Le Kamouraska compte 17 municipalités, dont trois ont plus de 2000 habitants, onze en ont moins de 1000, et sept moins de 600, pour un total de 21 000 habitants. Pas étonnant qu’il soit régulièrement question de regroupement ou fusion de municipalités, autour de l’un ou l’autre des trois centres (La Pocatière, Saint-Pascal, Saint-Alexandre), ou même autour d’une seule ville-MRC de Kamouraska.
C’est un sujet qui soulève facilement les passions parce qu’il touche l’identité, la fierté et la solidarité des communautés locales, leur sentiment d’appartenance et leur espace de référence quotidien.
La réponse à cette question varie selon que l’on considère la municipalité uniquement comme un centre de services de proximité (eau, égouts, déchets, incendie, sécurité, urbanisme, loisirs, rues et routes, évaluation et taxe foncière, etc.), ou d’abord comme la communauté démocratique de base où les citoyens peuvent exercer leur souveraineté et leur solidarité.
Dans le premier cas, on cherche la façon la plus efficace et la plus économique de fournir des services de proximité de plus en plus complexes et coûteux. C’est l’approche administrative, basée d’abord sur le territoire de référence des usagers. Le regroupement des services s’impose de plus en plus, soit qu’on transfère des responsabilités municipales à la MRC (évaluation, urbanisme, environnement, développement, etc.), soit qu’on crée des régies appropriées (services incendie, déchets, etc.), soit qu’on fusionne la gestion municipale de plusieurs municipalités voisines, soit qu’on envisage de fusionner des municipalités elles-mêmes en de plus grosses municipalités, ou en une seule qui coïnciderait avec la MRC, comme c’est le cas à plusieurs endroits au Québec.
Dans l’autre cas, on cherche à consolider la communauté d’appartenance et de référence, de façon à rendre possibles une vie et une participation démocratiques optimales. La municipalité est considérée comme la communauté de base où les citoyens peuvent exercer leur souveraineté et décider de leur milieu de vie.
Dans le cadre d’un État très centralisé comme celui du Québec, où les municipalités sont des créatures de l’État, les municipalités deviennent de plus en plus des machines administratives de services. Mais comme citoyens, nous devons revendiquer le droit d’en faire une communauté souveraine, où tous les citoyens non seulement participent aux décisions, mais décident et prennent en charge leur milieu de vie, leur développement et leur environnement. Pour y parvenir, les regroupements et les fusions ne sont pas nécessairement la meilleure ni la seule option. Ces dernières années, on voit que chaque petit village peut développer sa propre dynamique et sa propre attractivité, et nous devons développer, dans l’avenir, des communautés le plus autonomes et durables possible.
Cette prise en charge locale, cependant, n’exige pas nécessairement une structure municipale dans chaque localité. Chaque village pourrait se doter d’un comité de citoyens élu annuellement à l’intérieur d’une structure municipale élargie pour la gestion des services.
Deux choses m’apparaissent importantes dans ces discussions. La première, c’est que les citoyens prennent l’initiative de cette réorganisation plutôt que d’attendre une intervention d’en haut, bureaucratique et centralisatrice plutôt que démocratique. La seconde, c’est qu’il faut à tout prix protéger et privilégier la communauté d’appartenance locale comme base d’une prise en charge collective du développement durable, de l’autonomie et de l’avenir de nos villages.
Il faut à tout prix éviter de réduire la vie municipale à la gestion de services, sous tutelle de Québec. Le même souci démocratique devrait inspirer la fixation des territoires des MRC, des régions, des centres de services de santé, d’éducation, de gestion des ressources naturelles, et celui des comtés.
Vue sur La Pocatière. Archives Le Placoteux.