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Je ne t’aime, moi non plus : quand l’amour devient une arnaque

Karl Lapointe-Legault, conseiller principal en prévention de la fraude chez Desjardins. Photo : Desjardins

Ça commence par un simple « Allô, mon beau », ou « Tu es si spécial pour moi ». Puis viennent les confidences, les promesses, les projets… et lentement, mais sûrement, les demandes d’argent. Ici comme ailleurs, les fraudes amoureuses font des ravages silencieux, en particulier chez les aînés, plus vulnérables à ce type de manipulation émotionnelle.

« Les fraudeurs prennent le temps de bâtir un lien affectif avec leur victime. Ils deviennent des confidents, parfois même des âmes sœurs aux yeux de la personne ciblée. C’est ce qui rend ce type d’arnaque aussi pernicieux », affirme Karl Lapointe-Legault, conseiller principal en prévention de la fraude chez Desjardins. L’institution financière est encore l’un des endroits fréquentés fréquemment par les aînés.

Dans bien des cas, la relation n’existe qu’au téléphone ou sur les réseaux sociaux. La victime ne voit jamais son interlocuteur, mais s’attache à lui, persuadée qu’une histoire d’amour est en train de naître. Une fois la confiance installée, les demandes financières débutent : quelques centaines de dollars pour un billet d’avion, puis un transfert urgent pour régler des frais médicaux, et ainsi de suite. Desjardins voit régulièrement passer ce genre de situation.

« Nos employés de première ligne sont formés pour détecter des signes comme des retraits inhabituels ou des transactions répétées vers des comptes inconnus. Mais le plus grand défi reste humain. Nos employés interviennent avec bienveillance et sans jugement », explique M. Lapointe-Legault.

Briser le silence

Cette vigilance fait partie intégrante du programme Maître de sa vie et de ses biens, mis en place dans les caisses pour outiller non seulement les employés, mais aussi les membres et les non-membres à mieux reconnaître les formes d’exploitation financière. L’objectif est de prévenir, mais aussi de briser le silence. « Beaucoup de personnes gardent tout pour elles, par honte, ou par peur de ne pas être crues. Mais c’est précisément cette honte qui permet à la fraude de se poursuivre », insiste-t-il.

Outre les fraudes amoureuses, les arnaques téléphoniques du type « petit-fils en détresse », ou « représentant bancaire » demeurent fréquentes. L’humoriste Peter MacLeod en a d’ailleurs été victime récemment, croyant parler à Desjardins Sécurité, le nom qui apparaissait sur son afficheur. Il a même raccroché et rappelé, mais au numéro sur l’afficheur. Il a ainsi rappelé les fraudeurs.

« Ce n’est pas parce que c’est écrit Desjardins sur l’afficheur que c’est vrai. Il faut raccrocher, puis rappeler au numéro officiel de votre caisse, inscrit au verso de votre carte. Jamais — et je le répète, jamais — une institution financière ne demandera votre NIP, votre mot de passe ou vos informations de connexion par téléphone », avertit Karl Lapointe-Legault, qui encourage les proches à garder l’œil ouvert. Des comportements inhabituels — une personne qui se replie sur elle-même, ou qui commence à demander de l’argent de manière inhabituelle — devraient éveiller les soupçons.

Les aînés sont parfois très seuls, et les fraudeurs le savent. Lorsqu’on leur dit « Je t’aime » tous les jours, ils ont envie d’y croire. « C’est à nous d’être présents, d’écouter, et de créer un climat de confiance pour qu’ils puissent se confier. Et si le doute persiste, il ne faut surtout pas hésiter à en parler avec un conseiller de sa caisse. Mieux vaut poser une question que de regretter un silence », conclut M. Lapointe-Legault.