Nous avons choisi la solidarité. Nous avons choisi l’énergie propre. Nous avons l’environnement à cœur. Ce n’est pas le temps de céder, comme on nous y incite présentement sans scrupule, « pour quelques dollars de plus », des dollars bien mieux placés dans un Fond vert efficace pour l’avenir de notre Terre, de nos villages et de nos enfants.
Revenir en arrière, en queue de peloton, alors que nous sommes les rois de l’énergie propre serait indigne du Québec, et dangereux pour notre avenir.