Les paramédics de La Pocatière devront encore visiblement se passer d’un horaire à l’heure, et cela, malgré la pandémie de coronavirus qui touche tout le Québec. Tommy Chouinard, propriétaire de l’entreprise Ambulance Chouinard, crie à l’injustice alors qu’ailleurs au Québec, des conversions que le gouvernement essaierait aujourd’hui de justifier par la COVID-19, auraient été réalisées dans les semaines qui ont précédé l’éclatement de la crise.
Des changements de ce type, survenus auprès d’entreprises ambulancières de l’Estrie, sont ce qui a piqué au vif le propriétaire d’Ambulance Chouinard qui se bat pour faire abolir ces horaires de faction depuis déjà plusieurs années. Dans cette région, où 570 cas positifs à la COVID-19 sont recensés en date du 7 avril, le CIUSS de l’endroit a procédé récemment à la conversion des derniers horaires de faction toujours en vigueur, le temps de la pandémie, tel que rapporté récemment dans nos pages.
« Ces changements sont survenus bien avant que le « bordel » pogne dans cette région-là à cause du coronavirus », souligne Tommy Chouinard.
Une simple recherche Facebook tend d’ailleurs à lui donner raison. Le 17 février, environ un mois avant que les premières mesures de confinement ne soient décrétées par le gouvernement du Québec, l’entreprise Ambulance Stanstead Inc était déjà à la recherche de trois paramédics pour combler des quarts de travail à l’heure de 12 h jusqu’en septembre, annonce publiée sur sa page Facebook. Une publication similaire sur les médias sociaux, par un technicien ambulancier de l’endroit que Tommy Chouinard nous a fait suivre, précise qu’il s’agit d’un horaire de faction transformé en horaire à l’heure avec l’autorisation du Ministère.
Le propriétaire d’Ambulance Chouinard a donc tenté de comprendre cette modification en entrant en contact directement avec Vincent-Gabriel Langlois, conseiller politique au cabinet de la ministre de la Santé et des Services sociaux Danielle McCann. Selon les données en sa possession, à 26,15 h de charge de travail global en 2018-2019, l’horaire de faction de cette entreprise ambulancière ne se qualifierait pas à une conversion d’horaire à l’heure, ne respectant pas la règle du 28 h minimum édictée par le Ministère.
« C’est lié au plan régional de contingence contre le COVID-19. La mesure est temporaire », a répondu Vincent-Gabriel Langlois, dans un courriel datant du 16 mars dernier que M. Chouinard nous a transféré.
Suivant cette logique, le propriétaire d’Ambulance Chouinard a donc pris la peine de demander qu’un de ses horaires de faction soit converti en horaire à l’heure lorsque le CISSS du Bas-Saint-Laurent lui a demandé de soumettre récemment son plan de contingence (NDLR : le plan de contingence dicte les options de l’entreprise en matière de personnel pouvant agir en relève des paramédics, en cas de contamination en lien avec la COVID-19). Le tout a été acheminé par courriel le 24 mars dernier. Depuis, Tommy Chouinard attend une réponse du CISSS.
« Nous sommes rendus au stade de la contamination communautaire partout au Québec, selon le directeur de la santé publique. Mes employés en horaire de faction retournent chez eux après chaque appel et devraient se changer et nettoyer leurs uniformes à la caserne à chaque fois avant de quitter pour ne pas contaminer leur famille à domicile. Vous imaginez la logistique de tout ça? Nos installations ne le permettent pas! Avec un véhicule à l’heure, celui-ci pourrait intervenir sur les cas de COVID-19, alors que celui de faction s’occuperait des transferts interhospitaliers. Ça serait plus sécuritaire pour tout le monde et on limiterait les risques de contamination », déclare Tommy Chouinard.
Réponse du CISSS
Mais au CISSS du Bas-Saint-Laurent, la direction semble visiblement s’en tenir à la ligne dure. D’une part, la conseillère-cadre aux communications stratégiques à la présidence-direction générale et relations avec les médias Ariane Doucet-Michaud rappelle qu’en temps normal, l’entreprise Ambulance Chouinard ne se qualifie pas pour une conversion d’horaire. D’autre part, elle ajoute que la demande de M. Chouinard nécessiterait dans les faits deux fois plus de personnel pour le même nombre d’heures de service, ce qui placerait les paramédics dans une situation où ils seraient plus susceptibles de contracter la COVID-19, entraînant ainsi une perte potentielle de ressources humaines dans un contexte pandémie où elles sont considérées essentielles.
De plus, Ariane Doucet-Michaud précisait que le CISSS avait « ciblé d’autres mesures afin de rendre disponibles plus de véhicules dans le territoire si le besoin se fait sentir et de pouvoir les dédier aux transports de cas COVID-19 positif si nécessaire. » Invitée à les préciser, Mme Doucet-Michaud a répondu : « Puisque les mesures proposées sont encore à l’étude par le MSSS, je ne les préciserai pas » ajoutant qu’elle nous reviendrait lorsqu’elles seraient déterminées.
Concernant le plan de contingence fourni par M. Chouinard, elle ajoutait que la demande avait été transmise au ministère de la Santé et des Services sociaux et qu’une réponse était à prévoir dans les prochains jours. Il n’en demeure pas moins que Tommy Chouinard trouve la situation particulièrement injuste et estime qu’encore une fois, les paramédics des régions plus éloignées passent en second.
Uniformes
Précisons qu’en date du 8 avril 16 h, Ambulance Chouinard a décidé d’imposer à ses paramédics de ne plus retourner chez eux avec leur uniforme de travail, pour des raisons de santé publique. Ils devront donc se changer sur place au début et à la fin de chaque intervention. M. Chouinard s’excuse à l’avance des délais de réponse de ses équipes qui se trouveront malheureusement affectés par cette directive.