Le meunier de la Seigneurie des Aulnaies, Steve Beaulieu, est à pied d’œuvre depuis déjà quelques semaines afin d’ajuster la roue à godets du moulin pour qu’elle soit au point en vue de la prochaine saison de production de farine artisanale. Pesant plus de 11 tonnes, cette dernière a été inaugurée le 3 juillet 2022. Sa construction et son installation auront coûté 500 000 $. Il s’agit par ailleurs de la plus grande roue à godets au Québec, qui devrait selon toute vraisemblance avoir une durée de vie d’au moins 50 ans.
« Ça fait deux semaines que je l’ai décollée, car l’hiver, lorsque ça gèle, elle ne peut plus fonctionner. Et puisqu’elle a été arrêtée, elle n’a pas séché égale de sorte qu’elle est actuellement déséquilibrée. C’est pour cela que je l’ai fait tourner 24 heures sur 24 pour qu’elle absorbe son eau afin de prendre sa pesanteur. Ensuite, je vais possiblement y mettre des pesées pour la balancer adéquatement », a déclaré au Placoteux avec passion Steve Beaulieu.
Selon les dires du meunier, la roue du moulin, qui mesure 24 pieds de haut et 6 pieds de large, doit absolument posséder ces dimensions afin de mettre à profit le maximum de force hydraulique provenant de la rivière Le Bras, puisque celle-ci n’est pas réputée pour ses grands débits d’eau. « Plus tes courants d’eau sont petits, plus tu dois compenser par la pesanteur, car c’est par sa force d’inertie qu’elle tourne. En somme, c’est vraiment son poids qui fait le travail », a-t-il ajouté.
Une fois mise en mouvement par la force de l’eau, la roue actionne les meules de pierre qui servent, encore aujourd’hui, à la production de farines artisanales, de la même manière et avec les mêmes gestes et les mêmes techniques qu’au 18e et au 19e siècle.
Un travail d’acrobate
En 2022, et après cinq ans d’attente, l’eau a finalement retrouvé son chemin jusqu’au moulin, afin de permettre à la nouvelle roue de reprendre son lent mouvement.
C’est l’entrepreneur général Les Constructions A. Carrier de Québec, en partenariat avec Charpente Côte-Sud de L’Islet, qui avait été mandaté pour réaliser les travaux de reconstruction d’un projet dit unique et exceptionnel. Les artisans-charpentiers ont ainsi dû maîtriser l’art de la haute voltige pour exécuter les travaux, car, attachés à leur harnais, ils ont dû réaliser une véritable danse aérienne en se balançant sur les échafaudages comme de véritables acrobates, dignes des plus grands cirques de la planète. Des heures de travail ont dû être réalisées afin d’accomplir cette prouesse d’ordre technique.
Rappelons que la construction du premier moulin sur ce site remonte à 1738, en plein régime français, et que le bâtiment que l’on peut encore admirer et visiter aujourd’hui a été édifié en 1852. « En travaillant ici, je me sens un peu figé dans le temps, mais force est de constater que je me sens dans mon univers, même que j’en rêve la nuit. Je suis plus qu’heureux de participer à la fabrication de la meilleure farine artisanale du Québec », a conclu avec enthousiasme Steve Beaulieu.